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Firewolf Production présente
Sur un air de sax

Je me traînais comme toutes les fins de soirées dans les rues les plus crades et sombres de la ville. Il fallait trouver un bon coin pour dormir. Mais bon, sans trop d’espoir, je poursuivais ma promenade à la recherche d’un recoin de rue à l’abri du vent et des regards. Je préférais passer une nuit blanche assis sur un bord de trottoir, mon saxo contre moi, plutôt que de m’endormir et laisser mon seul trésor à portée du premier toxico en manque à la recherche d’un objet ayant un minimum de valeur.  

La soirée était un peu en dessous que d’habitude. Moins de six dollars. Même pour un mardi, j’aurais pu espérer au moins quatre billets de plus. J’ai de quoi manger, c’est déjà ça.  

 

On m’appelle Fish. Je suis un clodo, mais un gentil clodo. Je joue du sax’ devant les cinémas quand on me vire pas. Vous avez peut-être pu me voir si vous allez vous enfermer deux heures pour sept dollars cinquante pour voir un film qui passera de toute façon quelques années plus tard sur votre téléviseur couleur qui coûte plusieurs centaines de billets. Je porte toujours une veste kaki, trouée aux coudes, que j’ai pas payé. Je l’ai trouvé dans une poubelle. Moi, je paye pas mes fringues. Je ne les vole pas non plus, je les récupère. Quand un vêtement n’est plus assez bien pour vous, moi, je m’en contente, pendant que vous vous allez vous refaire une garde-robe en dépassant des fois plus de soixante dollars pour vous payer un sweet-shirt, que je porterai peut-être quelques années plus tard, pour rien.  

 

La nuit est froide et venteuse. Il doit être deux heures et je commence à tourner en rond dans les mêmes quartiers. Y’a pas un coin qui me plait. Les prostituées sont encore plus gelées que moi, mais au lieu de se chauffer, elles chauffent les passants en voiture. La première fois que j’ai eu cette réflexion marrante, j’ai rigolé. Aujourd’hui je trouve ça aussi pathétique qu’un clochard qui joue du saxo devant des gens plus riche que lui dans une totale indifférence, ce qui dans l’absolu me fait penser qu’il y a pire que moi. J’ai du mal à comprendre comment cette jolie blonde là-bas a pu tomber dans le tapin. Elle a pas l’air d’une camée, et elle à un physique à être au moins secrétaire ou serveuse de bar. M’enfin, ça me regarde pas et je m’en fout. C’est décidé, je resterai assis au coin de la quinzième et de la trente-deuxième. Un peu à l’écart de crack-town.  

 

Et j’en vois défiler des gens, mine de rien, pour un mardi soir. Vous imaginez pas tout ce qu’on peut connaître des gens, rien qu’en les observant quelques secondes.  

Les personnes généreuses ne sont pas ceux qui vous donnent une pièce, ce sont ceux qui vous croise et qui vous regardent avec un sourire complaisant.  

Ceux qui marchent dans le vague, sans se soucier d’où ils sont, viennent de se faire larguer par leur petite amie.  

Et ceux qui passent en courant sont pressés. Bon d’accord, j’ai du mal à comprendre ceux qui courent. Faut dire que je comprend pas le fait de courir. La vie est bien assez longue pour avoir envie de courir. Et pourquoi crier ? A part déranger ceux qui philosophent en silence assis sur un bout de trottoir, ça sert à quoi, hein ?!... Merde… Quelqu’un à l’air d’être en danger.  

 

Je tournais la tête pour regarder dans la quinzième et je voyais effectivement des ombres s’agiter dans un renfoncement destiné aux poubelles pendant que des cris continuaient de déchirer le calme. Une femme devait se faire violer. Cette idée me dérangea et, sans savoir si c’était du courage ou de l’inconscience, je me leva, mon sax contre moi, et avança prudemment vers les ombres, qui étaient trop occupées pour me remarquer.  

Ne me demandez pas comment j’ai eu cette idée, mais j’ai shooté de toute mes forces dans une petite poubelle métallique en hurlant « Police ! ». Les trois ombres prirent la fuite dans la seconde, sans se retourner. Les bruits de leurs pas s’évanouirent dans les rues en peu de temps, laissant place à des sanglotements s’échappant de derrière les poubelles.  

Vérifiant une dernière fois qu’ils avaient bien prit la fuite, je m’avança vers les pieds qui dépassaient des containers pour trouver une gamine.  

Elle avait l’air d’avoir tout juste dix-huit ans.  

Je lui demanda si elle allait bien mais je n’avais comme réponse que des larmes qui coulaient sur ses pâles joues.  

On peut connaître beaucoup des gens en les observant juste quelques secondes. Il ne m’en a pas fallu plus de deux pour me rendre compte que cette fille était en manque.  

Je lui tendis ma main mais elle ne s’en est pas accommodée, préférant rester assise contre son mur, les vêtements déchirés, les mains tremblantes.  

 

Cette nuit là, je déposa ma veste kaki sur ses épaules, et je passa le reste de la lune assis en face d’elle, sans qu’il y ai un échange de mot ou de regard.  

Peut être pour la rassurer…  

Peut être pour l’aider…  

Peut être parce qu’elle était jolie…

Scénario : (4 commentaires)
une série Z dramatique de The Wolf

Scotty Feild

Jewel Sagnier
Sorti le 08 juin 2013 (Semaine 440)
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