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Les Films du Corbeau présente
Une aventure ordinaire

- Je me trompe, où êtes-vous à deux doigts de me traiter de raciste ?  

La femme qui lui faisait face ne répondit pas, mais son regard en disait long. Aveline (Suri Pendragon) s’emporta.  

- Mais enfin c’est incroyable ! Je sais de quoi je parle, puisque je travaille pour une association qui aide les réfugiés ! Ce n’est pas être raciste que de pointer du doigt certaines irrégularités !  

La convive qui lui faisait face la regardait avec mépris. Un silence gêné s’était installé autour de la table du dîner.  

- Et vous allez me faire croire que tous les réfugiés que vous croisez sont des profiteurs et des incapables ?  

- Ce n’est pas ce que j’ai dit ! Mais si vous les connaissiez comme moi je les connais, vous sauriez qu’il y a deux poids, deux mesures, et que notre pays est bien trop conciliant.  

- Je n’aimerais pas être l’un de ceux qui vient chercher de l’aide auprès de vous.  

Aveline se contenait, la colère au bord des lèvres. Elle chercha appui auprès de son époux. Paul (Kiefer Wesley) leva les yeux au ciel, pour lui faire comprendre qu’il valait mieux ne pas insister avec de telles personnes.  

 

*  

 

Dans la voiture qui les ramenait chez eux, Aveline ne décolérait pas.  

- Non mais tu te rends compte ? Me dire ça, à moi ? J’aimerais bien savoir ce qu’elle a fait, elle, pour se permettre de me juger.  

- Si j’avais su que les Bresson étaient amis avec des gauchistes, on aurait pu se ménager le déplacement.  

Paul Delattre était procureur au tribunal de Calais. Lui aussi avait un point de vue acéré sur les mouvements migratoires européens dont la ville était l’un des premiers témoins. Aveline n’avait pas d’emploi, mais s’impliquait bénévolement dans une association de soutien aux réfugiés.  

- Quand je parlerai de ça demain à l’asso, au moins, ça les fera bien rire.  

- Elle n’a pas tout à fait tort sur un point, néanmoins.  

Aveline tourna vers lui un regard surpris et courroucé.  

- Tu n’as aucun besoin de trainer dans cette asso !  

L’éternelle rengaine. Cela énervait Paul que sa femme s’active dans une association gauchisante alors qu’elle n’en avait pas besoin. Aveline soupira.  

- Et que voudrais-tu que je fasse ? Tenir la maison, brasser de l’air comme les femmes de tes collègues ? Merci bien.  

Ils ne dirent plus un mot. La voiture fila dans la nuit et rejoignit leur maison cossue des abords de la ville.  

 

*  

 

Aveline examinait les documents administratifs que lui avait présentés l’homme qui lui faisait face. Assise derrière son bureau, elle recevait à tour de rôle des réfugiés de tous pays venus chercher conseil dans leurs démarches administratives. Cet homme était Géorgien et se nommait Dragomir Dimitrov (Franck Elioth). Il était accompagné de sa seule fille Nadejda (Gaby Vigmarsson). Tous deux avaient passé les trois dernières années sur les routes, cherchant du travail dans les différents pays de l’Union. La France avaient été leur espoir de salut, mais elle n’avait pu répondre à leurs attentes. Ils cherchaient maintenant à rejoindre l’Angleterre, mais végétaient depuis deux semaines à Calais dans l’espoir de pouvoir traverser la Manche.  

- Votre visa est périmé depuis trois mois. Vous êtes en situation irrégulière. Mais vous le savez. Je ne peux pas faire grand-chose pour vous, vous devriez vous rapprocher de l’Ambassade de votre pays.  

- Pas possible, si nous contactons, nous arrêtés.  

Elle se sentait mal à l’aise sous son regard intense. Il attendait beaucoup d’elle. Mais elle n’avait pas les pouvoirs de faire grand-chose pour eux. Et cette journée la fatiguait.  

- Pas du tout, votre ambassade a autre chose à faire que de vous dénoncer. Il faut que vous alliez à Paris pour une nouvelle demande de visa.  

- Pas possible, pas assez d’argent.  

« Pas possible, pas possible »… Aveline était usée et irritée.  

- Eh bien faites du stop ou empruntez un vélo ! Qu’est-ce que vous voulez que je vous dise ? On n’est pas l’Armée du Salut non plus ! C’est facile de tout attendre des autres !  

Dragomir lui répondit par un regard sombre. Il ramassa ses papiers et se leva.  

- Merci mademoiselle.  

Il s’éloigna. Avant de se lever à son tour, sa fille renvoya à la jeune femme tout le mépris qu’elle lui inspirait. Aveline soupira de lassitude. Une autre bénévole, assise à un bureau près du sien, détourna le regard quand elle se tourna vers elle.  

 

*  

 

Aveline et Paul avaient revêtus leurs habits de soirée pour se rendre au théâtre municipal de Calais. On jouait Fidelio ce soir-là. Ils sourirent, serrèrent quelques mains et discutèrent avec les autres notables de la ville. Alors qu’elle venait de s’installer à sa place, dans le parterre central, Aveline aperçut un visage connu. La jeune fille rousse qu’elle avait reçu à son bureau quelques jours plus tôt, Nadejda si sa mémoire était bonne, était vêtue d’une robe noire et simple. Elle accompagnait les spectateurs à leur siège avec prévenance.  

- Eh bien, si même la ville s’y met !  

Paul tourna le visage et l’interrogea du regard. Aveline désigna la jeune femme.  

- L’ouvreuse. C’est une sans-papiers. Je ne sais pas comment elle a fait pour se faire embaucher ici.  

Paul observa la jeune femme rousse, sans dire un mot.  

 

A l’entracte, Aveline cherchait son mari du regard. Elle l’aperçut finalement qui la rejoignait, rangeant son téléphone portable dans la poche de sa veste. Il posa sur elle son regard mutin, celui qu’il avait quand il était fier de lui.  

- Qu’y a-t-il ?  

- Rien, rien.  

- Qu’as-tu fait ?  

- Mon devoir de citoyen, ma chérie.  

Il l’embrassa sur la joue.  

 

*  

 

Aveline était attablée à son bureau, conversant difficilement avec un couple de réfugiés turcs qui manipulait mal le français. Une de ses collègues bénévoles s’approcha d’elle et interrompit discrètement leur discussion.  

- C’est bien toi qui t’es chargée du dossier des Dimitrov, un père et sa fille géorgiens ?  

- Il me semble, oui.  

- As-tu le numéro de téléphone du père ?  

- Je ne sais pas, je regarderai. Pourquoi ?  

- Sa fille a été arrêtée hier soir. Ils l’ont placée au centre de détention. Mais apparemment, le père est parti travailler en Belgique. On ne sait pas comment le joindre.  

 

*  

 

Aveline était crispée au volant de sa voiture. Elle s’était garée sur le parking du centre de détention, mais n’arrivait pas à sortir du véhicule. Ses intestins étaient noués et elle ressentait un léger haut-le-cœur. C’est Paul qui avait dénoncé la jeune Géorgienne. Ca ne pouvait être que lui. Pourquoi avait-il fait ça ? Il avait sans doute pensé faire plaisir à sa femme. Et ça la rendait malade. Elle se dégoûtait. C’était une chose de se plaindre, mais elle n’avait jamais voulu cela. Elle s’investissait depuis deux ans dans une association qui apportait son soutien aux réfugiés, et à cause d’une remarque malheureuse, l’une d’entre eux était maintenant détenue dans ce centre. Elle savait bien qu’une fois qu’on y était enfermé, il y avait bien peu de chances qu’on remette le pied sur le territoire français…  

Elle finit tout de même par sortir et se rendit à l’accueil du centre.  

- Je vous ai appelé il y a une heure. Aveline Delattre de l’association Salam. Je viens voir… Elle fouilla son dossier. Nadejda Dimitrov.  

 

*  

 

- Ne m’attends pas pour dîner. Je rentrerai tard.  

- Où es-tu ?  

- A l’asso. On fête la régularisation d’une famille.  

Elle raccrocha rapidement et prit la bretelle de sortie de l’autoroute. Elle s’enfonça dans la campagne et perdit une demi-heure à trouver le chantier du centre commercial. A cette heure tardive, les ouvriers avaient quitté le terrain, mais elle trouva un contremaître qui lui indiqua l’emplacement des baraquements. Elle pénétra dans un long préfabriqué où les ouvriers étaient attablés devant leur dîner. Lorsque Dragomir l’aperçut, il eut besoin de quelques instants pour reconnaître son visage et comprendre qu’elle venait pour le voir. Il se leva et l’entraîna à l’extérieur du baraquement avec inquiétude. Aveline lui annonça la raison de sa visite.  

- Nadjeda ? Elle très prudente. Pourquoi ils ont arrêté elle ?  

- Il semble qu’elle ait été… dénoncée.  

S’il n’avait pas fait aussi sombre, Aveline aurait craint qu’il lise en elle comme un livre ouvert. Elle avait envie de s’effondrer en larmes tellement la culpabilité lui vrillait l’estomac. Dragomir s’éloigna en jurant dans sa langue. Il prit son visage entre ses mains.  

- Vous pouvez emmener moi ?  

- Bien sûr.  

 

Aveline fit toutes les démarches pour que Dragomir puisse bénéficier d’une aide de l’association et avoir une chambre d’hôtel. Il n’avait pas touché sa paye et avait abandonné le chantier. Les jours suivants, c’est elle qui rendit visite à Nadejda. Dragomir ne pouvait pas approcher le centre de détention, sous peine d’être arrêté à son tour. Chaque soir, elle rejoignait Dragomir dans son hôtel, où il était contraint de se prostrer, et lui donnait des nouvelles de sa fille.  

- Les salariés de l’association ont entamé un recours auprès du tribunal. Votre fille ne risque rien pour la semaine à venir, au moins.  

- Vous pas pouvoir faire ?  

- Non, moi je ne suis que bénévole. Je ne connais pas assez bien les démarches.  

Aveline était troublée par la confiance qu’il lui accordait, et le regard rempli d’espoir qu’il posait sur elle dès qu’il la voyait. Elle se sentait perverse et fourbe. Elle n’avait pas réussi à lui parler de sa part de respnsabilité dans cette histoire, malgré l’envie mordante qui lui prenait parfois de le faire.  

- Je connais quelqu’un au tribunal. J’essaierai de lui parler.  

Ils étaient tous deux assis sur le lit de la minuscule chambre. Il posa la main sur la sienne.  

- Merci. Merci beaucoup.  

Elle baissa le regard.  

- Ne me remerciez pas. Vous ne me devez rien.  

Les yeux du père se remplirent de larmes.  

- Je sais pas quoi faire. Si ma fille retourne au pays, elle n’a rien, et personne. Personne !  

Il enfouit son visage dans ses mains. Aveline posa une main compatissante sur son dos. Subitement, il se tourna vers elle et enfouit son visage sur son épaule. Surprise, Aveline ne le repoussa pas. Il la serra dans ses bras. Ses mains se firent caressantes. Lentement, leurs deux visages s’approchèrent l’un de l’autre et leurs lèvres se rencontrèrent.  

 

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Un film d’Arno GREY  

Sur un scénario original du Corbeau  

 

Avec  

Suri PENDRAGON - Aveline Delattre  

Franck ELLIOT - Dragomir Dimitrov  

Kiefer WESLEY - Paul Delattre  

Gaby VIGMARSSON - Nadejda Dimitrov  

 

Sur une musique de Pavel RYE  

Scénario : (2 commentaires)
une série B dramatique de Arno Grey

Franck Elioth

Suri Pendragon

Kiefer Wesley

Gaby Vigmarsson
Musique par Pavel Rye
Sorti le 28 mai 2033 (Semaine 1482)
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