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Les Films du Corbeau présente
Labah-Labah

Le grouillement n’était sans doute pas aussi assourdissant, mais il lui semblait tonitruant. Peut-être était-ce le tambourinement de ses tempes qui lui fracassait le crâne. Pour ne pas hurler de terreur, Sinead (Earinn Stone) s’obligeait à maintenir ses oreilles au-dessous de la surface de l’eau. Mais elle ne pouvait s’empêcher de fixer leurs mouvements incessants. Elle sentait Mizuki (Helena Yuen) près d’elle, plus qu’elle ne la voyait. Elles étaient toutes deux recroquevillées dans l’eau du ruisseau qui sillonnait la forêt équatoriale, heureusement assez profond pour leur offrir un refuge. Sur les deux rives, elles observaient les milliers d’arachnides qui les encerclaient et qui recouvraient toute trace de végétaux. Une masse noire effrayante et surexcitée qui s’abattait sur tout ce qui respirait.  

Mizuki avait badigeonné leurs deux crânes de vase pour ne pas attirer l’attention des araignées. Mizuki lui saisit le bras pour l’encourager à la suivre sans bruit et se laisser dériver lentement en suivant le courant. Mais Sinead ne pouvait pas bouger : elle fixait les bêtes féroces décortiquant leur proie. De leurs mandibules acérées, elles avaient fini par détacher le tronc du reste du corps. Voir les jambes du cadavre hissées par une multitude de fils blancs et visqueux était presque saugrenu, mais elle ne pouvait détourner le regard de la masse immonde s’acharnant maintenant sur le thorax et les cavités du visage de leur victime. Sinead voulait plonger ses yeux aussi longtemps que possible dans ceux de l’homme, qui semblait toujours la fixer. Puis les araignées s’attaquèrent à cette dernière illusion de vie. Alors seulement elle accepta de suivre Mizuki. La Japonaise ne dit rien, elle comprenait. C’était son père, tout de même…  

 

 

----------------- LABAH-LABAH ---------------------  

 

 

Sinead était excitée. Pas par cette marche interminable dans la forêt équatoriale infestée de moustiques. Pas par ce décor insolite de végétation luxuriante aux sonorités nouvelles. Pas par cette chaleur moite que venait adoucir l’ombre des arbres. Pas non plus par cette randonnée en Indonésie à laquelle l’avait contrainte son père, à la découverte de « trésors inexplorés » (Mon cul, ouais…). Mais parce qu’Argo (Saka Khouïye), leur guide autochtone, ouvrait la marche juste devant elle. Et qu’elle pouvait contempler à loisir ses mollets musclés et ses fesses rebondies sous la toile de son short. Il avait plein de choses à dire, mais elle n’écoutait pas. Rien à foutre de la richesse de la jungle ou de l’histoire du temple qu’ils allaient visiter. Ce n’était pas le genre de discussion qu’elle avait envie de partager avec lui. De toute façon, côté intimité, c’était mort. Même si tous les randonneurs n’avaient pas pris part à cette excursion, il y avait quand même cette Japonaise qui les suivait en dévorant du regard la nature qui les environnait, à tel point qu’elle n’arrêtait pas de lui marcher sur les talons. « Désolée, désolée. » (Ben regarde où tu marches, connasse. ) Et pire encore, ce couple d’Amerloques avec leur bambin obèse qui n’arrêtait pas de geindre. Bref pour le moment, côté plaisir des yeux, elle était servie. Mais l’adolescente espérait plus… Son père était resté au camp avec les autres randonneurs. Elle avait donc le champ libre.  

Ils parvinrent enfin au temple : un amas de pierres branlantes oubliées, dévorées par les lianes et la mousse du temps. Quelques singes s’enfuirent en les voyant arriver. Tous s’extasièrent et Sinead sourit par courtoisie en voyant le visage d’Argo : il était tellement fier de leur montrer le patrimoine local.  

Les Américains partirent faire le tour du bâtiment, le matraquant de leur appareil photo dernier cri. La Japonaise partit bille en tête s’intéresser aux drôles de dessins gravés sur les pierres. Argo proposa alors à Sinead de la suivre dans le temple et la fit pénétrer dans une salle obscure. A l’entendre, on aurait dit la huitième merveille du monde, quand Sinead n’y voyait qu’une salle dégueulasse et qui puait le moisi. Mais elle s’approcha de lui en feignant d’écouter ses contes. Elle ne savait pas trop comment s’y prendre. Aux garçons de son lycée, elle aurait tout naturellement proposé une petite pipe. Ca permettait généralement de briser la glace. Mais cette fois-ci, elle sentit que ce serait un poil prématuré. Elle grelota de froid, insistant un peu, juste pour voir. Mais il ne décrypta pas les signaux. Au contraire, il s’éclipsa soudain pour aller chercher le reste du groupe. Il trouvait dommage qu’ils ne profitent pas tous de ces histoires.  

Sitôt qu’il fut sorti, une voix nasillarde s’éleva, reprise en écho par les murs de pierre humides.  

- Ah ah ! T’es amoureuseuu ! Et ton chéri il s’en fouuuut !  

C’était le gamin américain, dont elle n’avait pas remarqué la présence. Pas plus de 10-11 ans et déjà aussi con que les grands.  

- Dégage, boule de gras.  

Au lieu de quoi il se rapprocha et tourna autour d’elle en chantonnant.  

- Tu veux lui faire des bisouuuus, et lui il trouve que t’es mooooocheuuu !  

- Dégage j’t’ai dit !  

D’énervement, Sinead le repoussa. Le gamin se prit les talons dans une pierre disjointe et bascula par-dessus une colonne de pierre renversée. Il disparu brutalement dans un fracas poussiéreux. Sous son poids, une dalle s’était affaissée et le gamin avait disparu dans un trou béant ! Une fraction de seconde, le silence se fit et Sinead redouta le pire. Mais bien vite, un beuglement retentit. L’adolescente s’approcha du trou et aperçut le bambin affalé sur un éboulis de pierre. Il se tenait le coude, tâché de sang, en pleurant. Plus de peur que de mal.  

- Je vais le dire ! T’es qu’une grosse branleuse de poulets !  

Imagé, le gamin ! Sinead lui tendit le bras.  

- Arrête de beugler et attrape ma main.  

- Je veux pas te toucher ! Je veux ma mère !  

- Fais pas chier p’tit con et…  

Ils furent interrompus par un grondement sourd provenant du conduit que la chute de la dalle avait mis à jour, mais dont ils ne distinguaient pas l’issue. Ils se regardèrent tous les deux, inquiets. Puis un autre son se fit entendre : celui d’un grouillement confus, mais qui se faisait de plus en plus fort et qui avançait dans leur direction. Le gamin se remit à geindre de peur.  

- Attrape ma main !  

Il lui tendit son bras sanguinolent et Sinead tira dessus sans aménité. Mais le garçon était lourd !  

- Utilise tes jambes, imbécile !  

- Mamaaaaaan !  

Brutalement, elle réussit à le hisser du trou et tous deux s’effondrèrent sur le sol. Alors, ils virent avec terreur une nuée d’araignées déboucher de la cavité, des araignées de petite taille, noires, mais aux pattes fines et acérées. L’espace d’une seconde, elles s’arrêtèrent au contact de l’air ambiant. Le temps suffisant pour l’adolescente et le jeune garçon de se mettre à hurler. Sinead se releva précipitamment en tentant de hisser le gamin, mais sa main moite glissa sur la sienne. Les araignées reprirent leur course et sautèrent (oui, sautèrent !) sur le corps du garçon hurlant. Sinead n’eut d’autre choix que de sortir du temple en courant.  

Argo, la Japonaise et le couple d’Américains courraient dans leur direction, alertés par les hurlements du garçon.  

- Des araignées ! Des araignées !  

Argo se pétrifia de terreur. Les parents américains, eux, se précipitèrent vers le temple et disparurent dans l’ombre de l’entrée. On n’entendait plus les cris de l’enfant. La Japonaise s’avança aussi, mais s’arrêta en découvrant une masse sombre s’avancer vers elle. Les araignées s’amassèrent jusqu’à la sortie du temple, mais s’arrêtèrent mystérieusement à l’entrée, « grouillant » sur place. Les hurlements de l’homme et de la femme s’élevèrent.  

Argo reprit possession de ses moyens et laissa Sinead affalée dans l’herbe. Il s’approcha du temple, mais la Japonaise l’arrêta.  

- N’entrez pas ! Vous ne pouvez rien pour eux. C’est trop tard…  

- Mais c’est impossible !  

- Il faut fuir. MAINTENANT !  

Ce qu’ils firent à travers la jungle, trainant une Sinead pleurant et incapable de guider ses propres pas.  

 

 

Au bout d’une demi-heure de course effrénée, ils furent contraints de s’arrêter pour reprendre leur souffle. Sinead tremblait, elle était toujours sous le choc. Argo se prit la tête dans les mains.  

- Mon Dieu, mon Dieu… Ce n’est pas possible.  

La Japonaise paraissait la plus maître de ses émotions.  

- Il faut rejoindre le camp. Il faut avertir les autorités.  

- Mais ce n’était rien qu’une légende !  

- Que voulez-vous dire ?  

- « Labah-Labah »… C’est le nom du temple. On l’appelle « le Temple de l’Araignée ». Mais on pensait tous que ce n’était qu’un nom !  

Mizuki Teshigahara, car tel était son nom, lui dit alors ce qu’elle-même savait. Elle était zoologue. D’où son choix de la forêt indonésienne pour ses vacances : la découverte de la faune locale. Et les araignées, elle connaissait.  

- Mais pas cette race. Elle ressemble beaucoup à l’arachnia sentropia, mais plus petite, et ses pattes beaucoup plus développées. Croyez-moi, les spécimens que j’ai vus aujourd’hui n’existent pas !  

- C’est une race venimeuse ?  

- Pas vraiment. Mais parmi les plus voraces, et les plus agiles. Il faut absolument que nous rejoignions le camp. Car quand la nuit tombera, elles feront des ravages.  

- Que voulez-vous dire ?  

- Je pense que ce sont bien des arachnia sentropia. Mais qui ont dû se développer un temps considérable dans l’obscurité. D’où les différences. Elles se sont arrêtées à la limite de l’ombre du temple. Quand la lumière du soleil ne sera plus un obstacle, nous ferions mieux de ne plus être dans les parages…  

 

 

Quand Sinead aperçut son père, assis au milieu du camp un bouquin entre les mains au milieu des autres randonneurs, elle se précipita dans ses bras. Ils furent tous surpris par l’état et le visage des rescapés de l’excursion. Et rapidement alertés du danger. L’ambiance bucolique du camp de randonneurs tourna vite à l’alarme. Curtis (Kiefer Wesley), le père de Sinead, tempéra les ardeurs.  

- C’est si loin, nous sommes quand même en sécurité ici ?  

- J’imagine. Mais elles peuvent parcourir une distance impressionnante avec une agilité effrayante, lui répondit la zoologue.  

- Combien sont-elles ?  

- Aucune idée. Je n’en ai aperçu qu’un millier, je dirais.  

- Un millier !...  

Le réseau téléphonique n’atteignait pas cette clairière reculée. Aussi il fut décidé de prendre la route le lendemain, car la nuit tombait. Sous couvert de sécurité, il fut décidé de laisser un maximum de lumières allumées sur le camp. Flambées, lampes. Mais Argo savait qu’il prenait cette décision pour se rassurer plus qu’autre chose. Cette jungle qu’il aimait tant avait changé de visage. Et il se surprit à redouter l’obscurité.  

 

 

Curtis tentait de calmer sa fille. Sous leur tente, celle-ci ne trouvait pas le sommeil. Elle ne cessait de trembler et de pleurer.  

- Papa… Oh, papa !  

- N’y pense plus. Repose-toi.  

- C’est ma faute, papa. Ce gamin s’est fait bouffé par ma faute. Et ses parents aussi.  

- Tu ne pouvais pas savoir.  

Il fallu encore plus d’une heure pour qu’elle trouve le sommeil. Mais il ne fut pas de longue durée. Le grouillement de cette multitude de pattes la hantait. Aussi, quand ce bruit lui revint distinctement dans les oreilles, elle ne comprit pas tout de suite si elle dormait encore ou si elle s’était bien redressée en sursaut. Et ce grouillement l’envahissait. Il était là, autour de sa tente. Ce ne fut que lorsque les chevaux hennirent de terreur qu’elle comprit qu’elle était bien réveillée. Elle hurla à son tour.  

Les randonneurs s’éveillèrent en sursaut et se regroupèrent au centre du camp. Le grouillement était partout autour d’eux, dans les arbres sombres, dans les herbes hautes, se tenant loin des sources de lumière. Les chevaux, attelés un peu plus loin dans l’ombre, ne hennissaient plus. Tous étaient envahis par la terreur. Même Mizuki, qui était restée calme jusqu’à présent.  

- Mon Dieu, elles doivent être plus nombreuses et affamées que ce que j’aurais pu imaginer…  

Curtis s’avança.  

- Il faut partir, maintenant. Elles ne peuvent quand même pas être plus rapides que nos voitures !  

Argo était d’une pâleur effrayante.  

- Certains d’entre nous sont venus en voiture, d’autres à pied, d’autres à cheval… Nous sommes trop nombreux pour fuir en voiture. Sans compter que de nuit, par la route, nous ne pouvons progresser que lentement.  

Il se tourna vers Mizuki.  

- Que peut-on faire ?  

- Elles risquent de s’habituer à la lumière. Nous n’avons pas beaucoup de choix.  

Il fut décidé que les femmes et enfants partiraient immédiatement en voiture. Les hommes, et Mizuki qui avait insisté pour rester avec eux, marcheraient jusqu’à la rivière avec autant de lumière qu’ils pouvaient porter.  

Sinead ne voulait pas quitter son père, mais elle se laissa convaincre par la frayeur, plus forte encore. Les deux jeeps, surchargées de randonneurs, empruntèrent le chemin herbeux et rocailleux. Le bruit du moteur avait au moins l’avantage de couvrir le bruit des bestioles. Sinead se trouvait dans le véhicule de queue et ne pouvait s’empêcher de se retourner constamment, aussi bien pour surveiller la végétation obscure que pour imaginer son père avec angoisse. Elle ne savait pas si elle le reverrait.  

Au bout de plusieurs centaines de mètres, le véhicule de tête eut des soubresauts dans le moteur.  

- Une panne ?  

- On ne peut pas s’arrêter !  

- Dépassez-les !  

Ils frôlèrent le véhicule maintenant à l’arrêt et prirent la tête du convoi. En passant près d’eux, Sinead plaqua son visage contre la vitre. Dans la lumière des phares déclinant, elle aperçut leurs occupants gesticulant, attaqués de toutes parts par les araignées qui s’étaient infiltrées par toutes les cavités du véhicule. Les araignées apprenaient vite…  

 

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Un film de Jenny ILLSLEY  

Sur un scénario original du Corbeau  

Avec  

Earinn STONE - Sinead  

Saka KHOUIYE - Argo  

Helena YUEN - Mizuki  

Kiefer WESLEY - Curtis  

 

Sur une musique d’Alyssa EICHINGER  

 

Ce film concoure au 3ème Festival du Film d’Horreur de GérardMerveille  

Scénario : (3 commentaires)
une série B d'horreur de Jenny Illsley

Saka Khouïye

Earinn Stone

Kiefer Wesley

Helena Yuen
Musique par Alyssa Eichinger
Sorti le 29 octobre 2033 (Semaine 1504)
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