Dans le quartier du Golden Gate Park (San Francisco), Trevor Dunn, 43 ans, maître de conférence au Musée Mémorial De Young situé 75 Tea Garden Drive, était spécialiste dans l'Histoire de l'Art Américain. Comme à son habitude, il effectuait chaque matin les visites guidées.  

D'un geste ample, il accueilla donc ses premiers visiteurs et offrit son plus large sourire. D'un pas sûr, il se dirigea vers le vestibule donnant vers le 1er couloir du secteur de l'expo du moment : Ralph Eugene Meatyard : Dolls and Masks.  

D'un professionnalisme absolu, Trevor était un passionné dans tout ce qui l'intéressait : son métier et la mort dans tous ses aspects ... Les visiteurs étaient au nombre de 25 et d'une voix de ténor et d'une assurance inébranlable il s'exclama :  

-« Je demande votre attention s'il vous plaît ! Je me nomme Trévor Dunn et je serai votre guide pour cette visite d'une durée de 2h30. Si vous avez des questions, merci de bien vouloir lever le bras... bien nous pouvons donc commencer, Ralph Eugene Meatyard était un américain qui vécut de 1925 à 1972 et s’il n'est pas un des noms familiers dans l'histoire de la photographie américaine, l'impact de son travail dans ce milieu est pourtant significatif »e ... et ce serait comme cela jusqu'à la fin de la matinée, mais sa raison de vivre était sa fascination morbide pour la torture ... lui-même était une personne torturée mentalement.  

Cela remontait à son enfance et les actes qu’il commettait étaient pourtant réfléchis et sans l’ombre d’un seul scrupule.  

Fin de journée et à son domicile, Trevor prit la fiche signalétique concernant celui qu’il avait choisi : Matthew Connoway, 53 ans. Il vivait au 500, Santiago Street (San Francisco). Le bureau de Trevor, impeccablement rangé, n’était éclairé que par une lampe et Trevor, assis à son bureau, méditant sur sa prochaine victime, déboutonna sa chemise. Torse nu, le dos de Trevor se révélait être musculeux et monstrueusement marqué dans ses chairs par des trous éparpillés le long de sa colonne vertébrale. Il se pencha et prit sa tête entre ses mains pour étudier la façon dont il s’approcherait de sa victime.  

Il prit un stylo et se mit à écrire fiévreusement.  

Le côté sombre … oui c’est cela, Trevor Dunn avait manifestement basculé du côté sombre de lui-même et cela arrivait lorsqu’il repérait un visiteur du musée répondant aux critères qu’il avait établis. Le courrier qu’il rédigeait le rendait obnubilé par ce qui allait se passer par la suite si tout se passait comme il l’avait prévu.  

Plus Trevor écrivait, en pleine réflexion et concentré sur sa feuille, plus il se crispait. Les poings fermés, les sourcils froncés, un rictus se dessina lorsqu’il fut sur le point de terminer son courrier.  

Il réussit à finir son courrier à toute vitesse. Manifestement Trevor semblait sur le point d’exploser …. point final. Il s’adossa à son siège, et le sourire aux lèvres il se leva enfin avec son courrier et alla le mettre sous enveloppe. Son pantalon était couvert d’une tâche brune sur le devant, il avait joui. La folie le gagnait une fois sa victime choisie mais pour la plupart d’entre elles, c’était la victime elle-même qui se mettait en danger de par son comportement vis-à-vis de Trevor lors de la visite.  

Il fit un aller-retour pour poster ce fameux courrier représentant la première étape de ce qui allait être un calvaire pour Matthew Connoway. Le courrier arriverait le lendemain et Trevor prépara son plan.  

Le courrier arriva comme prévu à destination et ce matin-là, Monsieur Connoway sortit de chez lui au moment où le postier allait insérer le courrier dans la boîte à lettres.  

-« Hé négro de postier ! Amène-toi et donne-moi ce courrier » fit Matthew Connoway  

Visiblement habitué de ce genre d’insanités le postier, le déposa simplement sur la boîte à lettres et partit sans demander son reste.  

-« C’est ça, va, casses-toi »  

Non loin de là, Trevor avait observé la scène de son véhicule garé sur le long du trottoir. Il sourit puis prit sur ses genoux un ouvrage antique déposé sur le siège du passager, ce livre avait visiblement était utilisé depuis des lustres étant donné l’état de la couverture ainsi que la reliure des pages elles-mêmes jaunies par le temps.  

-« Au nom des Dunn et de ceux qui ont soufferts par delà la mort, Matthew Connoway tu subiras la colère du Tormentor »  

A ce moment précis, il leva son visage, ferma les yeux et ouvrit le livre sur une page qui serait la destinée mortelle de Matthew Connoway.  

A la vue de la sentence, il scruta Matthew Connoway lisant son courrier … « Bien, très bien … une sentence à la hauteur de votre haine envers les bâtisseurs » . Trevor partit en trombe et se prépara.  

Le courrier entre les mains de Matthew indiquait ceci :  

« Cher Monsieur Connoway,  

Le Musée Mémorial De Young a, de par l’intérêt que vous avez manifesté lors de votre visite, tenu à vous remercier pour la matinée passée en notre compagnie.  

L’excellence de la réputation du musée est entièrement due à l’excellence de la qualité de ses visiteurs et vous, Monsieur Connoway, avait indéniablement retenu notre attention pour vous faire bénéficier de ce qui suit :  

Nous avons l’honneur de vous convier à la soirée thématique organisée au Musée Mémorial De Young sur le thème du Verre demain soir samedi 24 septembre 2040 à 20h30.  

Cette invitation est nominative et ne peut en aucun cas être valable pour toute autre personne. Nous serions heureux de vous accueillir comme il se doit.  

Dans l’attente, nous vous prions, Monsieur Connoway, de recevoir nos respects les plus sincères.  

La Direction »  

Littéralement flatté par ce courrier, Matthew serait au rendez-vous.  

Matthew Connoway se fit fringuant ce soir-là et c’est d’une humeur joyeuse qu’il se rendit au Musée. Le passionné qu’il était allait en prendre plein les mirettes et avec un peu de chance, il pourrait profiter pleinement de la visite avec un guide un peu plus réceptif à ses questions et qui arrêterait de le fixer. Matthew s’était senti mal à l’aise l’autre jour même s’il avait eu une excellente visite. Il ne supportait pas ce genre de type, ce guide … sa couleur de peau.  

Arrivé sur les lieux, il fut surpris de ne pas voir une once de personnes à 10 minutes de l’ouverture. Il se gara puis ouvrit la portière de sa voiture pour jeter un œil à l’entrée du musée.  

Ses pas résonnèrent dans le parking, illuminé par les réverbères en ligne rangés comme des troupes de soldats au garde à vous. Il regarda autour de lui tout en s’approchant, la place était déserte et il ne s’était pas trompé de date …  

Pas d’erreur Monsieur Connoway, votre heure est venue … » -«  

Trevor Dunn, The Tormentor mit le coton de chloroforme devant la bouche de Matthew qui s’endormit aussitôt, tomba à terre …  

Et ce n’est que bien plus tard que Matthew, encore léthargique, vaseux, l’esprit flou il ouvrit les yeux. Il était allongé sur le ventre et une douleur atroce le faisait souffrir terriblement de la tête au pied. Il sentit tel un coup de poing en pleine face l’air ambiant glacial de la pièce où il se trouvait et la position de laquelle il se trouvait.  

Matthew Connoway, 53 ans, était allongé nu face contre terre et du verre pilé se trouvait sous son corps déjà bien marqué par les morceaux plantés et incrustés sous sa peau.  

The Tormentor observait Matthew de son fauteuil situé dans l’ombre de son hangar désaffecté aménagé depuis des lustres : il avait tellement servi ce hangar. Il y régnait une odeur fétide de putréfaction bien que celui-ci fut foncièrement propre.  

Odeur tenace que celui des corps humains morts et laissés inertes trop longtemps.  

Prenant conscience de l’horreur absolue de sa situation, Matthewl ouvrit la bouche machinalement pour hurler mais dut s’arrêter net, sa gorge était totalement irritée.  

Une voie gronda dans la pénombre : -« Je ne te conseille pas de dire quoi que ce soit, et encore moins de bouger »  

Matthew tenta de tourner la tête vers ce qui avait parlé « Qui … Qui êtes ?.... » Sa gorge totalement prise, une violente toux remonta de ses entrailles, du sang chaud sortit de sa bouche tremblante.  

-« Je t’avais dit de ne pas bouger ou parler » fit le Tormentor puis ajouta : -« Je suis celui qui purifie le monde des hommes infâmes tel que toi, égoïste et méprisant que tu es, haineux des hommes différents. Les bâtisseurs ont régis l’ouvrage purificateur et j’en suis le mercenaire, moi le Tormentor »  

Lentement, de l’obscurité une silhouette se découvrit et de toute sa stature The Tormentor s’avança vers Matthew Connoway et s’agenouilla à côté de lui, toujours allongé, et lui susurra à l’oreille :  

« Matthew, il est temps d’absoudre vos erreurs et d’être jugé devant les bâtisseurs mais avant cela regardez-vous un peu et voyez »  

The Tormentor se releva et agrippa la chaîne reliée à une poulie et tira … de l’autre côté la chaîne se divisait en quatre. Quatre autres chaînes attachées à des anneaux solides implantés dans le dos, dans la chair de Matthew qui lui, ne les avait jusque là pas encore sentis.  

La traction fut insoutenable pour Matthew, surpris par l’horreur qui lui avait été infligée dans le dos. Il hurla à s’en user la trachée malgré l’irritation … son cri de prime abord partit en gargouillis puis sous la violence de la douleur se mua en cris suraigus. Une mare de sang s’échappa à grands flots de sa bouche noyant le cri en lui. Matthew commençait à avoir des spasmes.  

Et le Tormentor tirait doucement mais sûrement, chaque traction de chaîne entrainait le tiraillement des anneaux sur la peau de Matthew, cela tirait énormément sous le poids du corps mais pour combien de temps ?  

-« Ah oui Matthew, l’intérêt de ne pas bouger réside dans le fait que je vous ai fait ingérer lorsque vous étiez inconscient, du verre pilé, le moindre mouvement risque donc de déchirer vos entrailles »  

Le cric de la poulie fit entendre le CLIC ! indiquant la fin de la montée de la chaîne.  

Le corps de Matthew évoluant dans le vide était à 4,50 mètres du sol, et à présent le sang, la bave, l’urine coulaient du corps toujours en vie. Tormentor fit tourner le corps et le déplaça à l’horizontal doucement pour l’arrêter un peu plus loin.  

Toujours pendu dans le vide par sa propre peau reliée à des anneaux via une poulie, Matthew à demi-inconscient vit enfin son corps du dessous dans un miroir placé sous lui reflétant son image. Les liquides corporels coulaient en flux continu sur le miroir mais à présent Matthew se regardait pour la 1ère fois en face.  

-« Voyez Matthew ce que vous êtes et pardonnez vous » fit le Tormentor.  

Il observa sans broncher le corps inerte suspendu, tout en lui bouillait. Il savait que son rituel était dangereux et qu’il risquait de se faire repérer mais c’était plus fort que lui, il avait été choisi, lui, Trevor Dunn, pour être le Persécuteur, The Tormentor, pour venger ce qu’avait subit les bâtisseurs. L’ouvrage laissé à Trevor avait été écrit par eux, et il en avait hérité.  

Qui étaient les bâtisseurs ? Qu’elle était l’histoire de Trevor Dunn pour en arrivé à de telles extrémités ?  

Le silence dans le hangar était interminable, enfin Le Tormentor vit les yeux dans les orbites de Matthew le chercher, Matthew le trouva et le fixa intensément. Il ferma les yeux et fit son signe de croix.  

CLIC !