26 cadavres retrouvés en 26 jours. Ça touche bien du monde. Les familles affolées, les flics emmerdés, les opérateurs de pompes funèbres en joie, les rédacteurs en chef sur le coup pour interviewer les parents et prendre le cliché le plus écoeurant d’une mère en larme s’écorchant les genoux sur le parquet de l’église. Oui, Adrian a bien réussi son coup. Il a occupé bien du monde. Il faut bien que quelqu’un le fasse, pour éviter que la terre entière ne sombre dans ce qu’on appelle l’ennui.

Adrian est le prêtre du divertissement dramatique. Partout où il va, lorsqu’il sent que la population est dans un creux de vague, il met son talent à l’œuvre pour remédier à la situation. Et quel talent il a! Jamais ville ou village n’a été si vivant qu’après son passage. Et pourtant, il y sème la mort mieux qu’un agriculteur ne sème son blé. Il opte pour la manière classique. Qu’importe pour lui les critiques. Les meurtres en série ont le charme d’effrayer, surtout quand les victimes sont choisies selon un ordre particulier, assez simple pour que tous sachent qui sera la prochaine victime, à quelques détails près. Son dernier chef d’œuvre : 26 meurtres en fonction de l’ordre alphabétique des noms de familles. Un des meilleurs moyens de faire peur à des masses de monde.

Adrian avait particulièrement aimé la lettre H, une petite salope du nom de Handenhove, Eva. Il l’avait trouvé dans un bar du style branché où jouait de la musique techno hip-hop atroce. Un peu de GHB dans le verre de la petite avait suffit pour qu’elle se jette au cou de l’homme telle une chatte en chaleur. La nuit avait été bonne. Après une petite conversion au black métal, la pouffiasse avait donné tout ce qu’elle avait, et elle en avait dedans. Tout s’était terminé à 5h34 du matin. Les cris de jouissance ultime transformés en hurlement de douleur, la virilité masculine transformée en lame acérée. Vite fait, joliment fait, excepté le sang qui coulait partout. On aurait dit qu’elle avait ses règles, la petite.

Après avoir assassiné Zaïkovitz, Adrian était resté quelque temps en ville. Il était même retourné dans ce bar hip-hop, pour les joies du souvenir. Assez tôt, il avait rencontré une fille, assez belle, les cheveux d’un noir de jais. C’est en discutant gentiment avec elle qu’il avait appris que la police détenait des preuves sur les récents meurtres en série. Des preuves suffisamment accablantes pour identifier le meurtrier. La fille lui proposait son aide, tout bonnement. Elle s’appelait Handenhove, Morena…