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MMP présente
Lady JaJa fait ses Courses

Lady JaJa (Alexandra Dolby) est une J-pop star dont la durée de vie dans les charts dépendra de sa fraîcheur. Comme énormément de pseudo-vedettes du Pays du Soleil Levant, ses influences sont celles de l'Occident mondialisé, avec une petite dose de culture locale et de nationalisme bon teint : Lady JaJa doit le succès à ses nombreux changements de toilettes durant ses concerts et à ses tenues généralement extravagantes aussi bien en public qu'en privé. Elle produit (fait produire) une musique insipide mais ce n'est pas ce que l'on retient de la star. Ce que l'on réclame, c'est qu'elle soit expansive, toujours plus foldingue, rigolote - toujours plus too much, "car il attend ça le public, bébé" comme le lui répète son manager/coach et compositeur Russel Tong (Weston Erotas).  

 

Après avoir traité son public comme de la fiente de canari lors d'une intervention télévisée dominicale sur une chaîne de province, elle est revenue à Kyoto - où elle dispose d'une "base arrière" assiégée par ses fans mais relativement plus tranquille qu'à Tokyo.  

 

JaJa peut enfin y redevenir Hitomi Matsukate et laisser les quatre murs de son appartement demeurer seuls témoins de sa supercherie. Car "Lady JaJa" - nom de scène plagié - n'est pas Japonaise, même pas un peu asiatique. C'est une américano-allemande dénommée Agneszka Luthmeyer que Russel a rencontrée à Hong-Kong dans un karaoke bar alors qu'elle y terminait un MBA. Il n'avait pas fallu longtemps à ces deux petits malins pour créer la supercherie : étude de marché et mince filet de voix rauque - mais sexy - pour Agnes, bons contacts au sein de radios périphériques et dans le milieu de la mode pour Russel - ce dernier avait été dealer de poudre "dans une vie antérieure" ; il s'était rangé des voitures, histoire d'assainir un peu son karma. Ca avait démarré il y a à peine 8 mois et la machine s'était emballée : ils avaient commencé à récolter les fruits de leur arnaque dès les 100 000 premiers singles vendus.  

C'était un phénomène local, ils le savaient, "JaJa" disparaîtrait des radars comme 99% des minettes de la J-pop. On penserait alors qu'elle s'était trouvé un mari, qu'elle ferait des gosses. Ca n'était pas prévu comme ça : Agnes avait donné à leur "couple" deux années de vie publique, et puis chacun repartirait de son côté : lui dans ses petites magouilles d'escroc "bling-bling", elle en Europe ou aux USA afin de bosser dans la finance. Ils ne se reverraient jamais.  

 

En attendant, ils étaient parfaitement assortis. Sauf quand Russel oubliait d'envoyer le personnel de maison re-remplir le réfrigérateur le week-end. Comme aujourd'hui par exemple : quelle galère ! - 17h00 à Kyoto avec le frigo vide. La bonne ne passerait pas avant demain matin et lui-même ne devait la rejoindre que mercredi prochain.  

 

Elle ne pouvait décemment en rester là. Elle se re-transforma en JaJa avant de sortir, une habitude désormais prise : alors qu'elle aurait très bien pu aller faire ses quelques courses incognito, il lui fallait faire détourner les regards, qu'on l'acclame un minimum, redevenir son alter-ego afin de sentir sur elle l'envie et la renommée. C'était comme une drogue dont elle ne pouvait plus se passer.  

 

A aucun moment, elle ne pensait à la déception (?) de ses "fans" si jamais ces derniers découvraient. Non, les fans étaient des parasites attirés par la lumière. Et elle était La Lumière. Mais ils étaient aussi des acheteurs, bien intégrés dans le système. Et pour ça, elle ne pouvait pas tout se permettre avec eux : Russel avait fixé les limites. Quoique Philippin, il connaissait bien le consommateur japonais pour avoir vécu ici avec ses parents, souffrant du racisme ordinaire quotidien de ce peuple si poli. Pour lui aussi, le succès de JaJa avait le doux parfum d'une revanche secrète sur la vie.  

 

Pour son petit shopping, elle choisit une tenue sobre et chic bleue relevée d'un muppet de Teletubbie, un maquillage discrètement outrancier qu'elle agrémenta d'un simili-"masque de Sub-Zero" (comme Russel l'avait appelé) et d'une perruque du meilleur effet. Elle était parfaite - la Diva pouvait se montrer au monde, le commun des mortels en serait à nouveau tout bouleversé.  

 

Agneszka Luthmeyer / Hitomi Matsukate / Lady JaJa venait donc de sortir de l'immeuble sécurisé dans lequel se trouvait son loft. Les deux gardes du corps discrets positionnés à l'entrée lui firent un signe de tête : la voie était libre. Même les fans souffraient de la canicule. En passant devant le marchand de journaux, elle décompta le nombre de gazettes desquelles elle faisait la "une" : aucune aujourd'hui. Qu'importe, on devait parler d'elle à l'intérieur. Russel s'inquiétait toujours d'un éventuel "déficit d'image" de sa pouliche mais Agneszka - qui ne stressait pas vraiment à ce sujet, savait que le temps serait proche où une fille encore plus folle qu'elle reprendrait le concept et l'agrémenterait d'une once de nouveauté - un truc de cul ou lolipop. Lady JaJa, elle, avait la classe : elle ne couchait pas avec son producteur - pas question de se laisser aller à trop montrer la marchandise au risque de dévoiler le pot aux roses.  

 

On lui déroula le tapis rouge à l'épicerie, une sorte de supérette anonyme dont les patrons faisaient de l'obséquiosité vis-à-vis de leur clientèle une forme de sport quotidien. Agneszka / Hitomi, surprise à ses débuts, avait fini par s'habituer à ces coutumes locales - ça faisait son affaire.  

C'est en prenant du salami et des lardons qu'elle s'aperçut qu'elle n'avait pas un sou en poche. Elle avait pensé à son enrobage, apprêtée comme un bonbon... mais pas à une chose aussi terre-à-terre que de l'argent.  

Qu'importe ! Ils lui feraient crédit : n'était-t'elle pas Lady JaJa ?  

 

Plongée dans ses pensées, elle n'avait pas entendu le vacarme dans le hall d'entrée.  

C'est quand elle vit débouler le mauvais garçon (Robert Troughton) dans le couloir des surgelés qu'elle eut des doutes sur la réalité de ce qu'elle était en train de vivre. Le bonhomme fondit sur elle, la prit à bras-le-corps. Elle appliqua instinctivement ses mécanismes de défense - ils furent bientôt tous les deux à terre. Là, il lui pressa un pistolet sur la joue. Le message était clair. Tout sembla s'immobiliser, à commencer par elle.  

Un fan énervé ? fut sa première pensée.  

Elle sursauta au moment où elle entendit un claquement sourd à l'entrée. Une détonation. Du bris de verre, des cris.  

Un hold-up ! : il y aurait du sang, de la romance, des tirs à balles réelles. Comme dans les films de Johnnie To ou John Woo. De la bonne pub gratuite - c'était juste un mauvais moment à passer : ils allaient prendre la caisse, s'enfuir sans faire de victime, elle témoignerait devant un beau grand flic et on finirait même par dire que c'était un coup monté par son manager. Ils démentiraient, bien sûr.  

 

Alors qu'elle avait la tête sur le carrelage et dans les nuages de ses pensées, quelqu'un éteignit les néons. Les gyrophares des véhicules de la police locale postés à l'extérieur dansaient dans la boutique qui semblait s'être brutalement rétrécie sous l'effet de l'obscurité.  

 

On la déplaça au fond du magasin, avec quelques autres clients. En passant, elle aperçut la main ensanglantée d'un des tenanciers, par terre (assommé ? mort ? en train de mourir ?). Une femme (Joan Keith) plus jeune que lui qui ne ressemblait guère non plus à une Japonaise la fit asseoir. C'est elle qui avait tiré. Deux fois. Au fusil à pompes. Ils savaient ce qu'ils faisaient.  

Ils n'étaient pas des fans. Ce n'était même pas un hold-up.  

 

C'était une prise d'otage. Et Elle était au milieu. Et Elle était leur planche de salut, nimbée par la valeur de Sa célébrité.  

 

Il y aurait du sang, de la romance - peut-être même du sexe -, des tirs à balles réelles.  

Comme dans la réalité.  

 

(Script original)

Scénario : (2 commentaires)
une série B dramatique (Comédie) de Bianca Staite

Weston Erotas

Alexandra Dolby

Robert Troughton

Joan Keith
Musique par Heather Lathan
Sorti le 16 juin 2018 (Semaine 702)
Entrées : 13 834 287
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