Une jeune femme en train de se noyer qui lui tend un bras désespéré.  

Une porte qui se referme sur une pièce sombre et désolée.  

Un violent échange de coups de feu. Des corps qui tombent sur l'asphalte.  

Martin Smith (Raoul Frizzell) ouvre les yeux. Autour de lui, un goutte à goutte et un cardiographe.  

Bip bip bip.  

Il est allongé dans le lit d'une chambre d'hopital.  

Hole City - 5 mai - 07h00  

Plus tard dans la mâtinée, le Docteur Glover (Johnny Kubota) s'est présenté à lui, accompagné par l'infirmière chargée des chambres de l'aile, Janice Fleming (Lisa Clausen). Smith a toujours la tête dans le pâté. Normal : un arrêt cardiaque, un coma de 2 jours et une assistance respiratoire pendant trois semaines - voilà d'où il revient. De loin. Il a eu de la chance : un poumon de touché, un bras démis, une balle qui joue au flipper et explose 3 côtes. De la chance, oui.  

Glover énonce ses blessures de guerre tandis que Janice utilise le système électrique du lit pour le relever. Elle lui sourit, lui murmure qu'il pourra remarcher dans une quinzaine - mais que d'ici là, il risque de trouver le temps long. Elle lui désigne la télévision en face de lui.  

C'est en observant la pièce de sa nouvelle hauteur qu'il remarque les fleurs.  

"- Vos collègues du bureau sont passés vous voir - vous étiez encore endormi. Ils n'ont pas pu rester longtemps..."  

"Collègues". Smith sourit. Il se demande s'il lui reste une place dans la Police en général. Vu les derniers événements, on file vers la révocation directe - et peut-être même de la taule. Il se demande où on va l'envoyer cette fois...  

Instinctivement de son bras valide, il cherche un paquet de cigarettes dans sa chemise. Bien sûr, sa chemise n'a pas de poche. Ni son pantalon. Il grimace.  

Glover précise que sa rééducation fonctionnelle va prendre du temps, que si le pronostic vital n'est plus engagé, les blessures n'en sont pas moins invalidantes.  

"- Mais tout se répare Mr Smith. Bienvenue à Cavendish."  

Ses visiteurs partis, il se remémore les derniers événements : sa résolution froide, le passage chez l'armurier portoricain, les assassins de Rebecca Murphy - liés - beaucoup trop liés - à ses anciens supérieurs, cette journaliste aux dents longues - comment s'appelle-t'elle déjà ? - oui, Sanders - qui se radine avec son ancienne partenaire Winona Richards et la cavalerie. Le regard noir du commissaire Lawrence (Bradley Howarth) qui l'accompagne alors qu'il est encore conscient dans l'ambulance qui le conduit aux urgences. Pourquoi n'est-il pas mort ?  

Un grand vide. La vengeance lui a laissé un creux dans l'estomac.  

Ou alors il a faim.  

Il regarde par la vitre les jardins de la clinique. De beaux jardins à perte de vue. Une institution privée probablement, les hôpitaux publics ne sont pas aussi bien lotis. Qui paye ça pour ça ? Il n'a pas une assurance suffisante pour couvrir ce type de frais. Logiquement, on aurait du lui fournir des béquilles et l'envoyer promener dès son réveil. Il devrait être à la rue, en manque de morphine. Il est donc arrivé ici par l'entremise d'un bienfaiteur.  

Lawrence ou la Police ? Douteux, même si sa disparition ferait tâche maintenant que les médias se sont emparés de son cas. Sanders ? Cette fille est un requin. Richards ? Bien assez de problèmes de son côté pour s'occuper de lui. Le crime organisé ? Possible : ces enfoirés seraient bien capables de le remettre debout pour le buter d'une balle dans la tête à la sortie.  

Voilà son instinct de flic qui reprend le dessus. Son estomac grommelle à nouveau : plus de tabac, plus l'alcool - tous deux remplacés par la morphine et les antidouleurs. Super.  

Il voudrait téléphoner, entendre une voix connue - même sa mère ferait l'affaire. Pas de combiné. Il ne sait pas où est son portable...  

Le moniteur du téléviseur semble le regarder fixement. Il avise la télécommande et la récupère au prix d'un effort douloureux. Mais ne l'allume pas. Il gamberge trop pour ça - la drogue dans les veines semble à la fois l'apaiser, presque l'endormir mais aussi éclaircir ses pensées dans ce stade de semi-sommeil. Sensations paradoxales.  

Il scrute son nouveau lieu de vie. Se tournant vers la porte, il remarque qu'on l'a entrebâillée. Une jeune ado (Shany Larock) le dévisage, l'air complètement hagard. Une camée comme lui, mais qui peut marcher. Elle lui sourit.  

Ambiance "zombieland" à tous les étages entre quatre murs blancs (avec des pointes pastels quand même). Il lui fait un petit signe, l'invite à rentrer.  

"- Salut..." Sa propre voix résonne désagréablement dans son crâne. Il se rend compte que parler le fatigue.  

La gamine s'avance, toute pâle. Regarde autour d'elle. Fixe les fleurs. Il engage la conversation, sans grand espoir :  

"- Des amis... Tu viens d'où ? Moi de Shadow City.  

- Shadow. City."  

De mieux en mieux.  

Elle reste là plantée au milieu de la chambre, baisse les yeux, regarde ses chaussons. Frêle, voire cadavérique, dans une blouse de malade trop ample. Il ne voudrait pas la croiser armée d'un couteau en pleine nuit dans les couloirs.  

Elle relève la tête et avec aplomb :  

"- Shadow. City. N'existe. Pas."  

(Script original, suite de Lost Shadows 3x05 - L'heure de la vengeance : http://www.cinejeu.net/index.php?page=p&id=54&unite=fenetre&section=vueFilm&idFilm=12557)  

Lost Shadows est une création Morcar Prods.