30 mai 1431, place du Vieux-Marché - Rouen  

Le bourreau Geoffroy regarde les dernières cendres du bûcher se consumer. Autour de lui bruisse la rumeur de plus en plus forte. Lui-même s'interroge : les Anglais ne viennent-ils pas de causer leur perte au coeur de la cité ? Choqué par l'événement, le peuple de France ne va-t'il pas reprendre du poil de la bête et finir le travail de cette Jehanne ?  

Jehanne d'Arc, lâchée par la royauté, trahie par la justice et léguée aux Anglois, femme de guerre anoblie par Charles VII, illuminée portant des habits d'hommes - brûlée vive ici où se termine l'histoire et commence la légende.  

Au milieu de la foule, une silhouette féminine encapuchonnée regarde avec tristesse le spectacle et prie pour celle dont le corps voilé a été incinéré. Jehanne, qui a vu mourir à sa place une jeune femme dévouée à sa cause. Tout aussi illuminée par la Grâce, qui avait reçu des anges l'ordre. Ils ont trompé l'ennemi. Désormais disparue pour le reste du monde, elle va pouvoir préparer son retour, lever une nouvelle armée, revenir prouver à la noblesse que le Tout-Puissant reste à ses côtés. Elle a aussi un compte à régler avec l'Evêque Cauchon à la solde de l'ennemi.  

A ses côtés, veillant à sa sécurité, Dominique Dupuy (Ron Botton), qui l'exhorte à partir au plus vite avant que quelqu'un ne la reconnaisse.  

Jehanne dite "la Pucelle"* regarde le jeune homme avec tendresse : le sot ne sait-il pas que l'icône qu'elle est devenue est en cendres au milieu de cette place, que sa parodie de procès n'a laissé aucun doute sur la finalité du jugement ? Quand bien même on la reconnaîtrait ici, Dieu ferait en sorte de tromper à nouveau les esprits. Et puis…son beau visage défiguré par ses geôliers, ses parents eux-mêmes de la reconnaîtraient pas.  

Elle accepte tout de même de suivre son nouveau "garde du corps". Ils sont bientôt sur les routes, direction Chinon où elle demeurera aux abords de la ville. Son mystérieux sauveur l'a libérée juste avant sa montée au bûcher avec la complicité du bourreau Geoffroy. Il lui a dit qu'elle serait désormais en sécurité et lui a fait revêtir les vêtements de celle qui allait prendre sa place. Les deux jeunes n'ont échangé qu'un regard furtif. Cela a suffit à Jehanne pour percevoir toute la ferveur et la folie de celle qui allait prendre sa place au milieu des flammes et crier le nom de Jesus trois fois avant de périr.  

Désormais habillée en femme, une première depuis Pâques, elle frissonne alors que le duo chevauche vers Chartres. Si on lui pose la question, elle s'appelle Héloise, pieuse soeur de Dominique qui l'accompagne au carmel St Joseph à St Rêmy de Provence.  

Le soir venu, ils logent dans une auberge. Jehanne / Héloise dissimule les blessures de son visage sous un châle qui, s'il attire les regards, n'en renforce pas moins sa nouvelle identité.  

Cinq jours plus tard, ils sont arrivés à destination. C'est un petit cottage au milieu des champs qui bordent la ville. Dominique lui annonce qu'il reviendra, que celui qui l'emploie lui a donné des instructions précises. Il prend congé avant la tombée de la nuit.  

Elle se retrouve seule. Enfin seule depuis plusieurs mois. Seule au milieu de nulle part, en face de cette nouvelle résidence, une clé dans la poche.  

Elle s'installe donc dans son nouveau repaire, trouve des réserves de nourriture importantes, des vêtements, du bois...  

Plusieurs jours passent. Des jours qui se transforment en semaines. Puis en mois. Elle comprend vite sa nouvelle situation. Dominique Dupuy ne revient pas et elle est une inconnue pour les environs. Elle est littéralement abandonnée - ceux à qui elle doit la vie l'ont éloignée des affaires du pays. Un avertissement, en quelque sorte : la prochaine fois, il n'y aurait plus de procès, elle serait exécutée comme l'étrangère anonyme qu'elle est devenue…  

Elle finit même par s'interroger. Ce Dominique, était-ce son vrai nom ? N'a-t'elle pas été trompée depuis le début ? A moins qu'il ne lui soit arrivé malheur ou qu'il n'ait reçu de nouvelle mission ?  

Elle ressent tout-à-coup une grande fatigue. St Michel ne lui apparaîtrait-il une dernière fois pour lui prodiguer quelque ordre venu "d'en haut" ? Non. Ne doit-elle pas finalement sa survie qu'à la chance et sa témérité passée ?  

Est-elle destinée à finir sa vie telle une recluse contemplative et abandonner ce pour quoi elle s'est battue toutes ces années ?  

Elle décide, une nouvelle fois, de s'en remettre à Dieu...  

Pucelle = à l'époque, servante de Dieu - à ne pas confondre après l'idée de virginité.  

(Script original basé sur les théories des "survivalistes")