"- Vive le jeune retraité !"  

José (Manfred Ribic) avait grimacé au mot "jeune" mais il ne voulait pas paraître rabat-joie. Ici, dans la Salle Municipale de la petite Mairie de Tourneville-Mézières, on avait peu de raisons de faire la fête mais le départ du seul médecin de ce village du Centre se fêtait.  

Enfin, tout cela aurait pu revêtir un caractère mortifère si la fille de José, Bénédicte (Carrie Mendel) n'avait repris le flambeau : la famille Rivoli avait été une bouffée d'oxygène dans ce désert médical, Bénédicte avait scolarisé ses enfants ici et était revenue auprès des gens du terroir après son divorce.  

José se souvenait qu'il y a 40 ans, lui, le modeste fils de maçon italien était arrivé ici un peu par hasard son diplôme en poche. Dans le coin, on disait qu'il avait "apporté le Sud" avec lui. Il adorait l'expression.  

Lui, à l'age de 25-26 ans (Max Jarre), à peine sorti de l'école de médecine. A bord d'une vieille guimbarde prêtée par son père, il avait parcouru le pays - une sorte d'année sabbatique que l'on pouvait encore se permettre à l'époque : dans les années 70, il y avait tant de boulot.  

Du côté de St Etienne, il avait pris en stop une jeune tunisienne (Trudie Larson) - une nana avec laquelle il allait faire un bout de chemin avant de rencontrer la mère de ses enfants.  

Soraya - puisque c'est ainsi qu'elle se prénommait - était partie de chez elle. Elle faisait partie de ces migrants fuyant leur pays d'origine autant pour des raisons politiques qu'économiques.  

Autant dire qu'il avait découvert la vie - sous toutes ses formes - avec elle. Et à y réfléchir de plus près, c'était Soraya qui avait amené le Sud dans son coeur - mais ça, même ses proches l'ignoraient.  

En sirotant son alcool fort, José repensait à tout cela, plongeant son regard dans le liquide ambré et une certaine mélancolie. Il prit quelques instants congé des convives et se retrouva sur la terrasse du premier étage de l'édifice municipal.  

Quelle aurait été sa vie sans elle ? Une vie plus heureuse, une vie de combat ? Ou une vie rangée comme il venait d'en parcourir un bon bout. C'était le temps d'y repenser. Il allait bientôt partir d'ici, se libérer de ces racines.  

Retourner en Italie, rendre hommage à sa famille ? Oui, sans doute.  

Descendre encore plus bas, en Afrique, retrouver ceux qui avaient connu Soraya ? Probablement.  

Il savait que personne ne le suivrait. Lui, José Rivoli, notable local toujours bien entouré, se retrouvait seul face à la vie.  

Il était temps d'entamer son chemin de Damas.  

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MMP présente le dernier film produit par Ari Golan pour la compagnie avant son départ.  

(Script original)