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Drexl Production présente
L'Atout de puissance

Quelques siècles à peine dans le futur,  

dans un monde parallèle revenu tranquillement sur ses pas.  

 

L'air faussement dépité, Lady poussa une nouvelle pile de jetons vis-à-vis du symbole de l'étoile à sept branches au centre de la table, puis tira une nouvelle carte : la Lune blafarde. Elle se défit du Polymorphe, son atout le moins fort, et attendit que son adversaire dévoile son jeu. Celui-ci, un petit homme chauve et malingre doté d'un énorme nez sur lequel reposait périlleusement une paire de lunette poussiéreuse, produisit rien de moins qu'une suite en sept renforcée d'un Janus d'or. Il était un joueur de haut niveau et sa victoire pour les spectateurs qui se massaient autour de la table n'avait rien de surprenant. Lady allongea avec humilité sa suite en trois et son Multiface. Un murmure parcouru la pièce dans laquelle flottait une dense fumée de cigares caldrains, la spécialité locale. Lady venait de perdre à nouveau l'équivalent de quatre mois de salaire pour n'importe quel tavernier de la région. Seul le Duc eut pu perdre une telle somme sans trop s'en émouvoir. Lady, elle, se contenta d'une moue dubitative puis inclina doucement la tête à l'adresse du petit homme. Il était important pour elle de transmettre l'image d'une gourdasse fortunée et inconsciente. Elle appela une ultime ronde. Une spectatrice ne put retenir un petit cri de surprise, et le croupier toussota pour faire taire la rumeur montante. Il demanda d’une voix placide à ce que l’on produise les titres de propriété, l'enjeu ultime. Le petit homme étala sans hésiter sur la table les papiers demandés, ceux d'une luxueuse demeure centenaire sur le bord du fleuve Ribik, en amont par rapport à la cité et donc non touché par la pollution urbaine. Lady fit mine de regretter son appel. Ses mains soudains tremblantes vinrent déposer ses propres titres à mi-chemin entre son adversaire et le croupier. Tout se décidait là. Les faux devaient faire impression. Ils le firent.  

La joute s'engagea.  

 

Quinze minutes plus tard, il régnait dans la pièce une effervescence rarement vu dans les salles de jeu de Caldris. Lady dominait le petit homme, qui suait à grosses gouttes. Le croupier lui-même, d'ordinaire impassible, faisait les gros yeux devant la situation. De nouveaux jetons furent poussés sans détermination sur l'étoile à sept branches. La partie se jouait là. L'homme opta pour le lancer et obtint le douze requis. Il tira son atout. À nouveau un Janus d'or. Il abattit l'Étoile du berger et se fendit d'une prière silencieuse. Lady ne se fit pas attendre. Elle dévoila sa suite en sept et, en atout, rien de moins qu'un Unique en platine. Une main parfaite !  

Les spectateurs ne tinrent soudain plus en place. Des vivas fusèrent de partout dans la pièce pour célébrer l’exploit et on se massa autour de Lady, qui pour la féliciter, qui pour lui tapoter respectueusement l'épaule, pour s'attirer bonne fortune.  

 

Lady Leïla Anhbara, baronne de Blackwood, n'avait pas prévu ce débordement des festivités sur sa propre personne. Une erreur manifeste, la seule commise en cette soirée de tricherie. Le bras d'un gros balourd rougeaux intercepta le geste furtif qui devait lui permettre d'échanger les dés truqués contre les réguliers, lesquels étaient dissimulés depuis le début dans une poche secrète cousue à l'intérieur de sa manche droite. L'un d'eux lui glissa alors d’entre les doigts et, sous les yeux horrifiés de Lady, tomba net sur la table pour aller rouler dans la pile de jetons au centre. En un mouvement d'ensemble parfaitement synchronisé, tous les yeux se tournèrent vers cet objet incongru, un dé superflu marqué lui aussi de l'emblème de la maison de chance. La suite des événements s'enchaîna très vite. On fit venir le maître de jeu, lequel déclara les dés de joute non-conformes à la règlementation en vigueur après un rapide test scanner. Les spectateurs et le petit homme défait hurlèrent au scandale avant d'être sévèrement rappelé au silence par les officiers de garde. On examina ensuite les titres de propriété soumis par la dame, lesquels s'avérèrent des contres-façon d'excellentes qualités. Un instant plus tard, on mettait Lady au fer.  

 

La nuit fut longue pour tout le monde. Le Duc en personne fut appelé à prendre connaissance de cette fraude, puisqu'elle impliquait des propriétés placées sous sa juridiction. Lady se garda de relever l'ironie de la situation. Le Duc lui-même était un fraudeur de la pire espèce, comme tous les habitants de Caldris. Il avait hérité de son titre en personnifiant le défunt fils de son prédécesseur, une créature complètement sénile et surtout très mal entourée. Lady joua la carte du mutisme toute la nuit et une partie de la matinée. Elle connaissait les rouages de la justice locale et la règle tacite qui interdisait d'amputer les détenus lors des "interrogatoires" de la police ducale. Vers midi, donc, le règlement en duel n’ayant pas été réclamé, on infligea à Lady la peine des tricheurs, prenant la forme du mot inscrit au fer chaud sur sa nuque. Puis on procéda à la cérémonie du bannissement. Lady ne garda en mémoire de cet événement que le regard assassin que lui lançait le petit homme à lunette avec son gros nez, lequel, dissimulé parmi la foule, souffrirait toute sa vie d'avoir été la cible d'une telle supercherie. Ils étaient finis dans le milieu, lui et le pauvre croupier d’office ce soir-là. Dommage collatéral.  

 

Lady repris conscience quelque part dans le désert d'Ersech, par 40°Celsius, nue sous les plumes et le goudron. S'étant toujours refusé à prendre un associé pour l'épauler dans ses combines, elle ne pouvait plus compter que sur elle-même pour se sortir de ce vilain guêpier. Jamais personne n'était revenu d'un séjour punitif dans ce désert inhospitalier. Le sable brûlant qui s'étend à perte de vu, l'absence de tout point d'eau, ne serait-ce qu'imaginaire, en faisait la prison idéale pour tous ceux qui avaient l'impudence de tricher dans une maison de chance caldraine. Si la chaleur ne vous étouffait pas dès les premières heures, et si votre esprit résistait à la tentation de sombrer rapidement dans la folie la plus sauvage, sous les coups de dard de dizaines de scorpions, vous pouviez toujours faire confiance aux nomades Égorgeurs pour vous abréger l'espérance de vie. Les Égorgeurs méritaient leur surnom. Il vous égorgeait tout homme, femme ou enfant étranger à leur clique, sans discussion ni concession. Ils n'étaient pas barbares ni particulièrement cruels, mais ne toléraient simplement pas les étrangers. Il fallait naître sous les étoiles d'Ersech pour jouir du noble privilège d'arpenter librement ses étendues sableuses. Les Abrités, eux, avaient leurs propres territoires pour être libres.  

 

Lady, sous la souffrance de ses brûlures, s'imposa d'élaborer le plus rapidement possible une nouvelle combine pour non seulement sauver sa vie mais aussi rattraper ses pertes. Elle était la fille cadette d'un Comte, veuve d'un Baron et mère de jumelles qui, elle en était sûre, feraient brillante carrière là où elle les avait abandonnées, dans le bordel le plus luxueux de Caldris. Rien n'était à l'épreuve de Leïla Anhbara de Blackwood, la plus belle, la plus habile et la plus fourbe des femmes de son époque. Son plan lui permettrait de regagner la cité du vice et d'y refaire fortune sous une nouvelle identité. Elle écumerait à nouveau les maisons de chance et dépouillerait les plus puissants caldrains de leur or et de leurs maudits cigares.  

L'idée géniale s'imposa d'elle-même à Lady : la pièce maîtresse de sa nouvelle machination, son atout précieux qui lui permettrait de rattraper sa bévue de la veille, serait précisément cet imposant cavalier chauve et balafré qui s'approchait déjà, un poignard à la main et un sourire mauvais aux lèvres.  

 

Il serait son propre Guerrier de feu et de lumière, en chair et en os...  

 

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Lady Leïla Anhbara – Mandy Faltermeyer  

L’Égorgeur – Gianni Ratélavarape  

Le petit homme – Thomas Gabriel (cameo)

Scénario : (2 commentaires)
une série Z d'action (Aventure !) de Thomas Gabriel

Gianni Ratélavarape

Mandy Faltermeyer
Sorti le 02 mai 2020 (Semaine 800)
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