Sam Boston : Romer  

Sophia Birwin : Jenny  

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Accoudé sur sa voiture, Romer attend sa femme, Jenny, partit acheter deux trois trucs dans l'épicerie du coin. Les gens passent devant ses yeux et ses lunettes de soleils d'un noir à la Paul Newman. Juste à côté se trouve le kiosque à journaux, connaissant sa femme, Romer décide d'acheter le quotidien et s'approche du vendeur, la pièce à la main.  

- Vous avez quoi ? demande t-il.  

- Le canard du coin, mais ils racontent que de la bouse. Je vous conseille L'immaculé, ils ont publié un paquet d'articles intéressants.  

- Vous conseillez les clients ?  

- Non, je les branle.  

Romer dévisage le sourire moqueur du vendeur et lui donne une pièce, après avoir prit L'immaculé. Il revient vers sa voiture et s'assoit à la place du conducteur. Le journal est un canard surnaturel, et la première page affiche une image HD d'un point noir au dessus d'une forêt, avec marqué dans une police majuscule grasse ILS SONT LA.  

Romer rigole dans sa barbe, et se dit une nouvelle fois qu'il s'est fait avoir : le journal de précheux recommandé par le vendeur coûte trente cents de plus que le canard du coin.  

Il ouvre le journal, à la page des pseudo-E.T., et tombe sur un article se déroulant sur toute la longueur de ce qui s'ouvre à lui.  

Des interviews, un article, des photos en tout genre sur deux pages entières, jusque dans les coins.  

La photo de la couverture se trouve à nouveau là, en modèle réduit. Romer commence à lire : "Les observations dans les alentours de Castle Rock ont dévoilé la présence de nombreux OVNI, des dizaines de points noirs apparaissant au-dessus de fermes, habitations et prés.".  

Romer n'en avait pas entendu parler, pourtant, le journal faisait mentions de nombreux témoignages, de fermiers que Romer connaissait de noms, ainsi que de la découverte d'un corps mutilé d'une chèvre à sept kilomètres de Castle Rock.  

Castle Rock, c'est la bourgade où lui et sa femme habitent. Ou plutôt à cinq kilomètres, dans la cambrousse, sous l'influence de Madame. Ils sont jeunes mariés, et pour l'épouser, Romer a dut céder à toutes ses volontés. Mais une fois le coupe durable et solide, il compte bien se faire entendre et emmener la belle en ville.  

Intéressé par le sujet qu'il trouvait risible, Romer sort de la voiture et se rend à nouveau vers le vendeur.  

- Oui, ma bite ? demande le bonhomme.  

- Ils parlent des E.T. dans le canard du coin ?  

- Une demi-page, je crois, mais c'est bien moins complet que...  

- Tant pis, j'en veux un.  

Il lui tend une pièce, et le vendeur lui donne le canard du coin, que Romer empoigne et emporte dans la voiture. Il voit dans un coin de la première page un petit encadré "Les Aliens à Castle Rock ? Page 23". Romer cherche la dite page et tombe sur quatre petites colonnes et l'image choquante d'une chèvre ensanglantée. L'article dit avec objectivité, sensiblement la même chose que L'immaculé, on a même presque l'impression que le canard a copié l'autre article, en coupant les passages mentionnant Buenos Aires 65 ou Roswell 47.  

Romer dévore les deux articles, et ne remarque presque pas l'arrivée de sa femme une demi-heure après, qui dut le pousser pour qu'il démarre.  

- Tu lisais quoi ?  

- La bourse, répond t-il.  

Elle le regarde étrangement alors qu'il démarre pour la maison. A leur arrivée, Romer court vers le poste d'ordinateur, l'allume et se rend sur internet, dévorant des sites supernaturels sur des OVNI, ou des E.T. Alors que Jenny s'inquiète qu'il ne vienne pas à table, il sort son appareil photo de sa commode et sort à l'extérieur. Jenny le regarde passer et lui emboîte le pas.  

- Qu'est-ce que tu vas faire ?  

- Prendre des photos.  

- A neuf heures du soir ? Il fait nuit!  

- Pas grave, y a un flash.  

Le jeune époux avance dans le jardin et s'assoit sur le banc. Jenny se pose à ses côtés et demande :  

- Qu'est-ce qui t'arrive ?  

Romer se tourne vers elle avec un grand sourire.  

- Tu aimes la solitude, je peux te comprendre, mais moi aussi je me suis découvert une passion : Nous ne sommes pas seuls.  

L'odeur émanant du bureau de Romer était insoutenable. Jenny n'y était pas entrée depuis maintenant trois semaines, et, profitant de l'absence provisoire de son mari parti à la "Chasse aux Aliens", décide d'y faire le ménage. Un poster d'"I Want to Believe" occupe la place de l'ancien poster des Beatles, sur deux autres pans de mur se trouvent celui de la fausse autopsie de Roswell, en face d'une image de crop circles HD. Un tas de livres d'illuminés tapissent le sol, ainsi que des feuilles A4 noires de notes ou d'articles sur l'ufologie.  

Après un soupir, Jenny commence à ranger, jetant quelques objets inutiles à la poubelle.  

C'est le soir. Le repas est prêt depuis vingt minutes et Romer pousse enfin la porte d'entrée. Il se met en face de sa femme, épuisée, et en train de faire passer pour sérénité sa colère contre son époux. Il sort des clichés de sa poche et lance, exalté :  

- Regarde, on en a prit ! Près de Venty Carlos.  

Il lui montre les photos vaseuses de points noirs semblant être oiseaux ou avions au dessus d'une forêt, puis d'une maison.  

- Je vais les poser dans le bureau ! J'arrive dans cinq minutes!  

Il monte les marches en sautillant comme un enfant, et, à peine une minute plus tard, redescend, la mine terrifiée.  

- Tu es entrée ? demande t-il, en haut des marches, fixant sa femme.  

- Oui, et qu'est-ce que ça peut te faire ? Tu ne sors plus, sauf pour tes maudits Marciens et pour le boulot, même plus avec moi. Tu arrives des heures après que je t'ai appelé pour le repas, tu ne me parles plus que de Roswell, tu pètes tout ton fric dans des bouquins de fous...et moi dans tout ça !  

Soudain, elle remarque dans la main droite de son mari une arme à feu. La carabine de chasse de son père qu'il utilise lors de ses chasses aux aliens.  

- Vraiment ? s'exclame t-il, un sourire vertigineux aux lèvres.  

Jenny court se cacher mais Romer est plus rapide, et l'attrape devant la porte, la carabine pointée sur la tête de sa femme.  

- Nous ne sommes pas seuls, Jenny. Je ne le serais pas moins sans toi...