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MMP présente
Fougnac-en-Provence

"- … et sans transition, nous passons de la Bourse en chute libre à une page plus pittoresque de nos campagnes - à Fougnac-en-Provence, où la population est divisée face aux projets d'une grande multinationale qui souhaite transformer en profondeur la paisible vallée…"  

Journal télévisé de la mi-journée en France, sur une grande chaine privée. Année 2013.  

 

Tout avait commencé quelques mois auparavant…  

 

Fin 2012, la dégradation de la "note" de la France sur les marchés financiers internationaux entraine un quasi-dépôt de bilan du pays qui se met alors sous tutelle de ses créanciers. Le FMI prend la direction des opérations "d'assainissement des finances publiques", selon le terme consacré. Le reste du pays tire la langue. Des millions de manifestants montent sur Paris réclamer la sortie de l'Euro, l'agitation sociale frénétique perturbe gravement les élections présidentielles, reportées sine die en attendant une stabilisation de la situation et un retour à l'ordre public.  

Quelques semaines plus tard, en début d'année 2013, l'état annonce d'importantes mesures d'austérité et la loi martiale dans les villes de plus de 50 000 âmes.  

 

A Fougnac-en-Provence, 2 500 habitants au coeur du pays des cigalouns et de l'huile d'olive, on observe la situation avec anxiété. Monsieur le Maire Philippe Pétroni (Enzo Barron) est à l'image de ses administrés : s'il n'a plus grand-chose à perdre dans la crise que subit le pays et cultive son bout de terrain, comme tout le monde il a de la famille dans les villes, des amis dans le besoin et s'inquiète de la balance de sa commune : les différents Conseils (Régional et Général) viennent d'annoncer une réduction de 90% de leurs aides à l'investissement, de l'aide sociale et une diminution de 30% des pensions de leurs anciens employés.  

Fougnac, comme beaucoup de villages alentours, est occupé en été par des touristes fortunés et le reste du temps par de paisibles retraités dont une large minorité d'ex-fonctionnaires. Les dernières informations sont donc une catastrophe pour la commune.  

 

Pour maintenir l'institution, payer les salaires et permettre au village de survivre hors-saison, il va falloir trouver de l'argent - et vite. Il en parle autour de lui. La nouvelle se répand : il n'y aura plus rien dans les caisses dès le mois d'avril - et nous sommes déjà février.  

 

C'est alors que Roger Guirlande (Blaise Atouva) vient à lui. Roger est un jeune "loup" aux dents longues, ancien spéculateur féroce sur les marchés (en 2011, il avait tout misé sur la farine) qui aujourd'hui s'offre le luxe de travailler à distance (le village n'a pas d'ADSL mais lui une ligne satellite). Il est l'individu de loin le plus diplômé du village et de la vallée, le plus au fait des questions d'argent : comment bien le dépenser et comment en gagner.  

Roger sollicite un entretien avec Pétroni et lui propose un investissement étranger, une "semi"-privatisation du village en échange d'un investissement massif dans les services publics et un règlement des dettes de la Mairie.  

 

Dubitatif, Pétroni demande à voir. Quelques jours plus tard, Mademoiselle Lise Carbon (Lacey de La Colonie) débarque dans un gite du coin. Elle est mandatée par C&C-Cambridge & Sunbeaver, un organisme d'investissement américain, pour auditer le village.  

Pendant une semaine, avec Roger, le Maire et son Secrétaire Général, ils auscultent les finances publiques et les potentialités du lieu. Dans le même temps, Roger tente désespérément de charmer la jeune femme qui ignore superbement ses avances.  

 

Dix jours après son arrivée, elle repart à Paris faire son rapport et promet une réponde sous quinzaine et Roger au Conseil Municipal réuni en cession extraordinaire que bientôt, Fougnac connaitra un afflux de "bon argent" et que personne n'aura plus à se faire de souci.  

Une conseillère de l'opposition, Delphine Fine (Stephanie Baxter) objecte que la mainmise d'une structure externe sur les affaires de la commune lui parait dangereuse et que si ce discours a fait les beaux jours de certaines entreprises, "un village, une commune, n'est pas voué à faire du profit mais à équilibrer ses comptes."  

"- C'est tout comme…" lui répond un Guirlande très sûr de lui, de son plan d'investissement et du joli pourcentage qu'il va récolter en passant - "Les temps ont changé mais Fougnac est un joyau au coeur de la Provence, nul n'aurait l'idée de l'abîmer…" Le reste des conseillers et le Maire lui-même semblent s'en convaincre - peut-être un peu par défaut ou désespoir.  

 

Une seconde visite d'investisseurs de C&C-Cambridge & Sunbeaver est prévue le mois suivant, toujours en compagnie de la belle Mlle Carbon. Le village déploie alors des trésors de séduction pour se plier à "l'image typique" qu'il veut vendre aux "riches américains" (s'ils savaient que les capitaux de C&C dépendent principalement de fonds chinois et pétro-monarchiques, peut-être arrêteraient-ils de les prendre pour des "oncles d'Amérique"…).  

Et les "américains de Paris" sont effectivement très intéressés : une gare TGV à 30 kilomètres, une autoroute à 50, de l'eau chaude, de l'électricité, un paysage à couper le souffle, une température idéale, des taxes locales réduites, des terrains constructibles aux prix tellement bas que "c'en est pêché". Ils repartent satisfaits. Mais Carbon reste sur place.  

Elle sera les yeux et les oreilles de C&C-Cambridge & Sunbeaver durant la phase 2 du plan.  

 

"- La phase 2 ?"  

Un nouveau Conseil Municipal extraordinaire convoqué quelques jours plus tard, Delphine Fine tient dans la main un imprimé remis à tous les élus détaillant le plan d'investissement de C&C-Cambridge & Sunbeaver : développer le luxe de standing à Fougnac… en échange de quelques "aménagements" de la vie quotidienne des habitants :  

 

1. délocaliser les vieillards de plus de 80 ans de la commune : en effet, le touriste aime le 3ème âge "actif" souriant, si possible sans Alzheimer. Le retraité français, considéré comme passif à écouter les cigales par le cabinet d'études, n'est donc pas requis. Installation, aux frais de C&C, de ce 'reliquat' en pension complète en maison médicalisée proche (à 25 km),  

2. refonte des accès du village pour permettre aux bus de standing **** d'accéder au vieux village qui sera conservé tel quel après opération de rénovation aux frais de la compagnie.  

Le "plan de rénovation" en question a été disposé au milieu de la grande table de la Salle Municipale : pour Delphine Fine, c'est de "l'authentique en toc", de l'image d'Epinal du début du siècle dernier que Fougnac n'a pas vocation à devenir, une hybridation contre-nature entre le cliché de la Provence-bobo et Fernandel,  

3. durant toute la haute-saison, les habitants au contact des touristes devront se conformer à un dress-code qui leur interdira le port de vêtements dont la coupe serait ultérieure aux années 50.  

 

Pour Pétroni c'est la douche froide, pour Fine on marche sur la tête. Même Roger Guirlande semble tout-à-coup gêné et guette la réaction de Mlle Carbon, un peu inquiet…  

L'intéressée ne s'est pas départie de son magnifique sourire : pour elle, beaucoup de concessions ont été faites par C&C. Par exemple ses patrons voulaient que tout le village devienne bilingue : "Il a fallu que je leur explique que Paris n'était pas la seule ville de France à parler Français, et que votre accent était d'origine."  

Développer le tourisme était un élément du plan mais pas le seul : pour les riches américains qui souhaitaient s'installer en Provence, il fallait développer un cadre attractif, "à l'américaine". Le client voulait retrouver ailleurs ce dont il disposait chez lui, c'était ainsi et pour Carbon juste de "l'aménagement" :  

 

4. édification, à côté du village, d'un second village avec lotissements sécurisés doublés de miradors "style provençal" et ouverture d'un Mall destiné aux seuls nouveaux occupants au centre de la nouvelle structure.  

 

Ainsi, l'idée de "vieux village" prendrait tout son sens.  

Philippe Pétroni avait dit oui à tout cela sans le savoir - il tremblait de tous ses muscles, partagé entre l'espoir et la consternation : le premier versement de C&C, d'un montant global de 50 millions d'euros, couvrirait les frais de fonctionnement de la mairie pour les 3 prochaines années, ses investissements, et assainissait les dettes contractées. L'activité induite par cette véritable révolution urbaine induirait de l'activité pour les commerces du centre, du travail pour la vallée - on en parlerait dans les médias, une bonne publicité pour un village qui allait de l'avant sans perdre - trop - sa personnalité.  

 

Delphine Fine n'était bien sûr pas de cet avis : elle était prête à prendre la tête de la contestation, à aller jusqu'au Conseil Constitutionnel s'il le fallait, jusqu'aux tribunaux de Bruxelles qui casseraient forcément cette gabegie (elle, voulait le croire en tout cas). C'était une "révolution" oui, mais pas forcément paisible, qui s'annonçait.  

 

Pétroni était partagé, Fine remontée, Guirlande soudainement indécis (était-il allé trop loin ?) et Carbon sûre de son bon droit. Le Conseil Municipal bruissait de mille mots et la population, invitée à partager ce moment, sans voix - comme complètement sidérée.  

Fougnac-en-Provence allait vivre quelques journées enfiévrées.  

 

(Script original)

Scénario :
une série B comique (Oncle d'Amérique) de Nolween Colombier

Enzo Barron

Lacey de La Colonie

Blaise Atouva

Stephanie Baxter
Musique par Lea Forsey
Sorti le 26 juin 2021 (Semaine 860)
Entrées : 18 598 003
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