De la moquette. Une chaise de bureau ici. Des chaussettes sales qui traînent. La moquette est vraiment collante. Des papiers de bonbons. Il semble que l'ordre a définitivement migré loin d'ici. Un lit, avec un duvet épais replié: il fait trop chaud. Sous les draps: un corps. Vivant, en témoigne le petit battement régulier qui agite sa poitrine. Pas cette nuit. Ce serait trop tôt, il ne comprendrait pas, n'accepterait pas. Il faut quitter cette chambre maintenant, avant qu'il ne sente cette présence...aveuglante dans l'obscurité.  

15 ans plus tard.  

Dan se réveille. En douceur. Il soupire de fatigue, puis consent enfin à sortir du lit. Il cherche ses chaussons dans l'obscurité, les enfile, puis descend prendre le petit déjeuné. Pas un bruit. Sa fiancée, Samia, doit encore dormir. Il se prépare un bon café, quelques tartines, puis prend le tout et va s'installer sur le balcon, pour observer le va et viens incessants des passants, en cette chaude matinée d'été. Mais... Non, il ne se trompe pas. Il est bien dix heures passé. Pourtant, personne dans la rue, pas l'ombre d'un mouvement. Ni humain, ni animal.  

Intrigué, il décide d'aller voir Samia. Il ouvre doucement la porte, qui laisse échapper un mince rayon de lumière. Il grimpe doucement sur le lit, s'approche de Samia et lui susurre à l'oreille:  

- Ma chérie...  

- AH!  

Dan était soulagé. Elle bougeait.  

- Tu m'as fait peur! Tu sais bien qu'il faut jamais me réveiller!  

- Oui, oui. Mais...J'ai une drôle de sensation. Habilles-toi et suis-moi.  

Elle enfila alors son jean, resté en boule à côté du lit, et un petit débardeur rose, puis suivit Dan. Il ouvrit la porte de l'appartement et descendit les escaliers avec Samia.  

Tout semblait...bizarre. Le soleil était là, certes. Mais en cet été chaud, les oiseaux ne chantaient pas. Les chats ne couraient pas après. Il n'y avait personne dans la rue, alors qu'elle devrait être bondée à cette heure-ci. Pas même un seul petit souffle de vent. Un horrible pressentiment hantait désormais le couple. Ils coururent dans la rue déserte, leurs pas résonnant comme jamais. Brusquement, Dan, tenant la main de Samia, changea de direction. Il allait vers la boite de nuit. Il en ouvrit la porte, pénétra à l'intérieur. La musique semblait s'arrêter toujours au même moment. Les lumières ne bougeaient plus. Mais pire encore: les personnes semblaient figées.  

Précipitamment, il sortit, et retrouva Samia sur la place de la Mairie.  

Mais qu'est qu'il se passe?! Personne ne bouge!  

A ce moment, une lumière éblouissante arriva du ciel vers la place. Elle descendait, petit à petit, scintillant dans le ciel bleu et pur. Elle semblait légère, gracieuse. Dès qu'elle toucha le sol, elle s'évanouit et un être translucide apparu, sous les yeux ébahis de Dan et Samia. Bien que d'un blanc translucide, on distinguait très bien les contours de son visage pur. Sa chevelure semblait être de l'or en fusion, et flottait derrière elle, comme agitée par un vent mystique. Elle ouvrit alors la bouche.  

Le couple n'en revenait pas. Ce n'était pas possible, tout simplement inimaginable. L'être qui se tenait devant eux était Ethia, la lumière en personne. Pire: elle les connaissait. Ethia leur avait raconté qu'hier,le temps s'était rompu. Seules les saisons et le soleil continuaient à fonctionner, le reste s'était arrêté. Mais pourquoi pas eux? Ethia leur avait répondu qu'hier, à l'heure du désastre, elle s'était rendue dans leur chambre. La lumière étant la vitesse la plus grande, elle avait pu les protégé d'un voile lumineux.  

- Mais pourquoi nous?  

- Parce que seulement en vous, j'ai vu les capacités requises.  

- Quelles capacités?, demanda Dan, tremblant d'entendre la réponse qu'il redoutait.  

- Les capacités pour rétablir le temps... et sauver votre monde. Vous devrez me faire une confiance...aveugle.  

Puis, Ethia disparu. Dan et Samia s'interrogeait. Il devait faire confiance aveuglement à la lumière. Mais ils n'eurent pas le temps de gamberger. Dans le ciel, une étoile rouge, surnaturelle, semblait leur indiquer le chemin à suivre.  

Dan et Samia roulaient depuis fort longtemps. Ils étaient montés dans leur cabriolet, Dan conduisant, orienté par Samia, qui scrutait l'étoile rouge. Dan ralentit, intrigué par le lieu où il se rendait. Il gara la voiture et en descendit. Il regarda l'horizon. De l'eau, la mer pure et calme. A perte de vue. Quoique... En plissant les yeux, il parvenait à voir une sorte d'île. Ethia apparu alors, toujours aussi belle et intrigante. «Continuez, suivez-moi».  

L'eau était tiède, ce ne fut donc pas dur d'y rentrer. Ils avaient préféré la nage car les flots étaient calmes, comme stoppés par le temps. Dan et Samia semblaient avancer magiquement, comme poussés par cette lumière divine. Au bout d'à peine quelques minutes, ils atteignirent cette île. Dès qu'ils eurent posé pied à terre, une étrange sensation envahit tout leur corps. Comme si un mal-être grandissant s’immisçait des pieds à la tête. La douleur les fit mettre un genou à terre. Ils se relevèrent et continuèrent leur chemin vers la grotte centrale de l'île.  

La grotte était sombre et profonde. Inquiétante aussi. Le jeune couple s'enfonçait dans les ténèbres, l'air hagard mais pourtant bien aux aguets. Dan leva les yeux et pour la première fois, il n'aperçut pas Ethia qui les guidait dans le ciel rocheux. Soudain, Dan aperçut une chose qui tombait du plafond. Ethia était blessée. Dan s'approcha, les larmes aux yeux; et Ethia lui souffla à l'oreille:  

- Dan...Samia...Je ne pourrais plus vous guidez. Ne vous occupez pas de moi. Ils arrivent. Ils sont la raison du dérangement temporel que l'on subit. Les Mages noirs se sont échappés des Enfers. Rétablissez...le temps.