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Well Walling Production présente
Legend

 

Un scénario d'Evangélina Walling II, avec :  

- Jessie Forden : Nichola Osaikeen  

- Francesca Ayres : Thrúd Ola  

- Conrad Kelly : Kylan Luderik  

- Weston Drexler : Lennart Ulmer  

- Mallone Gray : Luane Osaikeen  

- Gilmore Gray : Ulrika Bartke  

- Dylan LaSalle : Vilfrid Brynjolf  

 

 

 

Le cliquetis des rails nous berce. Nous sommes exténués après une journée entière à marcher pour rejoindre la gare d'Osirow. Des gardes nous distribuent un ensemble de vêtements chauds, pantalon, haut de corps, chaussettes épaisses, chaussures fourrées, pull en lainages et manteau à capuche. Nous troquons sans efforts nos vêtements tout trempés contre ces habits chaud et surtout, secs. Nous grelotons dans le froid en enfilant nos nouveaux habits. Nous sommes désormais tous identiques. La première étape vient de commencer : nous ôter notre identité.  

Nous montons par groupe dans les wagons. Chaque groupe d'enfant est mené par un adulte. Une femme nous fait assoir dans le wagon-bulle. Je la reconnais, elle est déjà passé à la télévision. Il me semble que je suis la plus vieille du wagon. Je m'installe sur la banquette du fond, le plus loin possible de cette monstrueuse femme. Il me semble que c'est elle la chef du projet, et je la haïs d'autant plus qu'elle est responsable de ce qui va nous arrivés.  

Malgré l'excitation d'emprunter pour la première fois un wagon-bulle, la moitié des plus jeunes enfants s'endorment. Les autres regardent, émerveillés le paysage défiler sous leur yeux lorsque le wagon prend de la vitesse. Chaque compartiment se suit, à bonne distance. On peu voir quelque visage blafard devant et derrière nous, mais aucun trait ne ressort vraiment.  

 

Je me sens si mal. Je ne peux m'empêcher de dévisager chaque enfant du wagon, de noter leur âge et de me dire que dans quelques jours, ils seront surement tous morts. Peut-être que moi, avec mes quatorze ans, je bénéficierai d'un sursis. Mais la rage bouillonne en moi. Vivre n'a plus d'importance désormais, car je ne me contenterai pas de survivre comme une bête. Je voulais vivre comme tout le monde, j'avais des rêves, mais les voilà tous envolés maintenant que ma destination est surement les camps d'Åsgard.  

Je ne peux m'empêcher de parler, de clamer que quoi qu'il arrive, je ne serai jamais soumise. Bien sur, je ne l'exprime pas comme tel, je ne veux pas condamner encore plus vite ces enfants qui m'entendent, mais la femme qui nous surveille comprend, elle.  

Par la vitre, des carcasses de wagon-cages sont couchés et éventrés sur le sol.  

"- Ce n'est pas parce-que vous avez abandonné vos vieux wagons et que vous nous transportez dans des prisons dorées, que nous ne savons pas ce que vous allez nous faire", je murmure.  

Ma phrase jette un froid et la femme me foudroie à nouveau du regard. Elle commence à comprendre que je ne plierai pas à leurs stupides ordres barbares et qu'il vaut mieux me tuer directement en arrivant. Je vois la lueur de haine s'allumer dans ses yeux. Elle ne laissera pas vivre une gamine qui risque de compromettre toute son "opération". Un frisson me parcourt malgré moi, malgré la chaleur du compartiment. Je n'ai pas vraiment peur, ou en tout cas, pas pour moi. Mais une fillette s'est accroché à mon bras comme si j'étais sa peluche et dort, le pouce dans la bouche.  

 

Je pose une main tremblante sur sa tête et la regarde dormir paisiblement. Elle me rappelle tellement ma sœur. Luane était plus vieille que moi et je n'ai pas trop d'espoir de la revoir un jour. Elle a été emmené dans les camps quelques mois auparavant, juste avant la mort de mon jeune frère, Capsi. Ma mère en est morte de chagrin. Perdre deux enfants, sans avoir le répit de les pleurer ou de les enterrer lui a été insupportable. Mais la loi à Grivansgava interdit aux familles d’inhumer leurs proches. C'est l'état qui s'en charge et les adultes ne doivent pas louper une seule journée de travail et les enfants, aucune journée d'école. Je ne sais pas où ils ont été enterrés, ni même s'ils ont été enterrés. Peut-être avec mon père, mort il y a deux ans dans une avalanche, alors qu'il travaillait à la mine. Luane a été raflé lors des premières récoltes, vers le mois de juin ou juillet. Il faisait chaud, c'est tout ce don je me rappelle. Capsi est mort alors que la chaleur commençait tout juste à décliner. Quand à ma mère, elle m'a quitté fin septembre, juste après mon anniversaire. On est en plein novembre, et il était sur, qu'à mon tour, j'irai grossir les rangs des soldats Musta Suihkulähde, qui veut dire, "de la Fontaine Noire" dans une langue du Sud.  

 

Les carcasses de wagon-cages me font penser à autre chose encore. Les camps Nazis. Je suis assez vieille pour avoir connu les cours d'histoire sur la Seconde Guerre Mondiale. Je revois encore les photos de cadavres blancs, maigres, inhumains de notre manuel scolaire tout chiffonné. Est-ce ce qui nous attend ? Je réprime un nouveau frisson. Ces gens, des juifs principalement, bien que ce mot n'évoque rien pour moi, je n'ai pas très bonne mémoire, les cours ne m'ont jamais intéressés, étaient conduit en train jusqu'à des camp d'extermination, je crois que c'est le terme exact. Là-bas, ils étaient gazés, c'est à dire, tués par un gaz toxique. Pourquoi ais-je en mémoire la façon dont ils ont été tués et non qui ils étaient ? Je soupire. Dans cent ans, qui sait si les enfants iront encore à l'école et étudieront le cas des soldats MS. J'espère au moins que les MS auront disparus.  

Une secousse me ramène à la dure réalité. Un petit garçon se blottit contre moi, apparemment effrayé par son premier tour de wagon-bulle. Je l'entoure de mon bras libre et le serre tout contre mon cœur. Il pleure en silence, les yeux clos. Je le vois alors, maigre, frêle, pâle, presque nu dans la neige, couché sur le dos, mort. Superposé les images historiques vieilles de plus de cent ans sur le visage de ce petit garçon me soulève un haut le cœur. Je me retiens de vomir en vrillant mon regard sur un point fixe au dehors.  

 

Lorsque les wagons-bulles s'arrêtent, j'allais enfin m'endormir. Toute une équipe de nouveaux gardes nous réceptionne. On nous fait descendre dans le plus grand calme possible. Lorsque c'est à mon tour de glisser mes orteils au dehors, je suis la dernière et notre accompagnatrice me retiens.  

"- Tout le monde se soumet à la règle, et si tu refuse d'obéir, alors, nous sévirons", me glisse-t-elle froidement.  

Mais je n'ai pas peur, sa méthode et son ton ne m'intimident pas. Je la toise avec tout le mépris que m'inspire cette femme. Elle pouffe méchamment de rire et m'attrape plus fermement le bras.  

"- Je vais te dire : j'en ai eu pleins ici, des filles comme toi. Tu veux savoir ce qui leur arrive ? Elle ne sont plus que des loques domptées ou un tas de cendres encore fumantes. Choisis ce que tu veux devenir, parce-que je m'occuperai personnellement de toi."  

Ça menace siffle dans l'air telle une bourrasque invisible et reste suspendu entre nous deux pendant de longues secondes. Finalement, je ne dis rien, mais garde mon regard incendiaire braqué sur elle. La femme me lâche finalement, non sans ecchymoses au bras, et je descend maladroitement du wagon. L'air glaciale me happe et je pars rejoindre mon groupe, quand un cris déchire l'ambiance silencieuse.  

Une fille à peine plus jeune que moi est traîné sur le sol glacé alors qu'elle se débat. Elle hurle des insanités à l'adresse de ses tortionnaires et donne des coups de griffes autour d'elle. Je ris intérieurement. Pas parce-que la scène est drôle, bien au contraire, elle est dramatique, cette fille va surement se faire tuer, même si ce n'est pas sous nos yeux, mais parce-qu'elle a le courage de tenir tête à ces barbares. J'aimerai en faire autant, mais j'ai l'impression que le froid m'a coupé la circulation sanguine en même temps que mes ailes de la rébellion. Je me jure alors que si cette fille survit, j'en ferai mon alliée pour quitter cet endroit maudit. Finalement, la fille disparait avec ses gardes et le reste d'entre nous est poussé jusqu'aux portes d'un grand bâtiment, type hangar.  

 

C'est le moment du "triage". On nous parque dans le grand hangar en tôle, les gardes faisant un cercle autour de nous, et on attribue à chacun une étiquette de couleur, selon l'âge et le sexe. Ma pastille est verte et on me la colle sur la poitrine. Ensuite, les plus jeunes - pastille jaune - sont emmené ailleurs. Les cadets - pastille rouge - sortent juste après, alors que les aînés - pastille verte - restent dans le hangar surchauffé. Peut-être est-ce la chaleur corporelle de mes semblables qui semble m'étouffer, mais je suffoque littéralement. Ou alors, c'est une crise d'asthme. Je n'en ai pas fait depuis la mort de ma mère, comme si avoir pleuré tout l'été et l'automne m'avait vidé de mon énergie, mais ma gorge se noue soudainement et j'agrippe mes deux mains le long de mon cou, comme si elles pouvaient faire quelque chose pour m'aider. Je ne veux pas avoir une crise, pas maintenant, ça montrerai ma faiblesse aux laborantins qui nous observent et ça pourrait signer mon arrêt de mort. Mais l'asthme n'obéit pas à ce que je veux et je me tord maintenant, la bouche grande ouverte, cherchant de l'air en vint.  

Un jeune homme s'approche de moi. Il semble un peu plus vieux, mais à travers mes larmes de douleur et de panique, je n'arrive pas très bien à le distinguer. Il se penche vers moi et pose une main douce sur mon dos. Il me murmure d'essayer de me calmer, d'essayer de respirer comme si rien ne m'en empêchait. Ma mère aussi me calmait de cette façon lorsque j'avais une crise. Avant, j'avais à me disposition un inhalateur pour m'aider, mais après la chute du gouvernement, plus aucun médicament n'a pu circuler dans le pays. J'ai dû apprendre à passer ces crises avec les moyens du bord, mais ma mère à toujours su prendre soin de moi. Et quand ce n'était pas elle, c'était Rosalyn, la professeure de l'école, qui me calmait. Mais aujourd'hui, il n'y a plus personne pour me venir en aide, sauf ce garçon, accroupi près de moi, qui demande aux jeunes autours de nous de s'écarter pour me laisser de l'air.  

Jusque là, soit les gardes et les médecins ne nous voyaient pas, soit ils nous ignoraient ou regardaient la scène avec curiosité comme si nous étions des rats de laboratoire, mais ils décident finalement de venir nous rejoindre. Ma crise est en train de passer et je remercie du regard mon sauveur, parce-que j'ai toujours la gorge nouée. Un homme à la poigne ferme m’attrape par le bras et me maintiens debout. J'aurai envie de hurler ou de me débattre, mais je n'ai pas assez d'air pour cela, néanmoins, la panique m'assaillit. Alors que mon asthme allait mieux, je me remet à suffoquer, plus fort encore. On me sort de la salle alors que le garçon qui m'a secourut exhorte mes gardes à me lâcher. J'entends un bruit sourd, je tourne difficilement la tête et je vois le garçon plier en deux sur le sol. Il a dû recevoir un coup de crosse dans l'estomac parce-qu'il n'y a pas de sang. Avant que la porte se referme sur moi et mes gardes, j'ai tout juste le temps de voir les adolescents réunit donner des coup à des gardes et hurler leur mécontentement, leur peur ou leur mépris.  

 

Un coup de feu.  

Le masque d'oxygène posé sur ma figure me maintiens dans les vapes. La grisaille est épaisse et le temps semble filer à une allure très invraisemblable. Des gens se pressent à mon chevet, je ne les connais pas et ils ne viennent pas pour pleurer ou s'enquérir de mon bien-être. Ils sont en blouses blanches et m'enfoncent des aiguilles dans le bras ou lisent des machines entreposées dans la pièce et qui semblent être reliées à moi.  

Quand j'émerge enfin de cette brume, je me découvre allongée dans une pièce immaculé de blanc et où plusieurs bip-bip de machine me tapent sur le système. Ma gorge me pique, mais je respire normalement. Un médecin vient me voir et m'assure que tout va bien et que je vais bientôt pouvoir retourner avec les autres. Il quitte la pièce avant même que j'ai eu le temps de lui poser des questions. Je me rendors, épuisée, et à mon réveil, je sursaute.  

La femme effrayante qui nous a accompagné en wagon-bulle est là, celle qui m'a menacé. Elle me regarde, la tête légèrement penchée sur le côté, semblant songer "qu'est-ce que je vais bien pouvoir faire de toi..." Elle m'apprend alors qu'il y a eu une micro-révolte après mon départ et que deux adolescents sont morts. Elle appuie bien sur le fait que c'est de ma faute et j'ai beau savoir qu'elle dit ça pour me faire du mal, je me sens terriblement coupable. Elle se lève ensuite et va jusqu'au pied du lit où je suis allongée. Elle attrape une feuille et lit mon nom. Nichola Osaikeen. Je reste silencieuse. Que me veut cette femme au juste ?!? Je sens qu'elle va encore une fois me menacer et ça ne loupe pas.  

"- Il me semble qu'il y a déjà une Osaikeen ici..." dit la femme, songeuse.  

Luane a donc survécu. Je devrais m'en réjouir, mais je me sens encore plus mal. Je sais ce que va me dire cette femme.  

"- Tu es très proche de ta sœur ?"  

Elle n'attends pas vraiment de réponse, elle sait que je tiens à elle, elle est le dernier membre de ma famille encore en vie, et que ça menace marchera. Comme je ne réponds rien, elle reprend :  

"- Tu ne voudrais pas qu'il lui arrive du mal, n'est-ce pas ?"  

Sa bassesse et sa méchanceté me dégoûte et je me retiens de lui cracher au visage.  

"- Je te donne donc un petit conseil : suis bien les règles. Tu verras, il n'y a rien de plus simple ici, je suis sure que c'est à ta portée."  

Elle me sourit et ses dents semblent être des crocs de loups immenses et effrayants, comme dans ces légendes du Sud que mon père me comptait quand j'étais enfant. Fenrir, le demi-Dieu.  

Avant qu'elle ne parte, je lui demande :  

"- Où est ma sœur ?"  

La femme se retourne, amusée de me faire souffrir encore un peu plus longtemps, puis lâche finalement :  

"- Ne t'en fais pas, tu vas la revoir."  

Je maugrée intérieurement. Il n'y a rien de moins sure avec cette harpie.  

 

Je passe encore une demi-journée dans cette sorte d'infirmerie, puis on m'autorise à sortir. On me conduit jusqu'à un dortoir où des vêtements propres m'attendent et on m'autorise à prendre une douche. Mais le traitement de faveur s'arrête là, parce-qu'après, je dois aller en salle d'entrainement. Sous l'eau tiède coulant sur ma peau, j'essaye de comprendre pourquoi est-ce que je ne suis pas encore morte. Ont-ils tant que ça besoins de soldats pour garder même les subversifs ? Mais je ne tarde pas à en comprendre la raison.  

Deux gardes me poussent à entrer dans une salle au plafond très haut. Des jeunes de mon âge sont présents, en lignes. Je m'installe en bout de file, bien docilement lorsque j'aperçois la formatrice. Je n'en crois pas ma yeux tellement elle a changé, et surement aussi parce-que j'étais persuadée qu'elle était morte. Même les paroles de l'horrible femme n'ont pas suffit à me ôter se doute, mais elle est bien là, en pleine forme. Luane. J'aurai envie de courir me blottir dans ses bras et lui dire à quel point elle m'a manqué, mais je dois faire bonne mesure et ne bouge donc pas. Mais mon sourire trahit mon impatience. Luane doit le voir puisqu'elle donne une consigne d'entrainement au groupe et demande à me voir. J’obtempère et la suit alors qu'elle fait signe aux gardes de nous laisser seule.  

J'hésite à l'enlacer, mais son regard me tiens à distance. Il est désormais dur, comme si elle allait me réprimander et c'est ce qu'elle fait :  

"- Il parait que tu poses quelques soucis, Nichola."  

Je piétine le sol, nerveuse. Je n'ai jamais aimé ce ton avec moi, comme si elle se prenait pour maman. Enfin, elle se radoucit.  

"- Tu sais que tu m'a manqué et que je suis plus que ravie de te revoir ?"  

Je n'en attendais pas plus et elle m'ouvre grand ses bras pour que je me jette dedans. Ils sont si chauds, si réconfortants. Nous restons ainsi plusieurs seconde avant qu'elle ne se dégage de moi, me forçant à la lâcher.  

"- Je t'en pris Nichola, tiens toi sage. Thrúd m'a dit que tu n'étais pas une facile, et je lui ai dit que je te reconnaissais bien là."  

Son ton est léger et dur à la fois. Cette Thrúd est surement la femme qui a menacé de faire du mal à ma sœur si je ne lui obéissais pas. Le visage de Luane se ferme soudainement.  

"- J'ai appris pour maman et Capsi. Je suis désolée que tu es dû vivre tout ça toute seule. J'aurai dû être là, mais j'avais du boulot ici tu sais. Les MS, c'est vraiment super, on a l'impression d'avoir un but dans la vie et d'être utile à notre pays."  

J'allai verser une larme, mais je me ressaisi, lâchant sa main, la fusillant du regard. Comment peut-elle dire ça !?! Ils lui ont laver le cerveau ou quoi ?!? Il ne faut pas être stupide, les MS sont une milice sanguinaire pour que le peuple reste soumis au gouvernement dictatorial. Même moi, qui n'ai pourtant que quatorze ans, je le sais ça ! Je suis tellement en colère que j'aurai envie de la frapper et de lui dire "mais ouvres les yeux, bon sang !", mais je me ravise lorsque que je me souviens de la menace de Thrúd et du poste qu'occupe Luane. Elle entraîne les nouveaux. Ça semble être un rôle important. Ma sœur n'est donc pas n'importe qui chez les MS ? Je préfère donc me taire et elle m'attrape par la main et me pousse dehors. Sur ses ordres, je vais rejoindre les autres et commence l'entraînement.  

 

Les jours et les semaines passent ainsi, sans fautes de ma part, je me tiens à carreaux. Mais, si au début j'étais heureuse de revoir ma sœur, aujourd'hui, je me dis que j'aurai préféré qu'elle soit morte en martyr, plutôt que complice des atrocités commises ici, car j'en suis sure maintenant, Luane n'a pas été victime d'un lavage de cerveau, elle reste là de son plein gré. Elle me présente ses amies, mais toutes me font froid dans le dos, si bien que je préfère les éviter. Un jour pourtant, à la cantine, je m'approche d'une fille seule à une table, qui boude son dîner.  

"- Je peux m'assoir là ?"  

La fille lève ses yeux embués vers moi et je la reconnais. C'était elle, la fille traînée dans la neige le jour de notre arrivée à Åsgard. Une belle balafre la défigure, signe des tortures qu'on lui a infligé, mais je ne comprend pas pourquoi est-ce qu'elle est toujours en vie après sa démonstration de rébellion. Néanmoins, j'aime sa compagnie, bien qu'elle ne dise absolument rien. C'est tellement reposant, de ne pas se sentir obligé de parler. Du coup, tous les soirs, je viens la rejoindre à cette table pour manger. Et un jour, elle prend enfin la parole et me parle de son enfance. Apparemment, c'est la bouillie qu'on vient de nous servir qui lui rappel son village natal. Moi, je ne vois pas la différence entre la bouillie d'aujourd'hui et celle des autres jours, mais la fille m'assure qu'elle est différente, elle sent un goût de poisson. Je goûte une bouchée, ferme les yeux, essaye de me rappelé le goût du poisson et le compare avec le goût de ce repas sans nom.  

"- Oui, peut-être", fais-je.  

En fait, je ne sens rien, mais je suis ravie qu'elle est parlé et j'ai soudain envie de plus la connaître. Je lui donne mon prénom et elle se nomme : Ulrika. A partir de ce jour-ci, elle et moi, on ne se sépare plus. J'évite néanmoins de la mêler à ma sœur et à ses amies, j'ai peur de ce qui pourrait se passer, mais plus j'apprends à la connaître, plus je suis convaincue que j'ai bien fait de me fier à elle et de penser que l'on pourrait être alliées pour sortir d'ici. Un soir, alors que l'on marche lentement jusqu'au dortoirs, je lui explique mon plan. Elle me regarde d'abords avec de grands yeux écarquillés, puis hoche la tête. Bien sur qu'elle est partante, elle n'a que cette idée en tête depuis qu'elle est arrivée dans ce camp. Une fois notre complot fomenté et que tout est prêt dans notre tête, nous nous lançons. Il fait très froid, mais la fuite devrait nous réchauffer.  

 

Honnêtement, je n'y croyais pas vraiment, je ne pensais pas qu'on réussirait, mais je ne sais pas par quel miracle, nous sommes sorties. Nous campons dans un bois, frigorifiées, mais nous sommes en vie et libres. Seulement, nous sommes perdues. Je pensais qu'il nous serait facile de trouver des habitations où se réfugier, mais ce n'est pas le cas. Nous n'avons croisé personnes, alors que nous marchons depuis presque une semaine. Le froid et la faim vont finir par nous tuer. Finalement, au petit matin, une main vient se coller sur ma bouche, tandis qu'une autre me soulève du sol. Ce ne peut pas être Ulrika, ni elle ni moi ne pouvons avoir autant de force après des jours sans manger ni beaucoup dormir. Je me retrouve bien vite avec un sac sur la tête, alors qu'on me pousse dans un engin bruyant à moteur. Les rotors derrière moi me laissent pensé à un Fer-Avion, mais je n'en suis pas certaine, si c'est le cas, c'est bien la première fois que j'en approche un d'aussi près. Le trajet est de courte durée et on nous porte maintenant dans un endroit tiède. Je me sens tout de suite mieux, même si je grelotte très fort. Quand on m'enlève la cagoule que j'ai sur la tête, je suis dans une pièce blanche, comme l'infirmerie à mon arrivée. Ulrika est là aussi. Je vois ma sœur de l'autre côté d'une vitre. Thrúd est là également, et je frissonne de plus belle. On m’ausculte brièvement, puis la chef diaboliquement charismatique entre dans la pièce. Elle me lance un regard noir, mais j'essaie de ne pas ciller devant elle, alors qu'à cet instant, je me sens comme un bébé qui va pleurer pour rejoindre les bras rassurant de sa maman. Elle se tourne ensuite vers Ulrika, et lui dit quelque chose de vraiment étonnant.  

"- Beau boulot, agent Bartke."  

Cette phrase tourne et retourne dans ma tête, puis enfin, tout prend son sens. Ma fausse alliée se lève et quitte la pièce, chancelante.  

"- Ulrika n'a jamais eu l'intention de s'enfuir."  

Ce n'est pas une question que je pose, c'est l'affirmation de quelque chose que je viens tout juste de comprendre. Thrúd me regarde avec mépris et elle jouit de s'être moqué de moi.  

"- Eh non, ma belle."  

Il n'y a rien d'affectueux dans ce surnom qui pourrait être si doux, mais qui est si répugnant venant d'elle. J'ai la tête qui tourne et j'ai soudain envie de vomir. J'avale une goulée d'air et la recrache très rapidement. Je me tourne vers un médecin prêt de moi, mais il m'ignore magistralement. J'aurai envie de lui crier : "Aidez-moi, je vous en pris, ne me laisser pas l'affronter seule !", mais je vois bien que ça amuserai encore plus cette harpie de Thrúd. J'inspire donc une nouvelle fois et me lance :  

"- Pourquoi ce jeu alors ?"  

Ma voix tremble, mais je ne peux pas faire mieux, et je suis tout de même satisfaite du résultat, un sang-froid apparent.  

"- Ah, ma pauvre Nichola, nous pensions que tu avais des sources parmi les rebelles, et qu'ils viendraient donc te secourir. Nous nous trompions, tu es bel et bien seule..."  

Sa dernière phrase a l'effet d'un uppercut dans mon estomac et je me cambre, l'envie de vomir revenue à la charge. Les minutes passent ainsi avant qu'une main familière ne se pose sur mon genoux.  

"- Nous devions savoir si on pouvait avoir confiance en toi ou non. Nous devions nous protéger. Mais tu as réussie le test, tu vas bientôt retourner avec les autres."  

A cet instant, j'admire la naïveté de ma grande sœur, qui m'avait juré, à la mort de mon père, qu'elle veillerait sur moi, et qui n'en a jamais été capable. Je lui prend la main, et la serre, très fort, parce-que j'ai l'impression que c'est la dernière fois que je la vois. Des sanglots m'échappent et je me laisse aller contre le siège. Je ferme les yeux et les ténèbres viennent m'envahir.  

 

Un pied sur ma figure. Des voix de garçons. L'un d'eux dit à l'autre de me lâcher. La pression sur ma joue se relâche tandis qu'un bras me redresse.  

"- Est-ce que ça va ?"  

Je reconnait ce visage. C'est celui du garçon qui m'est venu en aide quand j'ai fait une crise d'asthme.  

"- Excuse les manières de brute de mon ami".  

Il me désigne un autre garçon, du même age, mais beaucoup plus costaud.  

"- Je m'appelle Kylan et voici Lennart. Nous ne te voulons aucun mal, nous voulons juste parler."  

A ces mots, l'autre garçon crache au sol, en signe de mépris.  

"- Nous savons ce qu'il t'est arrivé. Ils t'ont torturés. Nous savons que c'est parce-que tu as essayé de t'enfuir et nous savons aussi que tu t'es fait avoir par Ulrika. Nous ne pouvions pas te le dire avant, ça aurait été trop risqué pour nous, mais maintenant que tu l'as appris par toi même, sache que la rébellion est proche." Hagard, je balance la tête. Il va trop vite, je ne comprend pas ce qu'il raconte. J'ai été humiliée, blessée, injuriée, ma sœur m'a trahie et tout ça pour rien ?!? Ça aurait pu être évité, c'est ça qu'il essaye de me dire ?!? J'enrage.  

Après être rentré à Åsgard, j'ai été torturé, en guise de punition. Maintenant qu'ils savent que je n'ai rien avoir avec les rebelles, ils me laissent en paix, simplement parce-que ma sœur a plaidé ma cause et parce-que Thrúd aime jouer avec moi et me voir souffrir. Me tuer serait trop simple et sans joie pour elle. Comme je suis inoffensive, elle peut me faire tout ce qu'elle veut.  

Une main sur mon épaule me sort de mes pensées bouillonnantes.  

"- Je suis désolée qu'il ai fallu en passer par là, mais maintenant, tu es fin prête à nous rejoindre. Tu es endurci et plus déterminée que jamais à mettre fin aux camps d'entrainement des MS et au gouvernement totalitaire, je me trompe ?"  

Ce garçon a l'air de savoir de quoi il parle et surtout, il me fait confiance. Mais désormais, je suis méfiante. Une Ulrika m'a suffit. Je vais avoir besoins de preuves. Kylan comprend et m'invite à une réunion très secrète. Rejoindre la rébellion est dangereux, mais je balaye ces inquiétudes du revers de la main. Ces tyrans m'ont tout pris, de mon innocence à ma famille, alors je me battrai désormais jusqu'au bout.  

"- C'est tout ce que j'avais besoins d'entendre", me dit-il, avant de me conduire à leur foutue réunion.  

Mon destin se joue maintenant, et avec le miens, celui de tout le pays.  

Scénario : (3 commentaires)
une série A de science-fiction (Science-fantasy) de Mike Bay

Conrad Kelly

Jessie Forden

Weston Drexler

Francesca Ayres
Avec la participation exceptionnelle de Mallone et Gilmore Gray, Dylan LaSalle
Sorti le 29 décembre 2023 (Semaine 991)
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