Il n'y a que le ciel sombre et capricieux. Il n'y a que les crevasses creusées dans le sol par de trop long mois de sécheresse. Il n'y a que les arbres morts, dépourvus de vie et de couleur. Soudain, un éclair déchire violemment le ciel sombre et s'amuse à chatouiller le cime des arbres noirs. Le tonnerre retentit alors, assourdissant. Une fouine prend peur et s'enfuit le plus rapidement possible, aussi loin que ses pattes lui permettent. Le ciel commence alors à verser ses premières larmes, épaisses et glacées. Les rats aussi fuient l'eau. Quand la première goutte toucha le sol, il n'y avait plus que les corbeaux.  

Amélie (Ines Ballard) n'arrête pas de se tordre dans tous les sens. Elle essaye de se rendormir, en vain. Après tout, il ne doit pas être plus de huit heures. Résignée, elle ouvre finalement les yeux. Pour les refermer tout de suite. Puis les rouvrir. Toujours en vain. Sa vision n'avait pas changé: elle n'était toujours plus dans sont lit. Lentement, elle se redressa. Un frisson parcouru alors tout son corps, prenant grand plaisir à lécher l'échine de la jeune femme. Amélie avait froid. C'est seulement à partir de ce moment qu'elle se rendit compte qu'elle était trempée. Et sale. Comme si ses vêtements avaient traîné dans la boue. Et pour cause: ils avaient bel et bien traîné dedans. Elle releva la tête et aperçu des corbeaux volant au loin dans l'orage.  

Bravant la pluie, le vent et le froid, Amélie avançait dans cette longue étendue désertique, seulement entrecoupées d'arbres morts et sinistres. Il n'y avait pas d'endroit où s'abriter en attendant que cesse la pluie. Pas d'animaux pour lui tenir compagnie non plus. Si; il y avait ces corbeaux, mystérieux, qui semblaient toujours la suivre où qu'elle aille. Amélie n'aimait pas beaucoup ça. Cela lui donnait un mauvais pressentiment. Mais elle n'avait pas d'autre choix que de marcher, marcher, jusqu'à trouver un endroit, ou quelqu'un dans ce lieu perdu et certainement inconnu.  

Des heures durant, Amélie avait marché. Sans jamais voir autre chose que le paysage désertique. Sous une pluie battante, accablée par la fatigue, elle se laissa tomber sur le sol ramolli enfin par la pluie. Alors que, éprouvée physiquement et mentalement, ne comprenant pas ce qui se passait, Amélie sanglotait, un homme encapuchonné (Barry King) s'avança près d'elle. Il lui pressa les épaules et l'aida à se relever. Pas un mots. Ni l'homme, ni Amélie n'osait parler. L'homme montra alors un endroit derrière Amélie du doigt. Elle se retourna et aperçu un corps sur le sol.  

Amélie s'était précipitée auprès du corps. Un mèche de cheveux grisonnante barrait le visage meurtri de l'homme. Amélie l'écarta en tremblant. Puis elle poussa un cri. Le cri du désespoir. C'était son père (Patrick Maidstone). Il avait le regard vide. Le teint livide. Il était mort.  

De rage, Amélie se retourna vers la silhouette encapuchonnée et lui hurla:  

- Que lui avez-vous fait!?  

L'autre répondit simplement et calmement:  

- Rien et tout à la fois.  

Sous le regard effaré, choqué, d'Amélie, l'homme lui tourna le dos et s'en alla s'appuyer contre le tronc d'un arbre noirci. Les corbeaux arrivèrent alors en masse sur le corps sans vie du père et commencèrent à le déchiqueter.  

Amélie courut le plus loin possible, pour échapper aux terribles oiseaux.  

«Une sortie, il doit bien y avoir une sortie!», s’exclamait la jeune femme. Des bruits de pas se firent entendre derrière elle. L'homme de tout à l'heure était de nouveau là.  

- Oui, il y en a une.  

- Dites-moi où, alors!  

- Non. Cependant, je peut vous dire que c'est en cherchant que l'on trouve.  

- Sans blague? Mais vous, vous semblez ne pas chercher!  

- Non, car je n'en n'éprouve pas le besoin, voyez-vous.  

Il s'effaça de nouveau, laissant Amélie à ses pensées et en plein désarroi.  

Il n'y avait que la pluie qui cessait. Il n'y avait que le ciel qui s’éclaircissait. Il n'y avait que le destin qui s'assombrissait, inévitablement. Le destin d'Amélie. Elle errait dans ce «désert», sans savoir où aller. Elle cherchait une sortie, existante mais inconnue. Elle ne connaissait pas non plus le sort qui avait été réservé à sa sœur aînée (Alice Andrews). Ce sort funeste qui rejoignait celui de son père. Ce sort conjoint à tous ceux, qui, un jour, ont manqué de respect à ce corbeau. Ce corbeau qu'Amélie a rencontré tout à l'heure.  

Il n'y a que l'homme qui s'est transformé en corbeau, et s'est perché sur une branche, observant les alentours. Il n'y a que le sang sur cette terre ocre. Il n'y a que le puissant Royaume des Corbeaux qui se dresse face à Amélie.