Cinejeu.net : devenez producteur de cinéma ! (jeu en ligne gratuit de simulation économique)

Misterdada Studio présente
L'éternité

***  

L'équipe de Misterdada Studio est fière vous présenter une collaboration avec InShadow Production™.  

***  

 

Rapport de l'ordinateur de bord :  

Localisation : inconnue.  

Date : inconnue.  

Météo : inconnue.  

Température : inconnue.  

Information(s) complémentaire(s) : Erreur.  

 

Aucun spectre de lumière, aucune parcelle de clarté. Il n'y avait pas de soleil. D’ailleurs il n'y avait pas de ciel, il n’y avait rien. Tout se confondait sous une unique chute de noirceur. Une ombre opaque. Le noir le plus complet.  

Mais un air étrangement respirable.  

 

Axel (Leonardo Scherzo) se leva douloureusement. Alors qu’il recouvrait son esprit, il reconnût la pièce dans laquelle il se trouvait. Tout ce qui était parfaitement ordonné quelques minutes plus tôt n’était désormais qu’un immonde amas. Il se souvint alors de vives secousses, puis des frictions terribles qui l’avaient fait heurter brutalement les parois de la pièce. Il se souvint également d’un prodigieux vrombissement, d’un grave écho. Il se diriga vers le hublot et tenta d’examiner ce qui s'étendait sous ses yeux. Peu à peu ses yeux s'accommodèrent. Une lueur inconstante et diffuse, dont il ignorait la source, guida son regard. Le paysage semblait désert, figé. À une centaine de mètres de leur position, il aperçût d’immenses agrégats rocheux. Un horizon funeste se déroulait devant lui. L’habileté acquise par des mois d'entraînement pour mener cette expédition ne les avait pas sauvé. Aucun des membres du vaisseau n’avait pu empêcher ce terrible accident. Une anomalie technique. Perfection du système... sécurité absolue... C’était pourtant une parfaite machine qui le conduisait vers le début de la fin de sa vie, songea Axel. Il trouva cette pensée déprimante et détourna le regard. Il fixa une bouteille d'eau - il aurait sûrement soif.  

Lorsqu'il sortit de la pièce, il découvrit le corps de son ami Paul, son voisin de chambre. L'odeur de la chair calcinée lui monta dans les narines. Se tenant le ventre, il reprit son chemin vers l'avant du vaisseau. L’espoir de trouver des survivants le faisait avancer. Les sordides visions se multipliaient. Ce n’est qu’en pénétrant dans une nouvelle nacelle qu’il découvrit l’unique survivant. Il s'agissait de Charles (Alan Pover), le capitaine du vaisseau, qui ne cessait de gémir de douleur. Axel chercha l'interrupteur afin d’étudier la blessure du pilote mais les néons ne s'allumèrent pas. En regardant autour de lui, il devina que le vaisseau était complètement mort, que l'équipage ne pourrait jamais repartir. Il se savait condamné.  

 

Seul, Axel entraîna Charles dans une pièce plus sûre, une sorte de vestiaire. Il s'assura de ne pas le blesser davantage et vérifia qu'il ne souffrait pas d’autres contusions. La pièce était grandement endommagée, comme l’ensemble du véhicule spatial, mais elle ferait l'affaire, en attendant. Une épaisse poussière recouvrait le sol, jonché de débris. Alors qu’Axel calait son collègue sur une chaise, un bruit sourd se fit entendre dans une pièce avoisinante. Certainement le couloir. Tel un somnambule, dépourvu de réflexion mais animé par l’effroi, Axel se dirigea vers la porte. L'impression de se sentir dans un mauvais rêve ajoutait à cette étrange sensation.  

Il glissa un regard vers le couloir.  

À l’origine de ce son, une femme. Celle-ci était à l'agonie. Elle essaya de tenir debout en se tenant contre le mur, du bout de son bras ensanglanté. Elle boitait sévèrement mais parvenait tout de même à se mouvoir. Il s'agissait de Lucy (Kara Milovy), une collègue des deux hommes. Axel avait finalement été grandement épargné ; une douleur au dos et aux côtes, rien de plus. Il pouvait marcher normalement mais n’osait pas trop forcer sur les bras. L’ayant reconnu, Lucy lui demanda de l'aide d’une faible voix et il s’exécuta en la menant aux côtés de Charles.  

 

Les minutes passèrent mais personne ne dit un mot. Les trois collègues réalisaient peu à peu qu'ils étaient perdus dans l’espace, immobilisés sur une planète qui leur semblait inconnue. Leurs regards ne laissaient aucune place à l’espoir. Bientôt, la nourriture, l'eau et autres vivres capitaux pour leur survie manqueraient. Il ne restait qu’à définir ce « bientôt » et attendre ; des heures, des jours, des semaines.  

Doucement, tout doucement, les uns se forçaient à observer les autres et à regarder, dans les yeux, le visage obscur de la mort.  

Soudain, la voix calme de Charles se fit entendre et Lucy se mit à pleurer doucement, non de douleur mais d’effroi.  

- Je ne survivrai pas longtemps. Il faut que vous réunissiez vos forces, que vous trouviez de quoi contacter la base. Il faut que l’on vous retrouve.  

Le silence s’empara une nouvelle fois de la pièce, enveloppant les trois survivants. Charles ne devait même pas accorder de crédit à ses propres dires. Ironique qu’un condamné manifeste tant d’espoir. S’il s’étaient, tous trois, préparés à réagir face à toute éventualité technique, ils ne savaient comment aborder cette faiblesse émotionnelle.  

- Système infaillible, parfaits taux de réussite ... Il s’est passé quoi, bordel ? lâcha Axel.  

Le pilote ferma les yeux, serra les poings et se concentra.  

Tout est si nébuleux, si confus. Violence et mutisme, abîme et désordre.  

Il ne se souvenait pas pour quelle raison le vaisseau était subitement devenu incontrôlable. Il ne savait rien. Le trou noir.  

 

 

[...]  

 

- Tu m'offres à graille ? demanda Mike (Lucas Gueye) en exhibant un odieux sourire - éclairé ici et là par des implants dorés.  

Voilà plusieurs jours qu’Heath (Michael Post) ne l’avait pas croisé (il en avait d’ailleurs tiré un certain ravissement tant le personnage lui foutait un terrible cafard). Mike s’était en effet retiré, seul, cloitré dans une cabine, ne fournissant à ses collègue aucune explication.  

- Tâchons d’en garder un peu... au cas où... Puis, on ne sait pas s'il y a d'autres survivants.  

- ‘plus que nous. Tout le monde est mort, j’ai vérifié, rétorqua Mike sereinement.  

Heath n’en était pas aussi convaincu mais garda ses incertitudes pour lui. Il lui semblait vain d’objecter.  

Mike ne lui avait jamais paru aussi troublant. Ce sourire, cette voix... Rien ne différait d’à l’accoutumée. Mike se comportait très banalement et c’est en cette allure très ordinaire que résidait son absolue perversité.  

- Tu n’as donc croisé personne ? s'enquerra Heath  

- Personne, non. Mais on m’a dit que la Mort n’était pas très loin...  

Heath avait une pleine conscience de la catastrophe qu’il vivait mais l’absolue lucidité de son interlocuteur le glaça un instant. Il ne donna d’ailleurs aucune réponse tant l’aigre ironie de Mike l’effrayait.  

 

Tout près d’eux, dans la pièce voisine, une jeune femme suivait leur conversation. Étalée sur le sol, Sarah (Joanna Lawrence) aurait aimé manifester sa présence à ses collègues mais elle en était incapable. Depuis l’incident, le moindre geste lui semblait être un impossible accomplissement. Elle en avait déduit qu’étant tout de même encore sensible, elle se trouvait dans un état de paralysie quasi parfait. Une plaie béante creusait son visage, mais Sarah était incapable d’exprimer l’ineffable douleur qui la parcourait. Elle retenait simplement son souffle - elle en aurait besoin.  

Le long de ses jambes se trainait une forme visqueuse, une eau luisante. Elle sentait cette chose glisser sur sa peau découverte mais demeurait impuissante. La masse aqueuse progressait vers le haut du corps, avançait insensiblement, sans faire un bruit. Puis le liquide se hissa au dessus du visage figé de Sarah, avant de s’engouffrer dans la sanguinolente faille qui fissurait le faciès de la jeune femme. Terrassée de douleur, elle manqua de s’étouffer dans un inespéré toussotement, alertant ainsi ses deux partenaires.  

 

- Sarah ? Sarah, tu m’entends ?  

Semblant peu à peu émerger, s’extirper de l’état de conscience minimale dans lequel elle avait été trouvé, elle se mit à remuer les lèvres :  

- J’ai soif, j’ai faim… donnez-moi de l’eau, donnez moi de l’os...  

 

[…]  

 

Depuis l’incident, Heath passait son temps à errer dans les galeries du vaisseau. Il poursuivait l’espoir de trouver la plus infime denrée, inspectant sans cesse les mêmes lieux, soulevant continuellement les mêmes débris. Le conteneur renfermant l’intégralité de leurs stocks alimentaires avait explosé lors du sinistre. Le système d’approvisionnement nutritif par perfusion intraveineuse était désormais foutu. Les fonds de poche avaient suffit au début. Incapable de se projeter, il avait rapidement cédé à son déraisonnable appétit. Le début de la faim.  

Plaies purulentes, viscères délogées et fragments de chair s’entassaient. Cette chose avait été, quelques jours plus tôt, animée par un souffle de vie. Cette chose avait porté le nom de Christopher. Une valse sanglante - ou défaillance de l’autopilot - l’avait quelque peu esquinté. Il n’était désormais qu’une carcasse déstructurée, qu’une masse de viande, de viande fraiche.  

Heath maintenait son regard. Il se tenait prostré à quelques mètres du corps de son défunt collègue et ne semblait nullement atteint par le dégout qu’inspire généralement ce genre de scène.  

- Une bouche de moins à nourrir... finit-il par conclure avant de reprendre son chemin en direction de la nacelle T4, où le restant de l’équipage s’était rassemblé.  

 

Ils s’étaient lentement réunis à la suite du crash, constatant que sur les très nombreux membres de l’effectif initial ils n’étaient plus que six... Aucun son ne raisonnait, ou presque. Les mots n’échappaient que trop rarement de la bouche des survivants, comme si ceux-ci souhaitaient en faire l’économie. Et ainsi le temps semblait s’écouler paresseusement.  

Lorsqu’Heath rejoignit ses collègues, des paroles étaient exceptionnellement échangées. Elles l’étaient rarement dans un climat serein de bonne entente et il lui sembla alors évident qu’une nouvelle dispute venait d’éclater. Comme toujours, le sujet de la contrariété était le partage de la nourriture. Tout était examiné, mesuré, pesé. Pourtant, chaque jour un nouveau différend se fondait sur une prétendue iniquité. L’individualisme était exacerbé. Mais en dépit de ces pulsions primaires de survie, tous donnaient l’impression de se soumettre à l’inéluctable. La nacelle T4 serait leur tombeau, leur mausolée spatial …  

Seule Lucy continuait d’envisager l’avenir, concentrant ses efforts à la restauration de la radio. Rien n’indiquait pour l’heure une quelconque amélioration mais qu’avait-elle à perdre ?  

Sarah ne semblait, quant à elle, aucunement consciente de ce qu’ils enduraient. L’établissement d’une communication éclairée et lucide avec le restant de ses associés ne se faisait qu’en de très rares occasions. Elle se contentait en fait de réclamer de l’eau - de l’os ?, en scrutant le plafond. Bien que l'équipage entier était mal en point, la vue de la dégradation du corps de leur collègue était ce qu'il y avait de pire. Charles s’était personnellement promu "principal veilleur" et consacrait tout son temps à la surveiller. Il portait une attention naturellement bienveillante à cette jeune fille qu’il avait toujours chaperonné au cours de leurs missions communes.  

À plusieurs reprises, Mike avait affirmé qu’elle n’était qu’une éprouvante charge. Si personne d’autre n’osait se l’avouer et admettre ces propos, il était évident que Sarah épuisait, seule, une grande partie des réserves d’eau. Mike invoquait également le bien être de la jeune femme ; consentait-elle à être maintenue dans un tel état ?  

 

Un récent effondrement avait condamné l’accès au réfectoire. S’ils avaient amassé des vivres dans leur cabine, un nouvel approvisionnement semblait nécessaire. Axel, Heath et Mike se dévouèrent pour rétablir la voie les menant à la sacrosainte mangeaille. Alors qu’ils se préparaient à partir, Sarah entrouvrit les yeux et murmura quelque chose à destination de Charles, qui s'approcha pour mieux l'entendre.  

 

Le parcours leur semblait long. Infini. La menace d’un nouvel éboulement était permanente. Ils avançaient péniblement. La quête du Graal s’étala sur une dizaine de mètres, au milieu de laquelle ils firent une pause. Ils croisèrent plusieurs cadavres. Leur état de décomposition était tel qu’ils éprouvèrent une réelle difficulté à inspirer nettement. Dépourvus de matière, les organes de digestion d’Axel, Heath et Mike se tordaient. Les contractions étaient de plus en plus vives. Heath semblait tout particulièrement subir la disette ; son regard glissait, examinant tout ce qui pouvait être digeste.  

Soudain, alors qu'ils tentaient de soulever un immense bloc métallique leur faisant obstacle, ils entendirent d'effroyables cris en provenance de la nacelle T4.  

 

Le spectacle était abominable ; agrippée au cou de Charles, la mâchoire de Sarah s'emplissait de sang. Alors qu'il hurlait continûment de douleur, sa voix se mit à se tordre, avant de s'éteindre ; sa pomme d'Adam venait de lui être arrachée. Son visage déformé par la douleur se figea tandis que Sarah continuait de s'en faire un délice...  

Elle allait bientôt attaquer les os.

Scénario : (2 commentaires)
une série A de science-fiction (Horreur) de Julia Cummings

Leonardo Scherzo

Kara Milovy

Lucas Gueye

Joanna Lawrence
Avec la participation exceptionnelle de Michael Post, Alan Pover
Musique par Wolfgang Buchanan
Sorti le 04 juin 2033 (Semaine 1483)
Entrées : 23 359 969
url : http://www.cinejeu.net/index.php?page=p&id=54&unite=fenetre&section=vueFilm&idFilm=18209