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Guards Brothers présente
Weird Tragedy

Gérardmerveille - Futur plus ou moins lointain  

 

Un passant lambda aurait dit en la voyant qu'elle était furieusement belle - ou sexy, suivant son éducation. Quoi qu'il en soit, elle était étincelante sous cette pluie diluvienne qui faisait retomber ses longs cheveux mouillées sur ses épaules enveloppées dans son costume outrageusement moulant. Peut-être qu'un homme un peu aventureux se serait-il arrêté près d'elle pour lui demander son nom ? Elle n'était réellement pas du genre à répondre, de plus, elle n'en possédait pas.  

Mais aucun passant n'allait la regarder ni lui demander son nom, tout simplement parce qu'elle se trouvait en haut d'un immeuble de quelques centaines d'étages, à lorgner autour d'elle la nuit éclairée des multiples réverbères et fenêtres se trouvant plus bas. Elle n'avait aucune intention de se suicider, mais d'une certaine façon, l'acte qu'elle se préparait à commettre pouvait se rapprocher d'un suicide - la mort en était l'un des thèmes et les conséquences d'un tel acte pouvait, si elle faisait une erreur, s'avérer être mortels.  

Un quelconque spectateur à cette scène plutôt originale n'aurait sans doute pas remarqué l'arme qui se tenait à ses côtés, car il aurait été fasciné par sa beauté, en tout cas jusqu'au moment où elle tendit la main vers ce qui semblait être un sniper et le tende devant elle, visant un building, au loin, dont elle n'aurait sans doute pas put apercevoir les occupants sans la lunette d'élite dont disposait son arme. Le viseur était droit bloqué sur la tête de l'homme désormais. Cet homme, président de l'une des plus grosses sociétés de productions cinéma de la ville. Cet homme, au nom que chaque habitant de l'île avait sur le bout de la langue, le qualifiant tantôt de « génie », tantôt de « grand homme ». Mais cette hypocrisie collective allait bientôt s'achever.  

Dans quelques instants.  

 

On ne parlait plus que de ça dans les journaux. La mort du magnat du cinéma avait choqué chacun des Gérardmerveilleux. James plus que tous. Alors qu'il tournait il y a encore deux ans dans des pauvres séries B sortant dans quatre salles et faisant à peine un million d'entrées, il venait juste d'être engagé dans une production de qualité ambitieuse, « Remember the Fallen », justement produite par le défunt.  

James ne se faisait plus d'illusions - c'était clairement foutu maintenant. La fortune colossale de l'homme allait rejoindre celle de son fils, exilé en Europe, et la succession à la tête de la production allait être décevante, puisqu'il n'y avait personne d'intéressant en remplacement : ça allait se jouer entre cet ancien réalisateur à succès complètement fauché et opportuniste, et l'adjointe du macchabée. C'était la fin de la boîte, c'est sur.  

Restait encore ce contrat proposé il y a deux mois par la concurrence pour doubler une série d'animation sur SPAM TV. Mais ce projet aussi était compromis, depuis le temps ils avaient surement dut proposer à un autre prodige qui avait sans doute accepté sans broncher. Car lui n'avait pas reçu d'offre de l'ex-plus grande société de production du monde.  

James poussa les portes de la production. C'était celle qui se trouvait à l'arrière, bien entendu. Devant, il y avait une marrée de journalistes. Un agent de sécurité lui indiqua le chemin et il se retrouva dans une salle d'attente improvisée, en compagnie de nombres de gens du métiers, dont plusieurs têtes lui étaient connu. Ce vieil homme là, il n'avait pas tourné dans un film de super-héros de son enfance... Un truc avec des méchants communistes... Une femme s'approcha de lui. Il la reconnu tout de suite, elle était l'une des nombreuses secrétaires de cet immeuble. Elle l'interpella et commença à lui parler d'un ton précipité :  

« Suivez-moi. »  

Elle le fit entrer dans une pièce adjacente où se trouvaient déjà bien dix personnes. S'attendant à retrouver les têtes connus de « Remember the Fallen », réunis ici pour leur dire que le projet était avorté, il se trouva entre nombre d'éminents conseillers du producteur. Ils le regardaient tous sans broncher. Un vieux avec une grosse barbe s'approcha de lui et lui serra la main en disant :  

« Je suis Herbert ***. J'étais le plus proche ami de notre défunt président. J'imagine que vous vous demandez à quoi rime votre présence ici : elle est pourtant très simple. Nous avons besoin d'un acteur que nous avons engagé récemment, de préférence quasiment inconnu du grand public. »  

James le dévisagea. Pourquoi avoir besoin de lui ? Allait-il être engagé sur une production encore plus importante ? Mais ses réflexions furent coupées par Herbert, qui continua :  

« Je ne sais pas si vous les avez reconnu, mais ici se trouvent la plupart de nos concurrents dans l'industrie cinématographique de Gérardmerveille, représentés par leur président en personne ou par l'un de ses conseiller. Nous venons de discuter pendant plusieurs heures au sujet de la mort de notre cher ami. Puisqu'il faut j'imagine signifier un élément important concernant sa mort, sachez ceci : il n'est pas décédé d'un arrêt cardiaque comme relayé par la presse, mais il a été tué par balle depuis un immeuble voisin. »  

James déglutit. Il ne savait toujours pas en quoi tout cela le concernait et la raison de sa présence ici avec des personnes si éminentes mais la nouvelle du meurtre l'avait considérablement choqué. Il n'eut pas le temps de réfléchir d'avantage.  

« Nous sommes prédisposés à croire, selon des indices d'une importe capitale que nos enquêteurs ont découvert, que l'assassin provient de l'industrie pornographique de Gérardmerveille. Nous avons besoin de vous pour infiltrer ce milieu. Il est bien stipulé dans votre contrat que vous ne pouvez refuser sous peine d'un licenciement. Vous serez grassement payé. Vous vous présenterez sous votre vrai nom et direz que nous vous avons renvoyé et que votre dernier espoir est de vous tourner vers ce genre de cinéma. Vous serez engagé sur un film de chez ***, et tenterez d'en savoir plus quand à cette histoire. Compris ? »  

Herbert avait parlé d'une traite. Il fallut à James plusieurs secondes pour tout assimiler. La surprise et l'incompréhension la plus totale devaient sans doute se lire sur son visage et il ne pensait plus qu'à une seule chose : sortir de cette salle. Mais pourtant, quelque chose l'en empêchait. Il ne savait quoi : l'argent, la gloire, le fait de se trouver devant tous les plus grands producteurs de la ville, le sexe... Alors, dans un élan de bêtise et d'inconscience, il répondit :  

« Je suis partant. »  

Même Herbert sembla étonné de sa réponse. Mais il se ressaisit et déclara, pour ses dernières paroles face à James : « Très bien. Vous verrez de plus amples détails avec ma secrétaire. » Celle qui l'avait amené ici, sans aucun doute.  

 

*** Productions était ce qu'on pouvait lire sur cette grosse bâtisse. Devant, deux hommes qui avaient l'air plus ou moins d'agents de sécurité. L'un fumait, mais ce n'était surement pas du tabac, l'autre était plongé dans un livre que James reconnu comme étant « La Naissance de la tragédie ». Il s'avança vers eux d'un pas assuré et arrivé à deux mètres, le fumeur sembla le repérer. Il le regarda avec un rictus qui déclara d'un air jovial « Tu veux baiser Rococo ? Putain on en voit tous les jours des mecs comme toi. Allez, rentre. » Il poussa la porte et ce fut la surprise : alors que le bâtiment délabré vu de l'extérieur laissait présager un intérieur glauque un peu comme dans tous les films qui se déroulaient dans ce milieu tabou, les couloirs étaient propres, aux murs d'un blanc étincelant, semblable à un hôpital. Pourtant régnait une odeur assez particulière, James la connaissait, mais il n'arrivait pas à mettre le nom dessus.  

Un homme assez jeune, voir plus jeune que James lui même, s'approcha alors de lui. « Tu veux un contrat ? Suis-moi, je suis Kyle ***, enchanté. Adjoint aux productions de science-fiction et d'heroic fantasy. Parfois dans le policier mais vu qu'on en fait de moins en moins... Bon, allez, suis-moi. »  

James suivi Kyle jusque dans un bureau. Ils s'assirent et James récita presque par coeur le texte qu'il avait appris avec la secrétaire. Histoire très touchante, par ailleurs, où il était question de son père décédé à la guerre et plein de choses qui l'avait fait se révolter contre l'industrie du cinéma tout publics... Kyle l'accueilli à bras ouverts et lui fit signer un contrat qui contenait des clauses relativement sérieuses concernant les maladies sexuellement transmissibles, mais d'autres un peu plus loufoques qui avaient pourtant un intérêt dans le type de productions que livrait la société.  

Mais la discussion qu'ils avaient entrepris fut couper par un appel téléphonique. Kyle répondit et après seulement quelques secondes durant lesquels il ne dit mot, il regarda James et lui dit d'un air très calme :  

« Encore un, le président de la *** Prod a été retrouvé mort il y a dix minutes. En pleine rue. Une balle dans la tête. »  

 

Elle regardait avec beaucoup d'intérêt les policiers arriver. Personne ne lui prêtait attention. Elle se trouvait en hauteur, c'est surement pour ça, et très loin d'où elle avait tiré. Il devait y avoir bien vingt véhicules désormais, sans compter l'ambulance. La foule qui s’agglutinait autour était retenue par de pauvres policiers inconscients de l'ampleur de ce cadavre.  

Elle crut un instant qu'un homme l'avait repéré, mais un instant après il détourna son regard qui se focalisa sur un policier qui s'occupait à le faire reculer.  

Elle descendit par derrière l'immeuble, prenant garde de cacher avec soin son arme. Elle rentrait à la maison.  

 

Kyle faisait visiter tout le bâtiment à James, qui était un peu nerveux. Deux meurtres, un troisième demain ? Il écoutait à peine Kyle qui lui présentait désormais la salle de classe reconstituée qu'il jugeait lui même « Très réaliste mais un peu odorante. » Ils parcoururent nombre de couloirs. Le bâtiment faisait à la fois office de bureau de production et de studios, et était bien plus grand qu'on aurait put le croire de l'extérieur. Ils croisèrent nombre de personnes qui n'avaient pas l'air très clair : des filles presque nues, semblant avoir abusé de substances illicites, et des mecs tout aussi louches, dont certains étaient déguisés de costumes très moulants. Mais à un moment, une femme passa. Elle n'était pas vraiment comme les autres, plus gracieuse, plus jolie, presque normale. Elle paraissait un peu comme un tâche dans cet environnement qui n'avait pas l'air d'être le sien. Elle et Kyle s'échangèrent un regard et elle continua sa route dans le long couloir.  

Ils terminèrent la visite à environ dix-neuf heures et Kyle lui annonça qu'il n'avait qu'à revenir demain, il avait un rôle à lui proposer. Un rôle majeur dans une production fantastique, disait-il. Sur ce, il laissa James partir.  

 

« Ça c'est TRÈS bien passé! C'était parfait, hein Sophia ? Bon on tourne le reste, demain. Je t'ai pas demandé : tu veux que ça soit ton véritable nom qui apparaisse au générique ? Tu préfères peut-être un nom de scène, par exemple je trouve que James le Torpilleur ça sonne très bien. Réfléchis-y ce soir, mais tu me donnes ta réponse demain ? »  

James sorti de la salle représentant l'intérieur d'un château fort, laissant Kyle et Sophia seuls. Il remonta le couloir et sorti du bâtiment de production, passant entre les deux gardes. Le fumeur lui adressa un sourire, entre moquerie et sympathie pour lui.  

James marcha quelques mètres dans la rue. Mais alors il la vu. La fille d'hier, qu'il avait croisé dans le couloir. Elle marchait d'un pas pressé et traversa la rue d'en face. Il pleuvait des torrents d'eau et les réverbères éclairaient autant que les lumières lointaines du centre-ville.  

James mit sa capuche pour camoufler son visage, et dans un geste inconscient, entrepris de suivre la jeune femme. Il se tenait sur le trottoir d'en face. Elle l'intriguait, il voulait en savoir plus : elle semblait assez bien habillé pour n'être pas dans le besoin, avait encore moins l'air d'une actrice de genre. Et pourtant elle venait dans les locaux de *** Productions.  

Il marcha bien vingt minutes avant de remarquer un changement de comportement sur la jeune femme. Ils étaient depuis arrivés dans le centre-ville, après avoir pris le métro. Il y avait beaucoup de monde et il était plus complexe de la suivre. Elle pris une rue plus sombre qui n'était empruntée par personne. James la vit monter une échelle dans une recoin de celle-ci, et lorsqu'il fut hors de vue, intrigué par cette démarche, décida de la suivre.  

Il monta à son tour à l'échelle qui semblait mener à un toit. Une fois en haut, il la vit, au bord du building, debout. Il se dit tout de suite qu'elle allait se suicider mais elle n'en avait pas l'air. Elle fixait l'horizon. Elle était furieusement belle. Étincelante sous cette pluie diluvienne qui faisait retomber ses cheveux sur son costume outrageusement moulant qui apparu à James après qu'elle ait retiré son gros manteau.  

C'est alors que James remarqua un objet qu'il n'avait pas vu la première fois : une arme, grande, sophistiquée, belle, comme sa propriétaire un peu. Il ne réfléchit pas pendant quelques instants, ébahi par sa découverte, puis lui vint à l'esprit les ressorts de sa mission.  

Elle prit l'arme à côté d'elle et la pointa vers un immeuble au loin. James le reconnu tout de suite, c'était celui de *** Studios. Il n'eut pas le temps de réagir qu'elle avait déjà tiré. Il arriva derrière elle et s'exclama : « Pourquoi ? »  

Elle ne sembla pas surprise de la présence de James et se retourna lentement vers lui en gardant toujours son arme à la main.  

Elle souriait. Pas un sourire maléfique comme on en voit dans les films avant que le grand méchant fasse un coup dans le dos au héros, mais plutôt un sourire romantique, un peu comme dans ces films sentimentaux d'amour impossible, sans cesse récompensés aux GM Awards. Elle ouvrit alors la bouche et répondit d'un ton calme.  

« Pour quoi, pour qui ? On est toujours à poser ces questions. C'est pour nous, pour toi, pour moi, pour Sophia. Pour tous. Tous ces hommes qui vendent des rêves au profit de sommes d'argents immenses, alors que tous ces rêves le resteront pour l'éternité. Seul la mort peut nous séparer de cette propagande faite à nos esprits d'espoirs et de choses dans lesquels ont peut croire, tout en s'enrichissant et en prenant le contrôle de notre esprit. Tu pourras le raconter à Herbert, et à tous les autres. Ils sont comme tous les autres, ils croient que tout se règle par l'argent. »  

Elle s'était approchée de lui pendant qu'elle parlait. James se disait au fond de lui que son discours n'avait finalement aucune cohérence, mais quelle importance ? Puisqu'à ce moment ci, elle l'embrassa.  

Comme dans un film.  

 

 

Ezra Semagne est Elle  

Karl Klimek est James  

Ewan Amen est Kyle  

Chiara Donaldson est Sophia

Scénario : (3 commentaires)
une série B de science-fiction (Utopie ou Dystopie ? ou alors est-ce un simple drame...) de Demetra Kantelinen

Karl Klimek

Ezra Semagne

Ewan Amen

Chiara Donaldson
Musique par Aimee Kubota
Sorti le 05 avril 2025 (Semaine 1057)
Entrées : 15 929 130
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