La musique assourdissante retentissait dans toute l'habitation, jusqu'à faire vibrer les murs de la maison, perdue dans la campagne à plusieurs kilomètres de Gérardmerveille. Pour la nuit, les parents de la jeune fille avaient accepté de lui laisser carte blanche pour fêter ses dix-huit ans dignement avec ses amis. Pour l'occasion, elle avait décidé de faire les choses en grand, avec près d'une cinquantaine d'invités, auxquels s'ajoutaient des amis des invités qui étaient venus s'incruster. Une foule de jeunes se dandinaient ainsi au milieu du salon, les uns contre les autres, un verre dans la main et une cigarette dans l'autre. Par ici on s'embrassait langoureusement, par là-bas on rigolait bêtement une bière à la main.  

A cette heure avancée de la nuit, l'alcool et autre substances désinhibitrices avaient eut raison de tous les invités, et l'ambiance était à son comble. Se sentant soudain mal, peut-être à cause de la chaleur émanant de tous ces corps, ou bien surtout à cause de l'alcool, la jeune femme décida d'aller prendre l'air. Le regard trouble, et le pas mal assuré, elle traversa la pièce en direction de la baie vitrée donnant sur la terrasse. Slalomant entre les danseurs qui ne faisaient pas attention autour d'eux, elle fut bousculée par un jeune homme qui renversa son verre et se mit à râler sur elle. Mais la jeune femme continua son chemin sans lui prêter attention, et arriva enfin sur la terrasse.  

Là, deux couples s'embrassaient fougeusement sur des chaises de jardin, se pelotant sans aucune retenue, sans se soucier du monde qui les entourait. Préférant ne pas rester près d'eux, elle s'éloigna un peu de la terrasse et s'enfonça dans l'obscurité du jardin, pour retrouver un peu de calme. La musique résonnait dans sa tête, et lui donnait mal au crâne. Un peu de calme lui ferait le plus grand bien. La nuit était bien noire, laissant seulement quelques étoiles percer le ciel opaque qui surplombait la côte Est de Cinéjeu Island. La jeune femme se sentait déjà mieux, respirant l'air frais de l'extérieur. Poursuivant son chemin, elle trébucha soudain sur quelque chose et s'écroula de tout son long dans l'herbe. Pestant contre cette connerie à cause de laquelle elle venait de se couvrir de terre, elle se releva difficilement à cause de l'étourdissement, puis jeta un oeil à ce qui avait pu la faire chuter.  

Le hurlement qu'elle poussa alors dans la nuit fut couvert par la musique qui hurlait dans les enceintes dans la maison. Seuls les deux couples sur la terrasse cessèrent soudain leurs ébats, ayant cru entendre quelque chose d'étrange.  

La girophares de police illuminaient la cour devant la maison, où tous les jeunes, ou presque, se tenaient les uns près des autres, encore sous le choc de ce qui était arrivé. Certains avaient quitté les lieux avant l'arrivée de la police, notamment ceux qui s'étaient incrustés là sans invitation. Mais la majorité des membres de la fête étaient là.  

Penché sur le corps de l victime, le lieutenant Raymond Dourdan (Alex Kruger) fit une grimace qui en disait long sur ce qu'il pensait ce la situation. Il ne supportait pas ces jeunes qui ne savaient faire la fête qu'en se bourrant la gueule et en fumant de l'herbe. Il pesta intérieurement sur la merde dans laquelle il se retrouvait en s'étant fait confier cette affaire. Le pauvre garçon qui avait été retrouvé mort dans le jardin était le gosse d'un de ces bourgeois de Gérardmerveille logeant à Mountain Hill. Autant dire que l'affaire risquait de faire grand bruit dans la presse, et qu'il risquait d'avoir la pression de son chef pour résoudre au plus vite l'affaire, poussé par un politicien proche des parents de la victime, et par les médias sans cesse à la recherche de nouveaux éléments à annoncer à leurs lecteurs et téléspectateurs.  

Après avoir examiné rapidement le corps, la police scientifique ayant déjà fait son travail, le vieux flic ordonna qu'on embarque le corps pour l'autopsie. Il retourna alors vers sa voiture et passa près de l'attroupement de lycéens qui observaient tout ça silencieusement. Avant de monter dans sa voiture, il observa les visages de chacun d'entre eux. Parmi eux se trouvait sans doute un criminel, cette mort n'ayant rien d'accidentel. Etudiants dans un lycée huppé de Gérardmerveille, tous ou presque étaient des gosses de riches. Mais qui parmi eux avaient pu commettre ce crime, et pourquoi ?  

Etant donné le nombre de témoins à interroger, le commissariat avait mis plusieurs hommes sur les interrogatoires, ceux-ci étant cependant menés malgré tout par le lieutenant Dourdan. N'ayant plus que quelques années à tirer avant la retraite, le vieux flic était de l'ancienne école, un de ces flics qui donnait l'impression d'un vieux pépère tranquille, mais dont l'intuition lui avait permis de résoudre des affaires très complexes. Mieux vallait ne pas sous-estimer Dourdan.  

Laissant les autres interrogatoires à ses collègues, celui-ci avait décidé de se réserver trois d'entre eux, ceux des plus proches amis de la victime. Car sans doute étaient-ce eux qui pourraient révéler les éléments les plus intéressants pour l'enquête. C'étaient à eux que la victime confiait sans doute ses problèmes, à eux qu'il avouait ses secrets. Même s'ils n'avaient aucune idée de qui avait pu commettre ce meurtre, ils possédaient sans doute sans le savoir des éléments qui pourraient permettre à Dourdan de résoudre cette affaire.  

Keira (Léa Geoffrey) était la petite amie de Matt, la victime. Les yeux encore remplis de larmes, elle semblait encore sous le choc, et ne rien comprendre à ce qui avait pu arriver à son copain. Elle ne lui connaissait aucun ennemi, aucun qui puisse avoir en tout cas une raison de le tuer. Elle ne l'avait quitté que peu de temps au cours de la soirée, et ne s'était pas inquiétée quand elle ne l'avait pas trouvé passé un temps. Thora (Ashley Curtis) était la meilleure amie de Keira, et donc forcément une bonne amie de Matt également. Les deux filles, Matt, et Travis (Sam Boston), le petit ami de Thora, étaient inséparables et passaient tout leur temps ensemble. Lorsque Keira avait organisé sa fête d'anniversaire, c'était donc avant tout avec eux qu'elle souhaitait la faire. Comment aurait-elle pu imaginer que cela se terminerait comme cela.  

Raymond Dourdan ressortit de la petite pièce dans laquelle il venait de s'entretenir avec Travis. Les déclarations des trois lycéens concordaient. Pourtant le vieux flic avait un mauvais pressentiment à leur propos. Il avait cette curieuse impression que ces trois jeunes là se foutaient de lui, qu'ils tentaient de le mener en bateau. A mesure qu'il les avait interrogés, il avait eut cette curieuse impression qu'ils en savaient plus qu'ils n'en révélaient, et pire, qu'ils s'étaient mis au diapason pour ne rien dire de plus que ce qu'il fallait.  

Son supérieur vint alors vers Dourdan pour lui demander si l'enquête avançait. Il avait la presse sur le dos, ainsi que des élus de la ville. Et puis il y avait les parents de tous ces jeunes qui voulaient voir l'affaire classée au plus vite, afin qu'on laisse enfin leurs enfants tranquilles. Evidemment, tous ces bourgeois ne se souciaient que d'une chose, de leur bien être. Mais il y avait un mort, merde ! Ca aurait tout aussi bien pu être leur gosse ! Dourdan garda bien pour lui ses remarques personnelles, et confia simplement que l'enquête avançait, doucement mais sûrement.  

Après avoir reçu les directives de son patron qui exigeait des résultats rapides, le vieux flic se prépara alors à retourner interroger les trois amis proches de la victime. Depuis le couloir, il observa chacun d'entre eux à travers la vitre de la pièce où ils étaient assis, chacun dans une salle différente. Il allait devoir les interroger encore, leur demander de raconter la soirée dans le moindre détail, pour bien tout comprendre. Il devait tout savoir, chaque élément, chaque détail. Mais il savait qu'il avait peu de temps pour ça, car rapidement les parents de ces gosses exigeraient qu'on mette fin à cet interrogatoire. Or Dourdan était sûr que si son intuition était bonne, c'était ce soir qu'il allait pouvoir coincer ces jeunes. S'il n'y parvenait pas maintenant, il n'y parviendrait jamais.  

Il allait donc devoir les interroger les uns après les autres, encore et encore, allant d'une pièce à l'autre pour mettre en parallèle les versions des trois lycéens. Il devait à tout prix les pousser à l'erreur. Car il était convaincu que ces trois là étaient dans le coup. Il ignorait encore pourquoi, mais il comptait bien le découvrir.  

Relevant la tête, la petite amie de la victime croisa le regard du vieux flic. Mais derrière ces larmes, Dourdan pu lire comme un air de défi. Elle croyait avoir affaire à un flic dépassé par les années, elle pensait pouvoir le baiser. Mais elle ne savait pas encore à qui elle avait affaire.