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Les Films du Corbeau présente
Le Secret du Roi

Londres, 1810. Faculté de médecine.  

 

Deux bougres déposèrent le corps sur la large table en bois qui servait pour les autopsies. Dans cette pièce sombre et humide du sous-sol, on avait disposé la table près du mur, afin qu’elle soit suffisamment éclairée par la lumière froide du jour filtrant depuis la lucarne. Un vieux professeur et ses trois élèves se badigeonnaient les narines de pâte mentholée, afin d’amoindrir les mauvaises odeurs de mort. Ils se regroupèrent autour de la table, où gisait le cadavre d’une vieille femme miséreuse. Grabataire et sans le sou, son corps avait été livré à la Faculté avant de rejoindre la fosse commune. Sans un mot, le professeur retira la charlotte miteuse de la pauvre femme. Quelques mèches de cheveux gris-jaune sillonnaient un crâne en grande partie dégarni. Il laissa les élèves s’atteler à découper les vêtements. Le vieux corsage troué. Les grosses jupes tâchées. Par pudeur, ils n’osèrent pas s’atteler au derniers dessous. Le professeur haussa les épaules. Il leur faudrait s’aguerrir de toute pudeur dans ce métier. Il retira lui-même les derniers tissus et…  

Il sursauta et émis un léger mouvement de recul. Les élèves se penchèrent, puis tous les quatre se regardèrent avec surprise. Le professeur repris le premier sa contenance et désigna à l’un de ses élèves le cahier sur lequel il attendait à ce qu’on prenne en note le déroulé de l’autopsie.  

- Le corps de la défunte présente des organes mâles parfaitement formés sous tous les rapports…  

 

 

******************* LE SECRET DU ROI *********************  

ou Vie et trépas de Charles de Beaumont, chevalier d’Eon.  

 

 

Versailles, 1756. Petit Trianon.  

 

Les portes-fenêtres étaient restées ouvertes sur les jardins car la nuit était encore chaude. A l’intérieur, les danseurs tournaient au rythme d’une gavotte de Rameau qu’entonnait l’orchestre de cordes et clavecin. L’ambiance était champêtre et le roi Louix XV (Jeff Collins), dit « le Bien-Aimé », regardait avec amusement cette noblesse de robe gambader sans retenue. Une Naïade virevoltait autour d’un Pape, une belle oie blanche se penchait vers une bergère au menton poilu… Versailles raffolait des bals, et en particulier des bals costumés où l’on se plaisait à se travestir à l’envie.  

Le roi suivait du regard une jeune femme radieuse, la seule de l’assemblée qui ne portait ni costume, ni masque. Elle se mouvait avec grâce et aisance, et ne remarquait pas le regard appréciateur du monarque posé sur elle. Louis XV se pencha vers son voisin, qui n’était autre que le célèbre écrivain et philosophe Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais (Avi Elias), dont le roi s’était entiché depuis qu’il l’avait recruté au sein de son cabinet noir, le fameux « Secret du Roi ».  

- Savez-vous pourquoi cette belle personne ne s’est pas costumée ?  

Beaumarchais suivi son regard.  

- Il s’agit bien d’un déguisement, votre Altesse.  

- Que me chantez-vous là ?  

- C’est que… Il s’agit de Charles de Beaumont, chevalier d’Eon, votre Altesse…  

- Tudieu !  

Pour sûr, l’illusion était parfaite. Beaumont (Suri Pendragon) avait une finesse de corps et de traits qui, une fois parée de robes et bijoux, aurait trompé sa propre mère. Intrigué, le Roi s’en fit compter davantage au sujet du chevalier. Beaumarchais lui fit état de ses fonctions d’avocat au Parlement de Paris, de ses talents de cavalier et d’épéiste, d’écrivain même, et surtout de l’habileté diplomatique que le jeune homme avait pu démontrer alors qu’il était secrétaire d’ambassade, dépêché auprès de la cour de Russie. Son intervention auprès de la tsarine Elisabeth avait été particulièrement efficace pour obtenir l’alliance des deux puissances, si précieuse dans le contexte de cette guerre contre les Anglais qui ne faisait que débuter.  

 

C’est ainsi que le Roi demanda à Beaumarchais de convier le chevalier d’Eon à rejoindre le « Secret du Roi », dont on parlait dans les couloirs de Versailles comme d’une assemblée aussi secrète qu’efficace dans l’obtention de renseignements à l’étranger.  

 

*  

 

Pays de Galles, 1758  

 

Le vent frais leur fouettait le visage. La mer démontée était splendide à voir. Lia de Beaumont, comme le chevalier se faisait appeler dès lors qu’il revêtait sa parure féminine, s’approchait du bord de la falaise pour observer l’écume jaillissant entre les rochers.  

- Prenez garde, Madame !  

Lloyd Humberstone (Weston Hatcher) s’était vivement approché de sa compagne et lui avait saisi le coude. « Lia » sourit de sa prévenance, bien qu’elle lui parût inutile. Depuis plusieurs jours, il passait le plus clair de ses journées en compagnie du jeune Lord anglais. Diplomate aguerri, secrétaire de cabinet auprès du Ministre des Armées, Humberstone avait rencontré la « demoiselle » au cours d’un salon littéraire organisé par une Lady quelconque de Cardiff. Tombé sous le charme de la jeune Française exilée sur leurs terres, telle que Beaumont se présentait, il s’était proposé ce jour-là de lui faire découvrir les côtes environnantes. Beaumont exultait. Il n’avait pas pensé trouver autant d’aisance dans ce nouveau costume, et il lui avait paru plus simple que prévu de séduire cet homme.  

- Il fait froid, et le ciel se couvre. Me permettez-vous de vous emmener dîner ?  

- Je vous suis très reconnaissante, mylord. Mais je crains qu’il ne me faille rentrer. Tout ce vent me donne un léger mal de crâne.  

Chaque soir, Beaumont retrouvait secrètement le comte de Guerchy. Ambassadeur de France sur l’île, c’est à lui qu’il rendait ses rapports. Ainsi, cette visite des côtes ne serait pas inutile : les agents de Guerchy cartographiaient les côtes galloises en vue d’un éventuel débarquement des armées françaises. De plus, se contraindre à ce rendez-vous nocturne avait un autre intérêt pour le chevalier : lui permettre d’être, chaque soir, indisponible pour le jeune Lord. Séduire un homme était une chose, mais se protéger de ses avances était une autre paire de manches…  

 

Sur le chemin du retour, le chevalier put utiliser l’excuse de son mal de tête pour faire parler Humberstone sans retenue. Sous couvert de son innocence et de la totale ingénuité d’une jeune femme en matière de politique, il parvenait à pousser l’Anglais dans les confidences et à dévoiler quelques secrets de cabinets.  

Lorsque la calèche s’arrêta devant l’hôtel particulier où résidait Lia de Beaumont, Humberstone aida sa compagne à descendre.  

- Vous verrai-je demain ?  

- Bien entendu !  

Humberstone agrippa sa main et l’approcha de ses lèvres.  

- Lia, si vous me permettiez de vous dire seulement ce que mon cœur…  

Beaumont s’empressa de l’interrompre.  

- Floyd, je vous en prie. Mes maux de tête pourraient me faire tout entendre de travers. Reprenons ce sujet demain, voulez-vous ?  

Humberstone s’inclina galamment et laissa s’éloigner la jeune femme. Beaumont soupira. Il passait de plus en plus de temps à contourner ses avances qu’à obtenir des informations utiles…  

 

*  

 

Dans un salon londonien, Charles de Beaumont, paré de ses vêtements d’homme, se tenait sur un canapé en compagnie d’une jeune femme. Il se penchait sur elle et lui susurrait des mots doux dans le creux de l’oreille. Miranda (Angela Ford) était la fille du Ministre des Armées, le Général Creston-Hood. Depuis qu’il était rentré du Pays de Galles, Beaumont s’était fait présenter à la jeune femme et avait lié connaissance. Usant d’un charme indéniable, le chevalier avait aisément séduit la jeune femme afin de passer le plus de temps possible dans l’entourage du Ministre.  

Si l’exercice était plus agréable qu’auprès de Lord Humberstone, Beaumont n’était malgré tout pas toujours à son aise. Miranda était honnête et prude, aussi avait-il fallu au chevalier prétendre un amour extrême pour obtenir des rendez-vous plus intimes, sans la présence constante d’une dizaine de chaperons londoniens. Beaumont était à Londres en tant que secrétaire de l’Ambassade de France. La guerre confrontant son pays et celui qui l’accueillait étant à son paroxysme, et le Ministre gardait une grande défiance envers lui. Beaumont avait dû tout miser sur sa relation avec la jeune femme pour ne pas perdre l’opportunité de fréquenter ce milieu.  

- Oh Charles, il suffirait de si peu de choses pour que je vous donne ce que vous attendez…  

L’allusion était explicite. Miranda s’était mise en tête que la demande en mariage n’allait plus tarder. Beaumont ne l’avait pas démentie… D’ici quelques jours, il ne pourrait plus la fréquenter sans passer à l’acte. Sans quoi il serait coupable d’un déshonneur qui lui fermerait la porte des meilleurs milieux londoniens. Il lui fallait faire vite.  

L’occasion qu’il attendait se présenta ce jour-là. Une domestique pénétra dans le salon, perturbant l’intimité du couple.  

- Miss, votre mère vous demande dans le grand salon. Elle y reçoit les Blight et Lord Humberstone.  

A l’annonce de ce nom, Beaumont senti une sueur froide lui parcourir le dos. Il ne pouvait pas se montrer sous cet habit ! Si d’autres s’y tromperaient aisément, Humberstone s’était frotté de trop près à Lia de Beaumont pour ne pas faire le rapprochement…  

Miranda se leva et lui tendit la main.  

- Venez Charles, je veux vous présenter à Lloyd Humberstone ! Il est le secrétaire de mon père et un ami très cher à notre famille.  

Beaumont était pâle et n’eut pas de mal à prétexter une faiblesse. Miranda lui indiqua la direction de la salle de toilettes et lui intima de les rejoindre dès que possible. Beaumont arpenta les couloirs en vitesse. Il fréquentait la maison depuis suffisamment de temps pour trouver l’objet de ses recherches. Il pénétra dans le cabinet de travail du Général, et entreprit de fouiller les documents qui parsemaient la pièce. Il lui fallut une dizaine de minutes pour mettre la main sur le traité préparatoire…  

Dans cette guerre, que l’histoire retiendra sous le nom de « Guerre de Sept Ans », le Royaume de France était en bien mauvaise posture. Le Comte de Guerchy allait être prochainement amené à signer un traité de paix, où la France avait fort à perdre. La lecture du document qu’il avait sous les yeux indiquait à Beaumont les subterfuges que le gouvernement anglais prévoyait de mettre en place pour forcer les Français à ne leur céder rien de moins que l’empire colonial français tout entier…  

 

*  

 

Versailles, 1763  

 

- Ce chevalier d’Eon commence à m’échauffer sérieusement les oreilles…  

Louis XV se tenait, les sourcils froncés, derrière son bureau. Face à lui, le comte de Guerchy (Edward Laren) se tenait cambré sur son siège, intimidé.  

- Je n’ai plus d’emprise sur lui. Il a monté une partie de la communauté française de Londres contre moi. Il prétend avoir votre appui et parade en arborant l’insigne de l’Ordre de Saint-Louis que vous lui avez offert pour ses services.  

- Qu’on me le ramène, en bottes ou en jupes, que m’importe ! Je lui montrerai un autre usage de cette insigne…  

Beaumarchais, qui se tenait en retrait, s’avança.  

- Nous avons déjà tenté de le rapatrier, votre Altesse. Mais la législation anglaise interdit l’extradition.  

- De plus, reprit Guerchy, il menace de dévoiler la correspondance personnelle qui le lie à votre Altesse.  

- Il saborderait sa carrière ?  

- Il dit n’avoir plus rien à perdre…  

Le Roi fulminait sur son siège. D’un geste de la main, il congédia le comte, qui s’empressa de disparaître. Beaumarchais s’installa à sa place et attendit.  

- Expliquez-moi quel diable est passé par la tête de ce chevalier.  

- Il pense mériter mieux qu’être le secrétaire de Guerchy.  

- Ce Guerchy, est-il si incompétent que Beaumont le prétend ?  

Beaumarchais pesa ses mots avec diplomatie.  

- Il n’est pas faux que les prouesses de votre cabinet en Grande-Bretagne sont davantage du fait de Beaumont que de l’Ambassadeur…  

- Et bien faites-en l’Ambassadeur, nous enverrons Guerchy ailleurs.  

- Vous n’y pensez pas votre Altesse. Beaumont est un agent précieux, mais ses subterfuges féminins sont trop connus à Versailles ! Si le bruit filtrait dans les cours d’Europe que nous avons nommé un Ambassadeur mi-homme, mi-femme…  

Le regard du Roi changea à ces mots.  

- Un bien étrange agent que nous nous sommes créé, en vérité…  

 

*  

 

Londres, 1765.  

 

Charles de Beaumont était assis près du foyer d’une cuisine modeste. Il avait revêtu les vêtements d’une femme du peuple. Depuis son opposition à Guerchy et au Roi, le souverain lui avait supprimé sa rente. Et pour échapper aux différents procès auxquels il devait faire face à Londres, il s’était réfugié dans cette forme d’anonymat. Mais il ne se déparait pas de son regard fier quand Beaumarchais, envoyé par le Roi, s’installa dans le siège qui lui faisait face. Même si Beaumont avait abandonné ses menaces de chantage et que son influence s’était effondrée. il n’était plus en position de force.  

- Tenez.  

Beaumont tendit à Beaumarchais un paquet de lettres. La fameuse correspondance. Le messager du Roi le regarda avec bienveillance.  

- Le Roi est sensible à votre changement de comportement. Il est prêt à vous rendre votre rente, et à vous permettre de reparaître à Versailles.  

Beaumont émis un soupir de soulagement.  

- Je ne peux plus rester à Londres. En tant qu’homme, je suis toujours poursuivi pour avoir refusé de demander la main de Miss Creston-Hood. Son père m’accuse d’avoir terni son honneur. En tant que femme, on m’accuse d’être responsable du suicide de Lord Humberstone…  

Il s’attendait à de la compassion de la part de Beaumarchais, qu’il savait être un homme bon. Pourtant celui-ci paraissait gêné et évitait son regard.  

- Il y a une dernière condition à l’obtention de votre rente et à votre retour en France…  

Beaumont haussa les sourcils et attendit la suite, le cœur serré.  

- Vos services ont été aussi brillants que nuisibles à l’image du Royaume, de part les moyens mis en place. Le Roi tient à ce que vous vous engagiez à ne plus jamais quitter vos vêtements féminins et répondre au nom de Melle Eon à partir de ce jour…  

Un instant, Beaumont eut le sentiment que le vide s’était formé autour de lui. C’était une chose de se travestir pour parvenir à ses fins, pour se cacher ou même se divertir. Et il avait eu toujours grand plaisir et grande facilité à le faire. S’en était une autre de renoncer à sa virilité pour le restant de ses jours…  

 

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Un film de Leonard BRUMEL  

Sur un scénario original du Corbeau, d’après la vie de Charles de Beaumont, chevalier d’Eon  

http://fr.wikipedia.org/wiki/Charles_de_Beaumont,_chevalier_d%27%C3%89on  

 

Avec  

Suri PENDRAGON – Charles de Beaumont/Lia de Beaumont  

Jeff COLLINS - Louis XV  

Weston HATCHER - Lord Lloyd Humberstone  

Angela FORD - Miss Miranda Creston-Hood  

Avi ELIAS - Pierre-Augustin Caron de Beaumarchais  

Eward LAREN - le comte de Guerchy  

 

Sur une musique de Peter FALTERMEYER  

Scénario : (2 commentaires)
une série A historique (Biopic) de Leonard Brumel

Jeff Collins

Suri Pendragon

Weston Hatcher

Angela Ford
Avec la participation exceptionnelle de Edward Laren, Avi Elias
Musique par Peter Faltermeyer
Sorti le 07 mai 2033 (Semaine 1479)
Entrées : 18 168 529
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