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Les Films du Corbeau présente
Searching for Darius K.

Las Cruces, Nouveau-Mexique. 1964.  

 

Pas une maison, pas un morceau de bois ou de brique dans cet espace rempli de sable, de pierres et d’herbes sèches. Au loin, la chaîne des Organ commence à pointer le bout de ses cimes. Mais aucune trace de vie humaine à plus de 5 miles à la ronde. Seulement la carcasse d’une vieille Dodge des années 1950 qui flambe, envoyant ses volutes de fumée noire dans le ciel sans nuage. Au cœur de la fournaise, une silhouette carbonisée est penchée sur le volant. Plus rien qu’une silhouette noire qui tourne au charbon.  

 

 

Un mois plus tard.  

 

Nelson Olmeida (Igor Berbatov) se perd dans les chiffres, il commence à loucher sur les feuilles de papier qu’il tient dans ses mains. L’arnaque à l’assurance est avérée, mais il a perdu le fil et ne retrouve plus les lignes comptables incriminées. Il repousse les documents et s’adosse à son siège, levant les jambes pour les poser sur son bureau. Il regarde par la fenêtre ouverte. Il fait trop chaud de toute façon. Que va-t-il commander chez Sally ? Des tacos ? Des empanadas ? Ou juste un steak…  

Ses pérégrinations gourmandes sont interrompues par la porte vitrée, sur laquelle on frappe. Une jeune femme entre. Elle est blonde, bien balancée, la taille fine et la poitrine gironde (Mylene Martial). Elle regarde le détective privé derrière ses lunettes feutrées.  

« Vous fermez pas à midi, au moins ?  

- Je ferai un petit effort. Entrez. »  

La jeune femme vient s’asseoir sur le siège en face de lui. Elle enlève ses lunettes et le regarde droit dans les yeux. Il attend qu’elle parle.  

« On dit que vous faites plutôt dans les histoires de ménages et les petites arnaques. Mais vous êtes le seul qui soit dans mes prix.  

- C’est toujours un plaisir d’être reconnu pour son talent… »  

La demoiselle ne se déride pas. Elle fouille dans son sac et en sort une photo cornée, sur laquelle Olmeida peut découvrir le visage d’un homme au teint buriné et à la barbe fournie.  

« Darius Kovacs. Il s’est fait tuer il y a un mois. La police ne trouve rien, je voudrais que vous essayiez de faire mieux. »  

Tout de go, sans fioriture. Olmeida prend la photo dans ses mains.  

« La Dodge retrouvée calcinée près des Organ ? »  

La jeune femme acquiesce.  

« Et ce monsieur est… ?  

- Mon père. Je m’appelle Bonnie Kovacs.  

- Meurtre ou accident ?  

- Meurtre, je vous l’ai dit. Il a été tué avant l’incendie. Une balle en plein visage.  

- Mais si la police n’a rien trouvé, qu’espérez-vous que je trouve de plus ?  

- A vous de me le dire. »  

 

 

La maison abritant le Crescent Moon n’a rien pour la différencier des autres maisons du quartier. Sur trois étages, en bois écaillé, un porche colonial, une devanture crade. Si ce n’est la porte d’entrée repeinte depuis peu, dans une teinte rouge cramoisie. Pour remplacer la traditionnelle lanterne. Le lupanar est connu en ville, mais il ne dérange personne. Et surtout pas la police.  

En plein milieu de l’après-midi, la maison est calme et Olmeida ne croise que deux filles à l’air assoupi. Cassiopée Boobaker (Cassie Gintrac) le reçoit dans un boudoir surchargé. Elle aussi semble être réveillée depuis peu, et elle tient son peignoir en soie mauve solidement refermé autour de son ceinturon. Olmeida la connaît de réputation, Cassiopée a fait les beaux jours de la maison depuis près de trente ans. Maintenant, c’est elle la tenancière. Mais beaucoup d’anciens continuent de fréquenter le Crescent pour les beaux yeux de la métisse, même si elle ne fait plus le service, dit-on.  

Elle est fatiguée, et visiblement peu patiente. Il vaudrait mieux aller droit au but.  

« La fille de Darius Kovacs m’a chargé de comprendre ce qui lui est arrivé.  

- Hum, elle aurait mieux fait de s’intéresser à lui un peu plus tôt alors.  

- Vous le connaissiez bien ?  

- Oui.  

- Il était votre employé depuis long…  

- Il n’était pas mon employé. Il rendait des services. Je lui prêtais une piaule et il me remerciait en remettant la maison d’aplomb.  

- Pas d’échange d’argent entre vous alors ?  

- Non. Juste des services. Il gagnait sa vie sur les chantiers de Boobaker.  

- Oui, des services. Y a moyen de voir sa piaule ?  

- Je l’ai faite vider. J’ai renvoyé ses affaires à sa fille. »  

Elle se relève. Signe que l’entretien est fini. Olmeida n’a aucun moyen de le faire durer plus longtemps. Mais il ne s’attendait pas à autre chose. La métisse est peu bavarde. D’après sa fille, elle connaissait bien Kovacs. Vraiment bien. La suite logique, c’est de savoir ce qu’en pensait « Boobaker », comme Cassiopée l’appelle. Etrange d’appeler son mari par son nom.  

 

 

Le stadium n’en est qu’à ses balbutiements et on n’en aperçoit que les bases. Mais le chantier fourmille de vie, de fourmis mexicaines besogneuses, de tas de gravas, de machineries et boucans métalliques en tout genre. Olmeida interroge les ouvriers mexicains sur Kovacs, mais ils n’ont pas envie de parler. Trop de boulot, trop chaud, et la journée est bientôt finie. Il en tirera sûrement plus après la débauche, autour d’une bière. En attendant, ils le baladent d’un côté à l’autre du chantier à la recherche de Steve Boobaker. Le boss, l’un des constructeurs les plus affluents de Las Cruces. Peut-être même de tout le Nouveau-Mexique, selon le journal local.  

Boobaker (Richard Parker) sort des bureaux en préfabriqué au pas de charge, suivi par un homme en costume et une secrétaire essoufflée par ses kilos en trop et son tailleur trop chaud. Olmeida se positionne sur son chemin.  

« M. Boobaker, je suis détective privé. J’enquête sur la mort de Darius Kovacs, l’un de vos ouv…  

- N’avez rien à foutre là. Foutez le camp. »  

Le détective est obligé de trottiner derrière lui, comme ses deux autres acolytes.  

« Mais ils n’ont rien trouvé. J’ai pas l’intention de vous faire perdre votre temps, mais… »  

Boobaker s’arrête brusquement et se tourne vers lui.  

« Un petit cadeau avant que vous vous tiriez. Kovacs, c’était un bon à rien qui me faisait perdre mon temps et mon argent. Je ne sais pas ce qu’il a combiné pour finir où il est, et j’en ai rien à foutre. Maintenant, bye. »  

Il fait trop chaud pour lui courir après. Olmeida le regarde filer à travers le chantier, et envoie un clin d’œil à l’homme qui l’accompagne (Frank Mattis) et qui le fusille du regard.  

 

La sonnerie de fin de chantier a retentit et les ouvriers ont rejoint les vestiaires. Olmeida continue de trainer discrètement en attendant de pouvoir rincer l’un d’entre eux en quête d’informations, et s’enfonce dans le chantier. Son attention est retenue par cinq ou six conteneurs amassés au fond d’un terrain vague, qui jouxte la fosse creusée pour le stadium. Les bureaux et les vestiaires sont alignés à l’entrée du chantier. Que peuvent contenir ces blocs de fer ? Le détective tente d’en ouvrir un, mais il est verrouillé par une chaîne cadenassée. A bien les regarder, ils le sont tous. Mais l’une des chaînes est plus rouillée que les autres. Olmeida regarde autour de lui. Personne. Il revient sur ses pas pour ramasser une pelle, et, avec son manche en bois, fait pression sur la chaîne qui rompt facilement.  

L’intérieur du conteneur est une étuve, qui sent le fauve et l’humidité. Plusieurs paillasses sales sont alignées, de quoi coucher une dizaine de gars. Sur une table en bois, une cuve en porcelaine attend qu’on y verse de l’eau pour se rincer la figure. Des seaux en plastiques sont remisés au fond du conteneur. Les « commodités », sans doute. Des conditions bien précaires pour loger ses ouvriers, comme le pense tout d’abord Olmeida. Logés au fond du chantier, bien cachés à l’abri des regards. Problèmes de papiers et de visas sans doute.  

Avant de sortir du conteneur, Olmeida se penche pour ramasser un vêtement en boule d’une matière qui l’étonne dans ce contexte. Une nuisette en soie, encrassée de tâches de sueur. Drôle de vêtement pour un ouvrier mexicain…  

En sortant, il se tâte à remettre la chaîne cassée autour du verrou, mais il se dit rapidement que ce sera inutile : au sommet d’un tas de gravas, l’homme en costume – celui qui accompagnait Boobaker – le regarde. Grillé… L’inconnu s’avance vers lui à grands pas, le regard sombre. Olmeida vient à sa rencontre, un sourire contrit sur le visage. Sans ralentir sa marche, l’autre se penche pour attraper une barre à mine qu’il agrippe dans sa main. Olmeida lève les mains devant lui en signe d’apaisement.  

« Oh, tout doux ! Pas la peine de se fâcher… »  

Mais si, l’autre est fâché. Sans coup de semonce, il lève la barre de fonte et frappe furieusement le détective en plein visage. Olmeida s’écroule le nez dans la poussière, complètement sonné. Son assaillant lui envoie un coup de pied dans le ventre qui lui coupe le souffle, puis un autre dans la mâchoire. Le goût du sang plein la bouche, Olmeida se sent partir en cacahuète et, avant de perdre conscience, il entend l’homme qui se penche vers lui et lui susurre à l’oreille :  

« Et le patron aimerait bien que tu te tiennes loin de sa bonne femme aussi. »  

 

 

Le réveil a été douloureux. La nuit était tombée et Olmeida a dû se trainer jusque chez lui à pied, boitant, la bouche, le nez et les poumons en feu d’avoir respiré trop de poussière. Son reflet dans le miroir n’est pas joli à voir : lèvres tuméfiées, pommette violette et boursoufflée, hématome plus proche du noir que du bleu au-dessus des reins… Lourd bilan pour une première journée d’enquête.  

Lorsqu’il pénètre dans le Tijuana’s, il a l’impression de revoir un pâle western : le cloaque est presque vide en ce début d’après-midi, un guitariste gratte un vieux blues la tête penchée sous son galurin, et deux-trois piliers de bar tournent lentement la tête vers lui lorsque la porte se referme. Pourtant, il ne se sent pas l’allure d’un John Wayne : il se traîne comme un grand-père. Bonnie Kovacs le regarde s’avancer vers le bar et se hisser péniblement sur un tabouret. Elle le rejoint et essuie le comptoir devant lui. Elle regarde son visage ravagé.  

« Ca veut dire que vous avez déjà trouvé quelque chose ?  

- Non, ça veut dire que j’aurais jamais dû vous dire oui. C’est ce que je venais vous dire. Votre enquête, vous pouvez la filer à quelqu’un d’autre. »  

Elle sort une bouteille de bière de sous le comptoir et la lui tend.  

« Allez, faut pas faire la tête. Si c’était facile, je vous aurais demandé ça gratis. Dites-moi ce qui vous est arrivé. »  

Olmeida surprend le regard de la jeune femme qui s’était tourné vers le joueur de guitare. Pas besoin de craindre qu’il les écoute, le vieux est penché sur son instrument. Qu’il manipule plutôt bien, d’ailleurs.  

« Ecoutez, je ne sais pas vraiment ce qu’a fait votre père, mais y a tout à parier qu’il a trempé les mains là où il ne fallait pas. Il a fricoté avec une ancienne pute, qui plus est la femme de son patron, patron dont j’ai tout lieu de penser qu’il traficote sérieusement, côté « commerce de la chair fraiche ». Avec la frontière pas loin, je pense que vous voyez de quoi je parle. »  

La jeune femme grimace de dégoût.  

« Désolé, j’aurais pu y mettre les formes. Mais ma belle, papa ou pas, vous vous doutez bien qu’à fouiller la merde, on ne récolte pas des bouquets de pétunia ! »  

Bonnie a baissé la tête, et ne relève les yeux que pour jeter un œil sur le musicien. Qui a arrêté de jouer, d’ailleurs, comme le remarque Olmeida. Soudain, le vieil homme se lève et vient s’asseoir à côté du détective. Sous le chapeau, ce dernier reconnaît le visage qu’il avait vu sur la photo. Le visage d’un mort… Darius Kovacs (Héfaistos Czinka).  

Celui-ci regarde la jeune femme.  

« Sers-m’en une aussi, ma fille. »  

Bonnie sort une bouteille de bière qu’elle pose devant son père. Elle le regarde avec inquiétude.  

« T’en fais pas Bonnie, tu peux nous laisser. »  

Elle s’éloigne vers les autres clients. Kovacs tourne enfin le visage vers Olmeida, et le détective aperçoit une pointe d’ironie se dessiner dans le pli de ses yeux. Une fois la surprise passée, Olmeida commence à ressentir une pointe de colère aigüe monter en lui. Il a horreur qu’on le mène en bateau.  

« T’as une tête de fion, petit. Laisse-moi deviner : c’est Schwartz, le gringalet de ‘Boobs’ qui t’a remodelé le visage ?  

- On n’a pas pris le temps de se présenter », répondit Olmeida, les mâchoires crispées.  

« Prends-le pas mal, gamin. Je pensais pas que tu trouverais si vite le moyen de bousculer les petits secrets de nos amis.  

- Et le mort, dans la bagnole. C’était qui ?  

- Ca, c’est une autre histoire.  

- Et notre petite histoire, alors, elle continue comment ? C’est pas qu’elle ne m’amuse pas, mais si elle doit être plus tordante encore, j’aimerais mieux le savoir.  

- Moi aussi... Je ne t’ai pas embauché pour me foutre de ta gueule. T’as soulevé un lièvre, mais pas le plus gros encore. C’est pas juste une histoire de mari jaloux ou de business cradingue que j’aurais découvert. Ca va plus loin. J’ai besoin que tu retournes voir notre belle métisse. Elle n’a pas fait que reposer son joli cul dans son joli petit bordel. C’est plutôt de ce côté-là que j’aimerais que tu fouilles.  

- Donc j’ai pas encore assez la gueule en vrac ? Z’avez pas une autre Dodge, par hasard ? Parce que j’ai toujours rêvé de m’y réchauffer les poils.  

- T’énerves pas, j’te dis. T’es plus tout seul. Le blues, ça va un moment. Mais il est temps que je reprenne ma place dans la partie. »  

 

 

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Un film de Gabor CZINKA  

Sur un scénario original de Gabor CZINKA et du Corbeau  

 

Avec  

Igor BERBATOV - Nelson Olmeida  

Héfaistos CZINKA - Darius Kovacs  

Cassie GINTRAC - Cassiopée Boobaker  

Mylene MARTIAL - Bonnie Kovacs  

Richard PARKER - Steve Boobaker  

et Frank MATTIS - Schwartz  

 

Sur une musique d’Hiromi HANSON  

Scénario : (1 commentaire)
une série A policier de Gabor Czinka

Igor Berbatov

Cassie Gintrac

Héfaistos Czinka

Mylene Martial
Avec la participation exceptionnelle de Richard Parker, Frank Mattis
Musique par Hiromi Hanson
Sorti le 25 janvier 2036 (Semaine 1621)
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