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Les Films du Corbeau présente
Roi, Dame, Valet

Le Coréen triture le coin de sa carte du bout de l’ongle. Un mouvement nerveux, furtif. Marc (Shawn Green) ne sait pas si les autres l’ont remarqué. Ce type est un livre ouvert.  

Le grand black, un Congolais ou un Ivoirien, il ne se souvient pas, contrôle mal les pulsations de son rythme cardiaque. Une micro-seconde de souffle plus longue que les autres. Cela suffit pour en dire beaucoup.  

Svetlana Kriszcek (Katia Oblomov), c’est autre chose. Quelque chose qui se passe au niveau du regard. Celui-ci se fait parfois plus acéré et venimeux. Un court instant. Mais l’effet se dissipe aussitôt, se faufile sournoisement derrière son visage implacable et impassible. Glisse des doigts de Marc, comme une vipère. Si bien qu’il n’a pas encore réussi à comprendre la régularité de tous ces petits signes que cette femme laisse échapper. Et pourtant, cela fait des heures qu’il se tient autour cette table, face à cette femme, le blanc des yeux rivé sur les siens, sur ses mains, sur ses gestes. Une rivale comme il en a rencontré peu. Malgré tout, il a failli la plumer à plusieurs reprises au cours de ces longues heures.  

Les regards se tournent vers Marc. Ils attendent sa décision. Il jette un dernier regard au Coréen. L’Asiatique a du mal à fixer son regard, ses yeux se baladent d’un œil de Marc à l’autre.  

« Je me couche. »  

Soupirs. Sourire extatique du Coréen, qui s’empresse de tendre les mains vers le pactole. Retour du venin dans le regard de Kriszcek. La partie est terminée, elle et le grand black sont secs. Le Coréen remporte le gros lot, mais Marc s’en tire avec une très belle somme à six chiffres.  

« Sûr ? On s’arrête là ? », demande l’Asiatique à Marc. Il se veut sûr de lui, mais Marc sait qu’il ne rêve que d’arrêter la partie à cet instant.  

« Sûr. »  

Marc s’allume une cigarette. Le grand black a le regard perdu dans le vide. Kriszcek fixe les mains du Coréen qui rassemble ses jetons. C’est le moment. D’un geste brusque, Marc retourne les cinq cartes que le vainqueur a laissé face cachée sur la table. Les trois joueurs le fixent, surpris. Cela ne se fait pas. Le Coréen est le plus décontenancé des trois.  

« Vous… il faut payer pour voir, Monsieur Danglar !  

Mais Marc n’en a rien à faire. Il a la preuve qu’il souhaitait. Un carré de 9. Mais la carte qui l’intéresse est la cinquième, ce valet de trèfle.  

« Vous avez joué trop longtemps, Monsieur… » Marc n’a pas la mémoire des noms, surtout les noms coréens. « Votre petit stratagème est devenu prévisible. »  

Le regard du Coréen se fait hagard. La trouille y fait des claquettes. Marc abat sa dernière carte. Au littéral comme au figuré. Il retourne une de ses propres cartes.  

« Je la gardais spécialement pour vous. »  

Le valet de trèfle, également. Deux valets de trèfles dans un seul et même jeu. Le grand black se redresse. Le Coréen s’enfonce dans son siège. Kriszcek ne bouge pas d’un cil.  

« Qui… qui nous dit que ce n’est pas vous qui avez triché ? », tente le Coréen.  

« Parce qu’il a pris soin de ne jamais prendre ses cartes en mains. A aucun moment. »  

C’est Kriszcek qui a parlé. De sa voix grave et froide, sans sentiment. Mais le regard qu’elle pose maintenant sur le tricheur est éloquent de menaces. Le Coréen tente de se relever, mais les pognes puissantes des deux malabars qui ne quittent jamais la femme d’affaire hongroise, et qui se sont silencieusement approchés du joueur, le repoussent calmement – mais solidement – dans le fond de son siège. Marc ramasse ses propres jetons et redistribue la masse de jetons de l’Asiatique entre les trois autres joueurs. Un silence de plomb accompagne ses gestes. Marc empoche sa mise et se dirige vers la sortie. Le Coréen jappe de panique.  

« M. Danglar !... Je vous jure que je suis désolé… Ne me laissez pas ici ! »  

Un dernier regard.  

« Soyez bon perdant, Monsieur... »  

Peu importe, son nom n’a plus d’importance.  

Marc referme la porte et traverse le casino. Svetlana Krisczek le rejoint alors que le caissier lui propose un chèque pour toucher la somme de ses gains.  

« Je vous dois mes remerciements, je suppose », dit-elle.  

« Pas de quoi.  

- Malgré tout, vous m’avez saigné à blanc. Me donnerez-vous une chance de récupérer mes 100 000 $ ?  

- J’ai été réglo dès le départ. C’était ma dernière. De chez dernière.  

- J’aimerais vous convaincre du contraire.  

- Mais vous ne pourrez pas. J’ai promis à Madame, figurez-vous. Et je ne bluffais pas. »  

Marc coupe la discussion et se dirige vers la sortie. Il sait que Kriszcek finirait par le « convaincre » s’il restait. Mais elle est une joueuse, une vraie. Et en ça, il sait aussi qu’elle finira par avaler la couleuvre, bon gré mal gré.  

Néanmoins, il se retourne une dernière fois.  

« Dites-moi, notre ami Coréen… Vous n’allez pas… ?  

- Vous vous retirez du jeu, M. Danglar ? Alors cela ne vous regarde plus. »  

 

Le soleil de Monte Carlo est agressif et Marc est plus que claqué. Avant de monter dans sa voiture, il consulte sa montre. 8h30, samedi matin. La partie a duré près de 48 heures… Vanda va le tuer.  

 

 

Vanda (Martha Ren) est justement assise sur le fauteuil du vestibule quand il rentre enfin à la villa. Elle est superbe. Sa robe sculpte son magnifique corps blanc et ses cheveux blonds tirés derrière son crâne lui donnent le port d’une reine. On dirait Grace Kelly. Mais Sa Majesté a son visage des mauvais jours. Et d’ailleurs, ses valises sont posées près du fauteuil. Il préfère attendre le coup de semonce.  

« Tu vois, je suis bonne joueuse. J’ai préféré t’attendre plutôt que de partir en laissant un mot.  

- Vanda, s’il te plait…  

- Ne prends pas la peine. Je pourrais finir tes phrases par cœur. Mais ça y est, Marc. La limite est franchie. »  

Elle chausse ses lunettes de soleil. Pour cacher ses yeux qui commencent à s’embuer dangereusement. Elle prend son sac à main, le chauffeur de taxi viendra porter les valises.  

« Ne t’inquiète pas, je dirai à mon avocat d’être réglo dans le partage. Après tout, je suis aussi fautive que toi. Je t’ai cru beaucoup trop longtemps. J’ai cru que tu arrêterais vraiment. Une vraie conne qui n’a que ce qu’elle mérite…  

- Vanda, arrête et écoute-moi ! »  

Il la tient par les épaules.  

« J’étais sérieux ! C’est fini. C’était vraiment la dernière. C’est pour ça que ça a duré si longtemps. Il fallait que ce soit une dernière magistrale. Tu peux comprendre ça ! »  

Il faut qu’elle comprenne. On ne cesse pas une vie de jeu, à travers le monde, avec ses succès et ses tréfonds gargantuesques, sur une petite partie entre potes. Il ramène quand même près de 300 000 $. Cela devrait peser dans la balance !  

« Regarde. »  

Il sort deux billets d’avion de sa veste.  

« Je t’ai dit qu’on partirait autour du monde. Voilà ! C’est fait. On part dans trois jours. C’est vraiment fini, ma chérie. Je te le promets. »  

Vanda reste silencieuse, cachée derrière ses lunettes noires. Mais le coin de sa lèvre tremble. Son index gratte nerveusement la paume de sa main. Ses petits signes habituels. C’est gagné.  

« Tu le promets-promets ?  

- Je le promets-promets. C’est toi et moi, maintenant. Mais laisse-moi quelques heures encore. Je n’ai pas dormi depuis jeudi dernier !... »  

 

 

Marc se réveille doucement sous la caresse de doigts perdus dans ses cheveux. Vanda est penchée au-dessus de lui, souriante, radieuse. Le contenu des valises est retourné dans le dressing. Le réveil montre 16h.  

« J’ai préféré te réveiller pour te prévenir. Arthur a appelé. Il sera là ce soir. »  

Marc sourit dans l’oreiller. Son fiston pour le week end.  

Arthur vit avec sa mère, l’ex-femme de Marc, à Londres, où il termine ses études de droit international. Il ne l’a pas vu depuis de nombreux mois. Avec un peu de chances, il vient leur annoncer la réussite de ses examens. Ou alors le remercier des 50 000 $ que son père vient de lui envoyer pour assurer le confort de son début de carrière. Marc a beaucoup misé sur lui, a beaucoup investi aussi. Il l’a préservé de ses années noires, celles où le jeu n’était pas avec lui. Arthur ne sait d’ailleurs pas que son père est un joueur. (« Etait un joueur ») Et la pension gratinée qu’il a négocié avec son ex-femme l’a assuré qu’Arthur ne l’apprendrait pas non plus par sa mère. Son fils n’aura pas la vie de son père. La sienne sera propre et sûre. Elle ne dépendra pas des montagnes russes du jeu.  

 

 

Au même moment, un jeune homme (Paul Shermann) pénètre dans le casino de Monte Carlo. Il s’installe au comptoir du bar et commande un whisky. Il le savoure quelques instants, puis se penche vers le barman.  

« Ca joue gros ici ?  

- Pardon Monsieur ?  

- Je te parle de Poker. Des gros joueurs ici ? J’ai 50 000 balles à dépenser. Je veux du lourd en face de moi.  

- Je vais voir ce que je peux faire, Monsieur. »  

Le barman sort de son comptoir et se dirige vers une jeune femme, assise seule sur un sofa de la salle devant un verre de champagne. Il lui parle à l’oreille. Un instant plus tard, il revient vers le jeune homme.  

« Madame Kriszcek vous invite à sa table, Monsieur. »  

Le jeune homme la rejoint. Elle est belle, de cette beauté glaciale des femmes de l’Est. Il la salue et s’assoit sur le fauteuil qui lui fait face. Il ne sait pas très bien comment entamer la discussion. De son côté, Svetlana Kriszcek a trop d’expérience pour ne pas reconnaître un bleu au premier coup d’œil. D’ordinaire, elle ne s’abaisse plus à plumer les débutants. Mais elle est éreintée, et a perdu gros lors de sa dernière partie. Une victoire rapide et 50 000 $ ne lui feraient pas de mal.  

« Je ne connais pas votre nom, Monsieur.  

- Arthur Danglar. »  

Peu de gens sur Terre ont été témoins de ce qu’Arthur Danglar vit à ce moment précis : Svetlana Kriszcek sourit…  

 

 

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Un film de Jill COLLINS  

Sur un scénario du Corbeau, librement adapté d’un épisode de la série Hitchcock présente (je ne me souviens plus du titre)  

 

Avec  

Shawn GREEN - Marc Danglar  

Katia OBLOMOV - Svetlana Kriszcek  

Paul SHERMANN - Arthur Danglar  

Martha REN - Vanda Danglar  

 

Sur une musique de Keith FITZPATRICK

Scénario : (2 commentaires)
une série B dramatique de Jill Collins

Shawn Green

Katia Oblomov

Paul Shermann

Martha Ren
Musique par Keith Fitzpatrick
Sorti le 11 décembre 2038 (Semaine 1771)
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