Cinejeu.net : devenez producteur de cinéma ! (jeu en ligne gratuit de simulation économique)

Zero Degree Ent. présente
Le parfum du thé

La porte s’ouvre silencieusement.  

Dans le salon, tout est calme. Seules quelques gouttes d’eau de pluie fines viennent frapper les carreaux comme des larmes tombant en cette matinée d’automne.  

La femme entre sans un bruit. Elle semble glisser sur le sol tellement ses pas sont réguliers.  

On distingue à peine sa silhouette dans sa longue robe pâle, et ses cheveux d’un blanc éthéré cachent son visage, si tant est qu’elle en ait un.  

Elle s’avance vers le piano où trône une tasse vide, dans sa soucoupe. Une partition de Schubert est tombée au sol.  

Ce n’est ni la partition ni la tasse qui intéresse cette femme. Elle se penche vers un petit tas de poussière qui semble avoir été posé au sol telle une dune miniature.  

D’un mouvement agile de la main, la femme recueille l’ensemble du tas, la poussière semblant être aspirée par sa main. Puis lentement, elle transvase l’ensemble dans une petite fiole de verre.  

Puis, aussi discrètement qu’elle était entrée, la femme quitte la pièce, sans un regard.  

 

 

« Regarde ce que j’ai déniché !» et Alexandre ( Steven Delerue ) ouvre le lourd coffret en bois qu’il présente à sa femme.  

Cynthia ( Elaine Coates ) n’en croit pas ses yeux : « Cette boite est vraiment magnifique, mais qu’est-ce qu’elle contient ? »  

Un sourire aux lèvres, Alexandre présente l’intérieur de la boite qui contient une dizaine de sachets de thé. Une bien grande boite pour seulement quelques sachets. Mais quels sachets ! Alexandre à découvert ce petit magasin qui vient à peine d’ouvrir dans une ruelle près de chez eux. Tenu par un vieil Asiatique ( Chinois, Vietnamien, comment savoir… ), et qui fourmille de toutes sortes de thés, tous plus exotiques les uns que les autres.  

Rien qu’en pénétrant dans l’échoppe, Alexandre a été littéralement envouté par les odeurs, par l’atmosphère qui règne dans ce lieu, mélange de laboratoire d’apothicaire et de caverne d’Ali Baba. Et après plusieurs minutes à observer ce qui était présenté, il s’est décidé, un peu au hasard il faut bien l’avouer, sur un petit assortiment de quelques sachets. Car comment savoir quels sont les parfums qui sont proposés, les sachets qu’il a choisis ont tous des noms plus étranges les uns que les autres : "Cantato", "Eloquencia", "Musicaa", "Désir perpétuel", "Algorythmie", "Hypocratus"…. Aucun nom qui ne puisse donner une indication sur la saveur proposée.  

« Je vais m’en servir un tout de suite, tu en veux un ? » demande Cynthia, excitée par cette découverte.  

« Non, merci, j’y goutterai plus tard, nous sommes déjà presque en retard. Tu peux en prendre un, mais dépêche-toi quand même ! »  

Et Cynthia, après une brève hésitation choisis le sachet "Musicaa" et va se faire chauffer de l’eau.  

 

 

« Quelle vue magnifique ! » se dit Alexandre en entrant dans la pièce. Ils sont au 62eme étage, et les baies vitrées de l’appartement de Victor ( Mathieu Wauthier ), son associé, permettent d’admirer les lumières de la ville. De nombreux invités sont déjà arrivés, Alexandre peut apercevoir ici un homme politique en vue, un peu plus loin là un chirurgien de grande renommée, Victor a toujours su y faire pour naviguer dans la haute société.  

Justement, Victor arrive, les bras ouverts pour les accueillir : « Mon associé préféré, le cabinet Wolf & Stackmann est au grand complet ! Et Cynthia, la beauté incarnée, comment marche ta maison d’édition pour enfants, ma chère ? »  

« Très bien, très bien, oh ce n’est pas le concerto pour violon de Dvorak que l’on entend en fond ? »  

Victor semble surpris « Et bien tu as l’oreille musicale en plus d’être magnifique, je ne savais pas que tu étais une aussi fine connaisseuse en musique classique ! »  

« Moi non plus !» ajoute Alexandre, très étonné « Je pensais que sa culture musicale classique s’arrêtait au dernier CD de Richard Clayderman ! » Cynthia fusille son mari du regard.  

« Bon, trêve de bavardage, j’ai une tonne d’amis hauts placés à vous présenter ! » et Victor attrape Alexandre par le bras et l’entraîne vers les nombreux invités.  

La conversation bat son plein, mais depuis un moment, Alexandre a perdu de vue Cynthia « elle a dû rencontrer une vieille copine et elles doivent être en train de se raconter des souvenirs de jeunesse ! » pense-t-il. Lorsque soudain, il entend une mélodie endiablée au piano un peu plus loin. Victor a engagé un pianiste, et bien ça m’a l’air d’être un virtuose.  

En jetant un œil, Alexandre s’aperçoit qu’un petit groupe de personne entoure le piano. Il s’approche, et quelle n’est pas sa surprise de voir Cynthia assise devant l’instrument, en train d’interpréter la Sonate pour piano N°18 en ré majeur de Mozart.  

Alexandre n’en croit ni ses yeux ni ses oreilles. A sa connaissance, Cynthia n’a jamais approché un piano, alors en jouer…  

Une dernière montée chromatique et Cynthia achève le morceau sous des applaudissements nourris.  

Alexandre s’approche de sa femme « Tu ne m’avais jamais dit que tu savais jouer… » « Hein, euh, non, j’ai vu le piano, j’ai eu envie d’essayer, et c’est sorti tout seul ! »  

 

 

L’esprit encore retourné par les prouesses de sa femme d’il y a trois jours, Alexandre verse l’eau chaude dans la tasse et choisit un des sachets dans la boite qu’il trempe précautionneusement. Voila dix ans qu’ils sont mariés, comment a-t-elle pu lui cacher cela si longtemps, et pourquoi ? Il entend l’eau ruisseler dans la salle de bain, elle finit de prendre sa douche avant de partir au travail. Il boit quelques gorgées de thé. Décidément, il est vraiment délicieux.  

On sonne à la porte. Alexandre finit la dernière gorgée et va ouvrir.  

C’est une petite femme blonde (Jade Feather ), à l’air stressé qui se tient devant lui.  

« Mr Stackmann ? bonjour je suis Anaïs Formellone, vous auriez, …vous auriez quelques instants à m’accorder ? »  

« Pas vraiment, nous devons partir au travail dans les prochaines minutes, que puis-je pour vous ? »  

« Je suis désolée …de venir à l’improviste et peut-être à un moment… inopportun, mais vous courez un grave danger ! »  

Petit sourire d’incrédulité sur le visage d’Alexandre. On dirait qu’il a affaire à une folle... « Je sais que vous avez acheté du thé au petit magasin qui vient d’ouvrir, je vous en prie…, ne le buvez pas. C’est… c’est…un….produit ….toxique. J’en ai offert une boite à mon mari il y a quelques mois, un sachet… "Arte de Lingua", mon mari était un musicien hors pair, un concertiste de renom, mais qui ne parlait que Français et quelques bribes d’Anglais. Après avoir bu ce thé, il a commencé à s’exprimer dans de nombreuses langues, un Anglais parfait, mais aussi Espagnol, Russe, Turque, allant jusqu’à s’exprimer en Araméen ou en Grec ancien.»  

« Et bien c’est très bien pour lui. »  

« Mais cela ne s’arrête pas là. Quelques jours après avoir bu ce thé, il était en train de jouer du piano lorsqu’il a disparu. »  

« Ah, c'est regrettable, mais je ne vois toujours pas pourquoi vous me racontez ça… » Dit Alexandre qui commence à être exaspéré.  

« Et bien c’est la faute du thé, il prend le don, la connaissance de la personne qui le boit, et ensuite la fait disparaitre, et si vous avez bu de ce thé, il va vous arriver la même chose… »  

La femme s’arrête un instant, puis : « Vous en avez bu… oh malheur.. »  

Alexandre d’un air exaspéré commence à refermer la porte sur Anaïs : « Ecoutez, je n’ai pas que ça à faire d’écouter vos sornettes, je pense que ce n’est pas de thé dont vous avez besoin, mais d’un bon docteur qui vous prescrive les médicaments adéquats. » Et il referme la porte sur la jeune femme.  

 

 

« C’était qui ? » demande Cynthia en peignoir de bain.  

« Oh rien, une détraquée, dépêche-toi, comme d’habitude nous allons être en retard ! »  

« Ok, je me dépêch… » Et soudain Cynthia est prise comme d’une sorte d’étranglement. Son corps se rigidifie. D’un geste nerveux elle fait valser son peignoir. La peau de tout son corps, d’habitude si pâle, commence à prendre une teinte grisâtre. Elle est prise de sorte de petits tremblements. Et peu à peu, Alexandre, figé de terreur, voit sa femme se décomposer en milliers de petites particules, des grains de poussière qui tombent lentement vers le sol. Le temps semble s’être ralenti. Les particules qui autrefois composaient Cynthia viennent doucement se poser les unes contre les autres, pour ne plus former qu’un petit tas de poussière grise, telles les cendres d’un défunt à la sortie du crématorium.  

Alexandre voudrait réagir, mais il est paralysé. Une force invisible l’empêche de tout mouvement.  

Il ne peut ni crier ni bouger, prisonnier d’un étau invisible. Lorsque doucement, la porte de l’appartement, bien qu’elle ait été fermée à clef, s’ouvre. Telle un fantôme, une femme élancée, vêtue d’une robe claire a l’aspect aérien, la chevelure d’un blond irréel, pénètre dans la pièce, comme flottant au-dessus du sol. Alexandre voudrait crier mais il ne peut rien faire.  

La femme se penche au-dessus du tas de poussière qui étrangement, vient se lover dans sa main. Une fois le tas dans la main, la femme sort une fiole d’on-ne-sais-où, et fait glisser les "cendres" à l’intérieur, sans qu’un seul grain ne tombe à côté.  

Puis elle se redresse et quitte en silence la pièce.  

L’étreinte d’autour d’Alexandre se relâche brusquement et il tombe au sol. Il lui faut plusieurs minutes pour péniblement se relever et tenter de s’asseoir. Son esprit n’arrive pas à intégrer la scène à laquelle il vient d’assister.  

Puis doucement, l’idée remonte le long de son cerveau. Et si cette femme avait raison. Si tout cela venait du thé.  

Il tourne la tête pour voir la tasse qu’il a bu peu de temps avant.  

Sur le sachet, le nom du thé qu’il a choisi. "Blue Assassin".

Scénario : (2 commentaires)
une série B fantastique de Gina Holmes

Steven Delerue

Jade Feather

Mathieu Wauthier

Elaine Coates
Musique par Erwin Bregman
Sorti le 30 avril 2044 (Semaine 2052)
Entrées : 5 409 650
url : http://www.cinejeu.net/index.php?page=p&id=54&unite=fenetre&section=vueFilm&idFilm=25248