Jeanne Dreyfus : Chloé  

Weston Harnell : William  

Tout le monde pensait que ça allait... sauf moi.  

Début de l'automne, fin de soirée, à Chicagole.  

Chloé regarde son père William, qui a le regard plein de tristesse et de peur, puis monte les marches en direction de sa chambre. William lui a dit qu'il fallait partir immédiatement, sur le champ. En allumant la lumière de sa chambre, Chloé veut commencer à faire ses valises mais ses bras tremblent et a l'impression qu'ils pèsent une tonne. Son coeur bat à grande vitesse et ses yeux n'arrivent plus à retenir les larmes qui ne demandaient qu'à couler depuis de longues minutes. Chloé n'arrive pas à réaliser. Comme elle le craignait depuis quelques temps, c'est arrivé.  

Une semaine s'est écoulée. William et Chloé ne se parlent plus beaucoup mais ils savent qu'un jour ou l'autre, ils devront le faire. Par besoin déjà, mais aussi et surtout pour la conscience de leur acte. Chloé se sent coupable même si elle sait qu'elle n'a rien fait dans tout cela. Elle aurait pu l'en empêcher mais elle était restée là sans rien faire, à regarder l'horrible geste de son père. Encore une fois, il s'est montré violent et il ne savait pas ce qu'il faisait. Comme si quelqu'un controlait ses faits et gestes. Et là, c'était allé trop loin, beaucoup trop loin.  

Ils leur fallaient repartir de zéro. Tout recommencer. Situés dans leur chalet de vacances, Chloé entend le grincement de la porte d'entrée, son père vient de rentrer avec deux lapins pour le déjeuner. Elle finit de faire sa toilette, de se passer un coup de gant chaud sur le visage, et le rejoint. William regarde sa fille. Elle parait épuisée et elle a les yeux rouges. Il comprend qu'elle vient de pleurer encore une fois. Ils se regardent sans rien dire.  

- Personne ne le saura, je te le promets, dit simplement William légèrement surpris du ton simple de sa voix. Personne ne doit le savoir, ça doit rester entre nous.  

Chloé ne sait pas quoi répondre, ni quoi faire sur le moment. Elle acquiesce impuissante, se contente de regarder son père faire la cuisine un petit moment, puis file s'asseoir sur une chaise près de la fenêtre du petit salon.  

Inconsciemment, Chloé s'est recroquevillée sur elle-même. Elle se rappelle avoir crié "Non" ce soir-là sans réussir à faire quoi que ce soit. Son esprit est, depuis cet instant, dans un désordre total, mettant en place une petite panique qui risque d'éclater à tout moment. La peur la ronge.  

Que son père soit l'auteur de ce crime ne fait qu'empirer les choses. Il a l'esprit malade mais que faire ? Rester dans le chalet avec lui ne changera rien, elle le sait. Il faudra qu'ils sortent un jour ou l'autre pour ne pas devenir fou, mais surtout dire la vérité.  

Son père n'était pas réellement son père ce soir-là. Dire la vérité le ferait mettre en prison. Et si il va en prison, ce serait comme y mettre un innocent. Et ça, ce serait injuste aux yeux de Chloé.  

Elle refuse toute responsabilité de ce qui est arrivé, c'est clair là-dessus. Son père paraissait très horrifié par son geste. Si c'est lui le coupable, il a agi en toute logique en tant que schizophréne. Elle a envie de dire la vérité mais comment le faire ? De toute façon, elle est obligée de faire confiance à son père puisqu'elle n'a pas les moyens nécessaire de descendre en ville pour prévenir la police. Elle n'a pas vraiment le choix.  

Dans la soirée, après le dîner qui était, il faut l'avouer, très bon. Chloé prévient son père qu'elle va faire un tour. Non pas pour s'échapper car le froid d'automne en montagne aurait eu raison d'elle, mais plus pour se faire pardonner. A quelques mètres du chalet se trouve une tombe du nom de Hélène Merriel, celle de sa mère. L'origine de tout cela. Elle se souvient parfaitement de la scène, le soir de sa mort. Pourtant, tout avait bien commencé...  

William a travaillé dur, comme tous les jours. Le soir, il rentre aux alentours de 20 heures car son emploi lui prend beaucoup de temps. Comme toujours, Hélène et Chloé mangent un peu avant pour ne rater aucun épisode de "Chronicles of the Bitch" leur série favorite, William le sait même si il aimerait que les deux personnes les plus chère à son coeur mangent avec lui. Le respect quoi ! Là, c'était une dure journée et pour la calmer, il a accompagné des amis au bar du coin et vers la fin, le William n'était plus tout à fait le même, comme toujours dans ses journées pourries. Surtout que là, c'était presque 23h et que Hélène l'avait appelé plusieurs fois, évidemment inquiète.  

Ce qui ne plait pas du tout à Hélène qui aurait préféré qu'il rentre sobre. Elle sait comment il est dans ces moments-là. Il est tout le contraire. Une dispute comme d'habitude éclate et Chloé la regarde avec peine. Mais des mots violents et choquants ont fait qu'Hélène a giflé son mari.  

- Sale pute ! Je vais t'apprendre à me gifler ! a répondu le mari.  

Hélène, en face, ne s'attendait pas à ce qu'il lui donne un coup de poing aussi violent dans le nez. Malgré une tentatuve d'esquive, le poing s'abat sur son visage. Elle se heurte contre le mur et s'écroule. Inconscient de son état et de ses gestes, l'homme continue de la frapper à même le sol. Chloé hurle "Non !" mais trop tard, Hélène est morte sous la violence aveugle de son mari saoul.  

Chloé reste un petit moment devant la tombe de sa mère. Ils ont apporté le corps dans le coffre du véhicule familial profitant de l'obscurité du soir et ils l'ont enterré à côté du chalet loin des regards.  

Chloé retourne rejoindre son père à l'intérieur une fois sa tête et son esprit reposés.  

En rentrant, elle remarque son père endormi sur la table de la cuisine en possession d'une bouteille d'alcool fort vide à la main. Elle sait qu'elle était pleine quand il l'a prise tout à l'heure. Elle angoisse à l'idée qu'il redevienne violent car elle sait que son père ne veut pas dire la vérité sur ce qui s'est passé, que tout ça doit rester secret.  

Une solution lui traverse l'esprit: prendre les clés du véhicule et s'échapper au cas où que son père ne soit plus son père. Elle les cherche dans le chalet jusqu'à qu'elle remarque qu'elles sont sur le jeans de William. Elle tente de les prendre, mais au fond d'elle, elle cherche encore une autre solution. Elle ne veut pas laisser son père seul dans ces problèmes.  

Mais tant pis, sa décision est prise. La peur qu'il se réveille violent prend le dessus. Elle s'agenouille à côté de lui, tend son bras mais elle ne se rend pas compte qu'elle vient de commettre une grave erreur. Trop occupée à prendre les clés sans réveiller son père, elle ne voit pas qu'il ouvre les yeux au même moment, avec le fameux regard qui la terrifie au plus au point...