Terre de Karatoss, an 2454 de l’ère post-apocalyptique,

C’était le matin sur le royaume de Barakoss, pour la première fois depuis plus de deux millénaires. Un mince rayon lumineux venant de l’est traversait le ciel obscur et venait s’écraser directement sur la façade de la Tour d’Atalio, juché au sommet de la Montagne du Supplice. Ce rayon semblait totalement irréel pour les habitants de la cité de Barak, qui s’était tous réunis au pied de la tour, les yeux en l’air, fixant avec émerveillement pour la première fois un peu de lumière. Après 15 minutes, le rayon disparut et tout redevint sombre, à nouveau. Mais son apparition représentait quelque chose d’important pour les humains : le Dôme Nucléaire entourant la terre de Karatoss avait une brèche, brèche que allait évidemment s’agrandire et mettre fin à la noirceur et au froid.

Cette journée là, le vent soufflait plus fort que d’ordinaire, et c’était un vent chaud, selon les standards des Barakiens. Des dizaines d’habitants sautaient de joie en courant dans un sens et dans l’autre, annonçant à tous la fin de l’ère post-apocalyptique et le début de l’ère du soleil. Il était difficile de les contredire. L’air n’avait jamais été aussi sain, la température jamais aussi chaude et le ciel jamais aussi claire.

Pour Elminir, fille du défunt Atalio de Karatoss, l’événement d’aujourd’hui signifiait que bientôt l’humanité pourrait prendre en expansion, cesser de se priver en tout et revenir à la vie « normale » d’autrefois, avant que la guerre ne vienne anéantir le monde avec le feu nucléaire. Pour elle, cela n’était pas en tout point positif. Elle avait vu dans de vieux livres décrépis de l’époque contemporaine le mode de vie des humains de ce temps. Étant donné qu’ils étaient riches en ressource de toutes sortes (végétation, animaux comestibles, eau potable, combustible et oxygène), ils gaspillaient sans remord tout ce qu’il leur tombait sous la main et ne faisaient attention à rien, comme l’avait démontré l’explosion des bombes nucléaires partout sur la planète. Il ne fallait pas répéter les mêmes erreurs que cette société de consommation qui avait plongé le monde dans la noirceur et le froid pendant 2500 ans.

Le père d’Elminir avait toujours été un ardent défenseur de la privation au profit d’une bonne qualité de vie. Il avait dût affronter de nombreux ennemis pour cette idée, mais il n’y avait jamais renoncée jusqu’à sa mort, en 2396. Depuis, Elminir régnait sur Barak, et ainsi Karatoss, avec l’aide de Salatam, fils de Silistid. Il leur faudrait contenir leur propre joie pour calmer la population et leur expliquer les défis auxquels ils allaient bientôt faire face.

Mais ce qu’ignorait Elminir et Salatam, et le reste des habitants du monde, c’est que beaucoup d’événements étranges allaient survenir dans les prochains jours, beaucoup trop même, pour leur entendement et leurs facultés corporelles. Il leur faudrait composer avec un nouvel adversaire, si puissant que leur survie allait se trouver en grand danger… : le climat solaire.



Dernier volet de la trilogie de Karatoss composée de "La Possession" et de "L'Union".