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Walken Production présente
Temps et Poussière

« Vais-je jamais atteindre les terres de l’Au-delà, là où nous allons pour mourir ? »  

 

Il marchait dans un long tunnel sombre et étouffant. Creusé dans la terre et soutenu par des poutres en bois moisi, le passage ne semblait vouloir déboucher nulle part, alors qu’il le parcourait depuis des heures. Pourtant, une voix lui parvenait des profondeurs souterraines, toujours la même voix envoutante, mystérieuse, qui devait appartenir à une femme. Il marchait inlassablement à sa recherche, complètement subjugué par le charme de cette voix qui l’appelait vraisemblablement à l’aide. Isolé qu’il était maintenant dans ce tunnel maudit, la voix qu’il entendait le rassurait, et son cœur battait à tout rompre d’impatience, à tel point qu’il ne voyait rien d’autre devant lui que l’image qu’il se faisait mentalement de l'être qu’il recherchait, une image de parfaite beauté. Lorsque la créature infernale, dégageant une odeur fétide, fondit sur lui à la vitesse de l’éclair, issue du néant, l’homme ne la vit même pas.  

 

* * *  

 

Attila se réveilla en sursaut. Pour peu qu’il ne fut pas entièrement déshydraté, il aurait été couvert de sueur nocturne. À la place, une épaisse couche de cendre lui recouvrait le corps, le ramenant à une réalité presque aussi cruelle que le pire de ses cauchemars. Étendu de tout son long en milieu de ce qui n’était rien d’autre qu’un vaste plateau poussiéreux, abandonné de toute vie, Attila se félicita intérieurement d’avoir réussi un double exploit : dormir au beau milieu de l’enfer, et se réveiller vivant. Ne voulant point sombrer dans le désespoir, un sentiment qu’il s’était toujours fait un devoir de rependre plutôt que de ressentir, l’homme s’encourageait d’un rien, car la folie était un ennemi sans pitié qu’il ne pouvait souffrir d’affronter à cet instant. Il savait toutefois que sa mort approchait, car il était complètement harassé, et assoiffé. Il avait bu sa dernière gorgé d’eau cinq jours auparavant, et depuis, la cendre était la seule chose qui avait pénétré son œsophage encore brûlante du contact incessant de la bile qu’il crachait chaque matin.  

La peau à vif, cruellement fouettée par le vent aussi glacial que brûlant, Attila tenta en vain de se relever et de poursuivre sa route vers l’est. À bout de force, ses jambes n’arrivaient plus à soutenir son poids d’homme de guerre surentraîné. Il s’était débarrassé de son armure pimpante depuis longtemps, mais se persuadait de conserver sa large lame qu’il laissait pendre à nu à sa ceinture. Elle n’évoquait plus à ses yeux le symbole de la peur et de la répression dont il était l’incarnation encore quelques semaines auparavant, mais au moins lui garantissait-elle une forme de protection, si tant est qu’il puisse être l’objet d’attaques en ces lieux maudits et fuis de tous. Jetant un dernier regard sur le ciel gris, sans nuage mais néanmoins parfaitement opaque, Attila se laissa de nouveau aller au sommeil.  

 

* * *  

 

Un bruit étrange le tira de ce qui avait dû être un long et profond coma. On aurait dit qu’un homme sifflait, mais le son n’avait rien d’humain, et en retour de ces sifflements en venaient plusieurs autres, certains entrecoupés de petits cris aigus et enjoués. Il comprit, sans savoir pourquoi, que cette mélodie venait d’oiseaux, ces petites créatures ailées dotées d’un long bec et de plumes aux multiples couleurs. Jamais au cours de sa vie il n’en avait vu, ni même entendu parler, car aucun ne fréquentait les terres de Tsikhar et ce depuis des siècles. À cette pensée, les yeux de l’homme, pourtant toujours solidement fermés, s’emplirent de larmes, et une douce mélancolie s’empara de son âme. De très longues heures durant, il ne fit rien d’autre qu’écouter la splendeur du chant des oiseaux, sans se poser de question, et il se prit à regretter qu’aucun autre habitant du royaume ne puisse profiter d’une telle manifestation de joie de vivre.  

 

* * *  

 

Attila fut tiré du sommeil par un grondement sourd, provenant apparemment de sous terre, puisque celle-ci tremblait avec violence. Le phénomène, bien que bref, inquiéta le guerrier qui redoutait que ce sol poussiéreux ne s’effondre en l’entraînant dans le néant. Remarquant que le vent était tombé, Attila pris une profonde inspiration et se releva, non sans peine, apte à poursuivre sa quête de l’inconnu. En son sein se trouvait désormais un sentiment d’allégresse indéfinissable, si bien qu’il était prêt à tout pour retrouver le Chacal et se qu’il avait honteusement dérobé au monde, avant de s’éteindre à jamais, loin des regards, dévoré de l’intérieur par une terrible puissance. Sa mission demeurait la même, mais Attila se doutait que ses intentions aient changées. Il obéissait désormais à la volonté de la Prêtresse Ahyan, qu’il appelait encore, quelques semaines auparavant, la Sorcière du Supplice. Les noirs desseins de l’Empereur Nerkoss se dévoilaient enfin dans toute leur insignifiance. Toutes ces années où il s’était fait le principal outil de cet homme n’apparaissaient plus aux yeux d’Attila que comme une grossière déviation du droit chemin. Il se surprit même, en pensant à sa famille qu’il n’avait pas hésité à éliminer à l’époque, à verser une larme. De honte ou de tristesse, il n’aurait su le dire.  

Quoiqu’il en soit, sur ses mains coulait encore abondamment le sang des innocents, et pour se racheter de cette faute pourtant impardonnable, Attila se sentait prêt à soulever littéralement le monde pour retrouver le Chacal, redonner vie à la terre et sauver le peuple des invasions sanguinaires qui sévissaient en Tsikhar depuis trop longtemps. Le cas de Nerkoss devrait être traité plus tard.  

 

Marchant avec une nouvelle détermination vers un destin dont il espérait se rendre maître, Attila, Chef de la milice du Royaume de Tsikhar, se récita une dernière fois les paroles de la Prêtresse Ahyan de la Montagne du Supplice : « Profondément enfouie est la Source de vie sous le Plateau Cendreux. Le temps et la poussière tes adversaires seront, et Chacal, leur maître, devras-tu vaincre pour protéger les tiens… »  

 

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Attila – Elrico Ridante  

Le Chacal – Raoul Camacho  

Prêtresse Ahyan – Kim Ono  

La femme du tunnel – Estelle Byrne  

BO du film – Buried by Time and Dust – Mayhem

Scénario : (2 commentaires)
une série B d'horreur de Joan Buxton

Elrico Ridante

Kim Ono

Raoul Camacho

Estelle Byrne
Sorti le 03 mars 2012 (Semaine 374)
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