Rebecca (Laurence D.) attendait depuis une bonne heure devant l'immense hall d'arrivée de JFK. Le Boeing venait de se poser sur une piste enneigée, après plusieurs cercles en hippodrome, attendant le feu vert de la tour de contrôle.  

Greg (Justin Forsey), son ami d'enfance, revenait d'un séjour humanitaire sur le continent noir, terre de ces ancêtres comme il se plaisait à le dire.  

Quel choc thermique cela devait-il être pour lui ! Passer de la chaleur sèche du désert de Somalie aux neiges de novembre new-yorkaise... Le malheureux.  

Dès qu'il sortit enfin des portails de contrôle, Rebecca se jeta dans les bras de son ami, et l'emmena se réchauffer dans un bon vieux Starbucks, une des rares enseignes symboliques de la consommation américaine dans laquelle Greg acceptait de mettre les pieds, commerce équitable aidant.  

Ils discutèrent des grandes lignes de son épopée, de la valeur ajoutée morale de ce genre d'expérience, de la leçon de vie,... les mêmes choses exactement que celles qui avaient été dites avant son départ.  

Ils rirent également, heureux de se retrouver.  

Rebecca précipita les choses pour gagner le hall des bagages, mais Greg la retint. Il n'y en avait pas. Bon cœur comme il était, il avait tout légué à la population. Pour peu que ça en vaille la peine, le geste avait le mérite d'être louable.  

Seul son sac à dos persistait, et caché dedans, un vieux livres de notes, comparable à ceux des aventuriers de cinéma et des explorateurs précoloniaux. Il avait reçu ce carnet en cadeau de la part des villageois, un objet du coup très précieux à ses yeux.  

Rien de plus qu’une curiosité locale et une valeur sentimentale forte, s’il n’avait été écrit en partie en hébreu… Ni un explorateur européen de l’époque coloniale, encore moins une tribu africaine, n’avait de raison de mêler anglais et langue hébraïque. A moins que le sujet de ses recherches n’ait des origines toutes différentes du continent noir.  

C’était ainsi que Greg avait commencé à lire les passages anglophones, et s’était bien vite rendu compte que la destination de ce carnet serait bel et bien orientale : Babylone. Sans plus de détails, le carnet parlait d’un « songe », une utopie qui se cachait sous les sables du désert. Et les indications s’arrêtaient plus ou moins là. Les écritures hébraïques devraient révéler les interrogations…  

Rebecca restait perplexe, et comprenais où Greg voulait en venir. Il projetait de se lancer dans cette aventure, dans la quête de ce « songe ». Un enthousiasme qu’elle ne partageait pas vraiment, sans doute à cause de la totale nouveauté des éléments. Après tout, ils ne savaient rien de cette histoire, et son ami voulait se lancer à chaud dans quelque chose dont il ignorait tout. Pour elle, il n'y avait pas de discussion ou de négociation possible. Il fallait attendre. Et ils attendraient, sans quoi Greg devrait se passer d'elle. C'était avec un grand pincement de cœur qu'elle lui expédiait ses conditions, et la quasi-certitude qu’elle ne pèserait rien grand-chose dans la balance de Greg.  

Mais à sa grande surprise, son ami se tut, pesant les arguments, les pour et les contre. De cette façon, il semblait redescendre sur le plancher des vaches et son regard perdait cette petite étincelle qu'il affichait depuis son retour.  

Bien sûr, Rebecca la raisonnable disait vrai sur toute la ligne. Il n'y avait rien à redire.  

Ils devaient rentrer, à présent.  

Et néanmoins engager une nouvelle aventure.  

* * *  

8 mois plus tard.  

L'avion survolait le Proche-Orient, quelque part au-dessus de la Turquie. Bagdad était leur destination.  

La capitale de l'Irak, ce pays qui rime aujourd'hui avec guerre, occupation, et destruction; mais dont le glorieux passé s'imposait aux yeux de Greg et Rebecca comme le point de départ de leur odyssée. Un généreux mécène (Jason Salmon), collectionneur et aventurier dans l’âme, leur avaient permis de prendre part à ce voyage. C’était lui-même qui serait leur guide en Orient. Il les attendait déjà, piaffant d’impatience comme un enfant le matin de Noël.  

Au pays, ils avaient mis le temps à contribution pour constituer un plan détaillé des informations qui ressortaient du vieux livre colonial. L'hébreu ancien avait été traduit. Mais s'ils avaient dépassé les connaissances du précédent propriétaire, il demeurait de nombreuses interrogations.  

Et les vestiges de l'Empire Babylonien devaient leur apporter des éléments de réponse.  

Quelques heures plus tôt, à Rome.  

La ville éternelle avait revêtit son manteau bleu marine. La douce lueur de la Lune veillait sur le peuple, tel le Sénat d'antan. La quiétude et l'insouciance automnale avait paisiblement endormi la ville. En son cœur, à l'abri de toute indiscrétion derrière les murs de la Cité du Vatican, une silhouette ténébreuse sortait d'une petite chapelle innocente.  

Pourtant, ce qui venait de s'y tramer pourrait mener à dépasser tout ce qui aurait pu être imaginé. Cela pourrait provoquer une révolution sans précédent au sein de l'Église.  

La silhouette avait obtenu l'accord.  

De la bouche même du Saint-Père.  

Une plantureuse créature, divinement éclairée par la pâleur de la nuit lunaire, attendait dans un recoin végétal des vastes et fastes jardin de la cité papale. Elle aperçut la sombre silhouette avancer vers elle, au loin. Elle reconnaissait son allure, droite et décidée. Tout l'inverse d'un espion ou d'un comploteur. Il n'y avait aucun secret qui serait échangé cette nuit. Aucun secret pour cette Église, du moins.  

Une fois échangés quelques murmures à peine voilés, l’Archange (Gaëlle Wilson) s’en retourna dans une délicieuse démarche, faisant bouillir le sang et la libido de la Silhouette (David Ponthieux). Cet ange de la mort était l’incarnation même du péché. Tout en elle était mauvais. Et pourtant divin.  

Bientôt, ses douces griffes empoisonnées allaient se refermer.