Antonio del Monte : Vernon  

Tamara Camero : Coralie  

Salomon Klem : Émile  

Naomi Masuda : Piper  

Dans un coin tranquille d’un jardin luxuriant, un vieux ver de terre nommé Vernon passait ses journées à explorer chaque recoin, lunettes bien ajustées sur son petit nez. Contrairement aux autres vers de terre, Vernon avait une vue médiocre et ses lunettes rondes lui étaient indispensables. Mais ce qui rendait Vernon vraiment unique, c'était son caractère : il râlait pour tout et pour rien.  

Un matin, alors que le soleil se levait doucement, Vernon s'agaçait déjà.  

- Ces brins d’herbe, toujours trop longs. Ils devraient apprendre à se tenir droit, marmonna-t-il en se frayant un chemin entre les tiges vertes.  

Vernon aimait se plaindre et il trouvait toujours une raison pour le faire. Mais ce qu’il aimait plus que tout, c’était lire les petites étiquettes sur les pots de fleurs. Les lettres minuscules lui permettaient de focaliser son esprit critique sur des détails précis. Ce matin-là, alors qu’il s'approchait d’un pot de fleurs récemment planté pour lire une nouvelle étiquette, une petite rafale de vent soudaine souffla dans le jardin. Vernon sentit brusquement ses lunettes glisser de son nez et, en un clin d’œil, elles furent emportées par le vent.  

- Mes lunettes ! Fichtre ! s’exclama-t-il, affolé.  

Tout autour de lui devint subitement flou, et Vernon, furieux, se mit à râler encore plus fort vers le ciel. Malgré sa colère, il savait qu’il n’avait pas d’autre choix que de partir à la recherche de ses lunettes. Personne ne le fera à sa place, après tout...  

Chaque feuille sous son ventre était une source de frustration, chaque caillou une épreuve.  

- Pourquoi faut-il que tout soit toujours si rugueux ? se lamenta-t-il en se retrouvant coincé sur une racine.  

Vernon continua d’avancer, râlant à chaque obstacle, jusqu'à ce qu'il rencontre Coralie la Coccinelle, perchée sur une feuille. Coralie était tout l'opposé de Vernon : joyeuse, optimiste, et toujours de bonne humeur.  

- Hello, Vernon, ça baigne ? Tu fais quoi par ici avec une mine aussi réjouie ? demanda Coralie avec une pointe d'ironie, en s'approchant de lui.  

- J’ai perdu mes lunettes, et tout est devenu un vrai cauchemar ! répondit Vernon sèchement.  

- Ne t'inquiète pas, Vernon ! On va les retrouver. Il faut toujours voir le bon côté des choses, dit Coralie avec un sourire radieux.  

Vernon leva les yeux au ciel, ce qui était assez difficile sans ses lunettes, et grogna :  

- Le bon côté des choses ? Tout ce que je vois, c’est une journée gâchée, et en plus je ne vois même pas bien !  

- Tu verras, une fois que tu auras récupéré tes lunettes, tout ira mieux ! lui répondit Coralie d'un ton encourageant.  

Vernon soupira et répondit :  

- Ça, je verrai bien… si je les retrouve !  

Coralie ne se laissa pas décourager par les plaintes de Vernon. Elle décida de l’accompagner, espérant que sa bonne humeur déteindrait sur lui. Ensemble, ils commencèrent à explorer le jardin, Coralie volant au-dessus de lui pour chercher des indices.  

Après plusieurs heures de recherche infructueuse, Vernon commençait à perdre espoir. C’est alors qu’ils rencontrèrent Émile l’Escargot, qui rampait paisiblement sur une feuille couverte de rosée.  

- Hé, Vernon. Tu sembles plus agité que d'habitude. Qu’est-ce qui ne va pas ? demanda Émile d'une voix lente et calme.  

- Je vais te dire ce qui ne va pas, Émile ! J’ai perdu mes lunettes, et je suis coincé à ramper dans ce maudit jardin, aveugle comme une taupe ! râla Vernon, déjà épuisé.  

Émile, impassible, hocha lentement la tête et proposa :  

- Monte sur ma coquille, Vernon. Tu pourras te reposer un peu pendant que nous continuons à chercher tranquillement.  

Vernon, bien que grognon, décida que c’était une bonne idée. Il grimpa tant bien que mal sur la coquille d'Émile et s’y installa.  

Mais après quelques minutes de trajet, Vernon ne put s’empêcher de se plaindre à nouveau :  

- Oh mais tu vas trop vite, Émile ! Je vais finir par avoir le tournis à ce rythme-là !  

Émile leva les yeux, surpris.  

- Trop vite ? Mais je vais à mon rythme habituel, Vernon...  

Vernon grommela, essayant de se stabiliser sur la coquille, tandis qu'Émile ralentissait encore davantage. Coralie, qui les suivait de près, ne put s’empêcher de rire doucement en voyant la scène.  

Alors que le trio progressait lentement dans le jardin, une ombre menaçante passa au-dessus d'eux. C'était Piper, une pie affamée qui rôdait toujours autour du sol, à la recherche de petites créatures sans défense. Vernon, bien qu’à moitié aveugle, sentit le danger approcher.  

- Oh non, pas elle ! Comme si je n'avais pas déjà assez de soucis, voilà qu'un maudit piaf veut s'en prendre à moi ! s’écria-t-il, paniqué.  

Coralie réagit immédiatement, s’envolant rapidement pour détourner l’attention de l’oiseau, tandis qu'Émile, fidèle à sa nature prudente, tentait de se cacher sous une grande feuille. Vernon, sur le dos d'Émile, se sentait plus vulnérable que jamais sans ses lunettes.  

- Accroche-toi, Vernon, murmura Émile en rampant un peu plus vite pour se dissimuler.  

Heureusement, grâce à l’agilité de Coralie qui virevoltait autour de Piper et à la rapidité stratégique d'Émile, la pie finit par se désintéresser d’eux et s’envola, frustrée de ne pas trouver de proie facile. Une fois le danger passé, Vernon poussa un long soupir de soulagement.  

- Si seulement j’avais mes lunettes, j’aurais pu mieux prévoir cette attaque ! grogna-t-il.  

Coralie se posa à côté de lui avec un sourire rassurant.  

- Ne t'inquiète pas, Vernon. Avec ou sans lunettes, on forme une bonne équipe, non ?  

Vernon grommela en guise de réponse, toujours aussi ronchon, mais au fond de lui, il savait qu'il avait eu de la chance de ne pas être seul.  

Après cet épisode effrayant, Vernon, bien que toujours grincheux, poursuivait sa quête avec un peu plus de détermination. C’est alors que Fodé la Fourmi les rejoignit, apportant avec lui son sens de l'organisation et une méthode efficace pour couvrir plus de terrain.  

- Bon, Vernon, on va chercher méthodiquement, secteur par secteur, annonça Fodé d’un ton pragmatique. Tu verras, on finira bien par trouver tes lunettes.  

Vernon, toujours sceptique, haussa les sourcils mais finit par suivre le plan de Fodé. Ensemble, ils fouillèrent chaque recoin, chaque motte de terre, jusqu’à ce que, dans un coin du jardin qu’il n’avait jamais exploré auparavant, Vernon sente quelque chose de familier sous son ventre. Il s’immobilisa, son cœur battant un peu plus fort. Il tâtonna prudemment avec son corps, et à sa grande surprise, ce qu’il avait sous lui n’était autre que ses lunettes, coincées sous une petite racine.  

- Je les ai trouvées ! s'exclama Vernon, ravi malgré lui.  

Il les remit précipitamment sur son nez, et soudain, tout devint clair à nouveau. Le jardin, les feuilles, ses amis… Tout était là, net et précis. Mais au lieu de se réjouir pleinement, il scruta ses lunettes avec un air renfrogné et marmonna, blasé :  

- Évidemment, elles sont maintenant toutes rayées…  

Ses amis, amusés par son éternelle insatisfaction, échangèrent un regard complice. Coralie sourit, Émile hocha lentement la tête, et Fodé fit un petit geste de victoire.  

Avec ses lunettes retrouvées, Vernon, toujours fidèle à son caractère, remercia ses amis d’une manière bougonne :  

- Merci… je suppose…  

Mais alors qu’il se préparait à rentrer chez lui, satisfait de retrouver enfin sa vision claire, une nouvelle bourrasque de vent traversa le jardin. Avant que Vernon ne puisse réagir, ses lunettes furent à nouveau arrachées de son nez et emportées dans les airs, tourbillonnant encore plus loin cette fois-ci. Et comme pour couronner le tout, Piper, la pie, qui n’avait pas renoncé à trouver quelque chose d’intéressant, aperçut le scintillement des lunettes et, en un clin d'œil, les emporta en plein vol.  

Vernon leva les yeux au ciel, résigné, et s’écria :  

- Mais ce n’est pas vrai... c'est pas vrai !!  

Ses trois amis restèrent figés, choqués, hésitant entre éclater de rire ou être compatissants face à cette malchance répétée. Finalement, Coralie esquissa un sourire, Fodé secoua la tête avec un soupir, et Émile lâcha un lent :  

- C'est vraiment pas de chance, Vernon…  

Et c’est ainsi que Vernon, le ver de terre encore plus râleur qu'avant, se mit une fois de plus en quête de ses lunettes, avec ses fidèles amis à ses côtés. Ensemble, ils allaient devoir faire preuve d'une toute nouvelle dose de patience et de résilience pour affronter cette nouvelle épreuve.